C
omme l'indique cette maquette particulièrement originale, L’ombre de l’échafaud, c’est un journal à sensations qui, depuis peu, fait ses choux gras des exploits du Spectre, grand bandit notoire aussi démoniaque qu’insaisissable. Physiquement absent de ce tome deux, mais présent par la peur qu’il instille auprès de la population, c’est autour de lui que toute l’action se déroule. Qu’ils soient truands avides de vengeance ou inspecteurs à l’honneur bafoué, tous agissent avec un objectif commun : percer le mystère qui entoure ce machiavélique criminel.
Masbou, que l’on connaissait en tant que dessinateur de l’inoubliable De cape et de crocs, signe ici sa première série en tant que scénariste et nous plonge avec un plaisir non dissimulé dans le Paris de la Belle époque. C’est certainement par sa galerie de personnages, tous plus truculents les uns que les autres, que cette série restera dans les mémoires : des petits voyous mégalomaniaques aux policiers inconciliables, en passant par cet énigmatique professeur Fourasse aux penchants pour l’exorcisme et la magie noire, tout ce beau monde est bien réjouissant… Et c’est sans parler du père Dudane, figure centrale de ce deuxième volet des aventures du Spectre et de sa clique, ni même du mystérieux Valkoviak, dont le talent pour la peinture s’accompagne volontiers d’un brin de surnaturel…
C’est le Grand Guignol que les auteurs font revivre ici, et dans toute sa splendeur. Alliant à la perfection humour burlesque et scènes sanglantes, ils créent une ambiance aussi crédible que gentiment décalée, nous faisant passer sans ménagement du rire aux larmes. Et Cerqueira fait montre ici d’une maîtrise plus grande encore que dans le premier tome. Dépeignant de très belle manière ce Paris aujourd’hui disparu, il gratifie ses personnages de visages qui sont autant de clichés que l’on prend plaisir à retrouver, tant ils font partie intégrante de notre imaginaire collectif.
Seul bémol à ajouter à cette déferlante d’éloges, le flou qui entoure l’avenir de la série. Car ce tome est avant tout une transition qui permet aux auteurs d’étoffer leur univers et de lancer de nouveaux personnages qui, à n’en point douter, auront une grande importance par la suite. Reste à espérer que Masbou fera bon usage de tous les éléments qu’il a savamment mis en place et qui font de L’ombre de l’échafaud l’une des séries les plus originales de ces dernières années.
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