A
près une somptueuse adaptation du Vent dans les Saules, classique de la littérature anglaise signé Kenneth Grahame à ranger entre Peter Pan et Beatrix Potter, Michel Plessix n’avait pu se résoudre à abandonner ses protégés, et les avait entraînés dans un nouveau cycle. Son premier tome, L’invitation au voyage donnait le ton : après des tribulations bucoliques dans les sous-bois, place aux grands espaces, à l’océan, à la grande aventure. Embarqués comme clandestins sur un navire, Rat, Taupe et Crapaud débarquent dans un pays qui ressemble au Maroc, et en découvrent les us et coutumes. Le décor n’est plus le même, mais les turpitudes d'un certain batracien ont un air de déjà-vu…
Plessix est expert en mise en ambiance : plongé dans ses pages, on pouvait presque sentir la fraîcheur d’une légère brise, entendre les pépiements des oiseaux et le frémissement du vent dans les saules. Le résultat était déjà remarquable, mais le passage à un décor exotique est peut-être encore plus réussi. On est presque saisi par les odeurs des multiples épices, emporté dans un tourbillon de couleurs vives et par les bruissements des marchandages incessants. Plessix rédige ses histoires à Essaouira, et il a visiblement su retranscrire fidèlement l'atmosphère particulière qui règne dans ce port de l’Atlantique.
Enthousiasmé par ce dépaysement immédiat, bienveillant envers les personnages qu’on connaît par cœur, on en viendrait presque à ignorer les quelques imperfections de ce second volet. A la différence de l’adaptation du livre de Grahame, le rythme est devenu beaucoup plus lent, propice certes aux anecdotes (un chapitre entier consacré aux conteurs) mais peinant à relancer une intrigue plutôt mince. Tout repose sur les échanges entre les personnages, et en particulier sur un Crapaud qui crée toujours l’événement. Il est hélas un peu discret ici, mais semble heureusement reprendre sa place centrale dans la quête d’un trésor improbable qui sera le thème du prochain épisode.
Présenté dans un curieux format élargi mais de même hauteur, pour un prix légèrement plus élevé, l’album aura déclenché avant même sa parution un buzz invraisemblable qui détourne malheureusement l’attention sur un détail, alors que sa qualité le place parmi les meilleurs du moment. Les pages plus grandes permettent en tout cas à Michel Plessix d’exprimer encore mieux son talent, dont petits et grands pourront profiter ensemble et sans modération. Et ça, ça n’a pas de prix.
Michel Plessix est vraiment un grand monsieur du 9ième art, il le prouve encore avec cet album. Un souci du détail extraordinaire, un album toute en douceur et en poésie. A lire par les petits et les grands.. Merci à Delcourt pour ce format qui permet encore l'apprécier le dessin.
Quelle poésie et quel raffinement, nous suivons avec des yeux d'enfants la rencontre entre rat, blaireau, crapaud et leur nouvel ami Samir Djerbil. Le choc des cultures est savoureux et la plongée dans le souk et sa place aux conteurs très réussie. Les dessins et les couleurs traduisent de façon saisissante l'exotisme ambiant. Quels talents de conteur !!!