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Panier de singe

22/02/2007 11543 visiteurs 7.3/10 (6 notes)

D eux hommes armés d’une caméra entrent par effraction dans un jardin zoologique. Leur but ? Obtenir une preuve filmée des abus sexuels subis par… L’éléphant ! Ailleurs, deux photographes totalement cyniques tentent de réussir le portrait d’un jeune garçon qui subit les quolibets incessants de l’un d’eux. Autre part encore, un homme meurt dans un bistrot après avoir raconté une histoire drôle désespérément stupide.

Vous trouverez tout ça, et bien d’autres choses, dans l’objet livresque chroniqué ici. Ce n’est pas un panier de crabe, mais bien un panier de singe, mis en place par Florent Ruppert et Jérôme Mulot, déjà auteurs entre autre de Safari Monseigneur.

L’humour sous toutes ses formes tient une place prépondérante dans cet album : parfois subtil, souvent très noir et cynique, toujours irrévérencieux, il peut aussi prendre une tournure tragicomique quand une blague potache vire à la catastrophe (ou quand deux imbéciles se jettent divers objets à la tête lors d’une soirée, du cendrier à la bombonne de gaz, pour finir par un piano à queue). Résolument décalés, les auteurs s’amusent à créer des jeux qui nécessiteront le charcutage (ou le photocopillage) du livre, à base de phénakistiscopie ou de pliages aussi complexes que pornographiques (et zoophiles, éléphant oblige). Mais leurs expérimentations ne s’arrêtent pas là : ainsi, l’histoire titrée Stéréoscopie de saloon nécessite un strabisme forcé du lecteur, afin de créer le sentiment d’une troisième dimension. Ou Le hold-up, histoire en deux pages, qui enferme ses personnages dans une redite constante et les emprisonne avant même qu’ils n’aient commis leur crime… Le rythme subit aussi les outrages de ce drôle de duo. Les dialogues au tac au tac sont étalés sur des cascades de cases verticales minuscules, ou sont confrontés en grappes de phylactères. Certains mouvements, certaines actions sont quant à eux décomposés à l’extrême, et le lecteur se retrouve à recomposer mentalement le mouvement induit par ce système proche de la pellicule de cinéma.

Le graphisme est aussi clinique et froid que possible et distancie au maximum les bouffonneries des personnages ou les exactions totalement psychopathologiques des deux photographes. Le lecteur se retrouve dès lors embarqué dans un univers aux contours guère définis et navigue à vue dans une boue glauque et surréaliste que ne renierait pas le Benoît Poelvoorde de C’est arrivé près de chez vous.

Objet hors norme et atypique, Panier de singe mérite une attention toute particulière de par son refus absolu de toute convenance et du politiquement correct.

Par G. Colié
Moyenne des chroniqueurs
7.3

Informations sur l'album

Panier de singe

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Note: 3.3/5 (38 votes)

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L'avis des visiteurs

    zaaor Le 15/10/2007 à 01:53:25

    On ne sait pas trop où mène cette bd. Sûrement un exercice de style burlesque
    où finalement, il n'y a rien à comprendre.

    Si vous aimez le genre macabre et absurde, je ne saurais plus vous
    recommander les CHRONIQUES ABSURDES qui ont la qualité d'être absolument
    noires et presque malsaines, mais où on voit vraiment où l'auteur se dirige.

    Je n'ai pas mal noté car dans le style, je n'ai jamais vu pareil imbroglio de
    n'importe quoi!

    zazou99 Le 11/09/2007 à 09:12:19

    Quelle maîtrise de construction, de mise en scène, de présentation! Beaucoup d'humour aussi.
    Oui, sans aucun doute, mais pour moi cela sombre dans le mauvais goût. Les scènes macabres, glauques, ne sont pas sauvées par le reste.

    Alors oui c'est bien, mais pour coeurs bien accrochés seulement. Pour les autres, moi y compris, je dis: à éviter absolument pour préserver ses nuits. Dommage...

    jblanc Le 08/09/2007 à 15:57:32

    Le commentaire d'Yvantilleuil correspond assez bien à ma lecture, à ceci près que pour moi la frontière du mauvais goût est franchie. Je progressais, surpris et intéressé, dans l'ouvrage, puis la succession de l'histoire "Le duei" (qui, certes, contient encore de beaux moments d'humour avec tous ces avaleurs de sabre que les duellistes utilisent pour se réarmer) puis "les deux prostituées" a emporté mon avis : ça sombre dans le malsain.

    Oui, essai OuBaPien ; oui, maîtrise de la narration et du découpage ; oui, décalage parfois réjouissant entre dialogues et action (cf "Stéréoscopie de saloon") ; oui, très original et inventif ; mais malsain.

    yvantilleuil Le 02/01/2007 à 17:09:10

    Un an après et dans la lignée de "Safari Monseigneur", Florent Ruppert & Jérôme Mulot récidivent au sein de la collection Ciboulette aux éditions de l'Association, avec ce nouveau récit d'histoires courtes sans aucune retenue et au graphisme audacieux.

    Les histoires dans "Panier de singe" tournent autour de deux portraitistes/reporters aux occupations bizarres, allant d’un reportage sur des ébats zoophiles à une partouze pour gens mutilés, en passant par l’agression de prostitués. L’humour est très noir et souvent à la limite du douteux, mais parvient d’une manière ou d’une autre à ne jamais tomber dans l’excès.

    La construction narrative est excellente, les scènes proposées malsaines ou absurdes, mais grâce à des dialogues indifférents à la monstruosité des scènes et à un graphisme sobre qui contraste avec la violence du sujet, les auteurs parviennent à créer un décalage délibéré et terriblement efficace entre le contenu et le contenant.

    Les nombreuses inventions graphiques donnent à cet album un caractère OuBaPien (l'OuBaPo, acronyme d'Ouvroir de Bande-dessinée Potentielle, a été fondé en novembre 1992 au sein de l'Ou-X-Po et à travers la maison d'édition L'Association). Au milieu d’un découpage original et de planches incorporant par exemple le langage des signes dans les bulles on retrouve effectivement diverses stéréoscopies et autres phénakistiscopes dont on peut également retrouver les versions dynamiques sur http://www.succursale.org.

    Bref, une bande dessinée qui est tout de même assez difficile d’accès à la base mais qui livre finalement une banalisation assez burlesque du macabre et qui, grâce à la narration décalée et au détachement créé par un graphisme audacieux, parvient à rester aux frontières du mauvais goût. Un ouvrage dont la richesse impose une deuxième lecture.