L
ondres, fin août 1888. L'Angleterre victorienne tremble sur ses bases à cause des meurtres en séries perpétrés par Jack the Ripper. Alors que l'enquête officielle piétine, un mystérieux message codé, caché sur les lieux des crimes, retient l'attention de Logan Mercury, journaliste d'investigation. Juste trois mots : Man Aces Cemjk. Il soumet l'énigme à ses distingués amis Walter Woolcoat, éminent linguiste, et Devin Devries. Woolcoat blêmit. Le soir du premier assassinat, il a retrouvé le dernier exemplaire du Marteau des Sorcières, le plus fameux traité en démonologie de l’histoire humaine, dans une vieille malle au fond d'un recoin de l'hôtel particulier dans lequel il venait d'emménager : Man Aces Cemjk est le titre d'un chapitre inachevé du livre maudit.
Par rapport au premier tome, l’intrigue de Man Aces Cemjk apparaît beaucoup moins brouillonne. Elle a été épurée des nombreuses tirades ésotériques qui parcouraient Warul et le scénariste, Siro, se permet de temps en temps quelques pauses salutaires afin de donner des informations supplémentaires et de permettre au lecteur d’intégrer les nouvelles données de l’enquête. Plus « réaliste » donc et aussi mieux maîtrisée, l’histoire nous fait suivre pas à pas les investigations de Logan Mercury, distillant au compte-goutte les éléments de réponses et faisant apparaître de manière très subtile la nature fantastique de cette enquête apparemment si rationnelle. Les aventures de Mercury permettent également au lecteur de se plonger dans une description fort juste de l’Angleterre victorienne, avec ses charmes et ses contradictions, entre la violente misère des bas quartiers et la dure et inconsciente rationalité des clubs de gentlemen. Enfin, Siro parvient, dans ce deuxième numéro, à mieux expliquer le fil conducteur de la série.
Issu des techniques de l’illustration et de la publicité, le dessin de Jean-Christophe Thibert est tout à fait admirable et ne laissera, sans doute, personne indifférent. Son trait est réaliste et précis à l’extrême tout en permettant une certaine liberté et caricature afin de faire ressortir les expressions faciales. Même pour les couleurs, Thibert joue entre réalisme et fantaisie, privilégiant de manière très discrète les couleurs sombres afin d’accentuer le caractère inquiétant de l’histoire. Sa description de Londres sonne juste et les pauses scénaristiques lui permettent de dessiner des magnifiques peintures de la ville et de ses habitants.
Man Aces Cemjk dispose de nombreux atouts, l’histoire gagnant en clarté et le dessin restant à un haut niveau de qualité. Au final, le seul défaut que l’on peut trouver à cet album se situe au niveau des délais : quatre ans, c’est beaucoup mais quand on voit le résultat, on peut difficilement en vouloir aux auteurs…
Plus aisé à comprendre que le premier tome mais garde de sa complexité
initiale. L'auteur se permet de tirer sur les castes sociales et les problèmes
épineux de l'ère victorienne. J'ai vraiment hâte de voir à quel cas historique se
transposera la troisième et dernière enquête.
Le dessin est toujours aussi prenant. Une impression de trois dimension se fait
saisir à presque toutes les planches. Seul bémol; on dirait qu'ils ont tous le
même visage étant donné la similarité entre les habillements propres à l'ère
victorienne et l'homogénéité des trais de visage.