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osangella est belle, pourtant son visage est fermé. Il porte les stigmates d'une histoire d'amour douloureuse. Rosangella a aimé Max, il a profité de sa beauté mais sa violence a eu raison de leur relation. Alors quand il réapparaît dans sa vie quinze ans plus tard, cela ne présage rien de bon et les blessures du passé s'ouvrent alors qu'elles commençaient à peine à cicatriser.
Pour leur nouvelle collaboration, Eric Corbeyran et Olivier Berlion abordent le sujet délicat des violences conjugales à travers l'histoire de Rosangella. Ils réalisent là un très bel album, émouvant et d'une grande justesse au point d'imaginer qu'il s'agit d'une histoire réelle tant le propos paraît vrai. C'est justement cette vérité qui dérange et met mal à l'aise car ils ont choisi de raconter la vie d'une femme qui après avoir été battue s'est reconstruite tant bien que mal, et se trouve à nouveau confronté à l'homme qui l'a blessée, meurtrie jusque dans sa chair. Avec beaucoup de subtilité, ils évitent le côté larmoyant qu'une telle histoire peut susciter en explorant les rapports humains, sans préjugés.
Corbeyran a choisi de relater les faits par le truchement de la fille de Rosangella, à la fois spectatrice et actrice de ce drame de la vie quotidienne. Ce point de vue lui permet de présenter les personnages et d'apporter par petites touches les éléments indispensables à la compréhension des liens qui unissent les différents protagonistes. petit à petit le puzzle se met en place. Les réactions des uns et des autres sont exposées lorsque Max revient. La violence ne se conjugue plus au passé. Le fait que les mots aient succédés aux coup ne change fondamentalement pas les choses, leur capacité à blesser les rend tout aussi redoutables.
Olivier Berlion a su trouver le style adapté pour illustrer cette histoire avec des couleurs pastels et lumineuses. Que l'on ne s'y trompe pas, il ne s'agit pas d'adoucir l'histoire, bien au contraire. Cette option lui permet de montrer les émotions ressenties par les personnages. La sublime couverture en est une parfaite illustration, et le reste de l'album est du même niveau.
Rosangella est une très belle réussite, le type même d'albums que l'on lit, relit, prête, conseille avec plaisir. Ce coup de maître n'arrive pas souvent dans la carrière d'un auteur, pourtant après Lie de Vin, c'est le deuxième pour le duo Corbeyran/Berlion. Cela permettra au prolifique scénariste, si toutefois il leur accorde une quelconque attention, de faire taire ceux qui lui reprochent des séries perdant de leur intérêt. Au terme des 90 pages, les lecteurs pourront découvrir et apprécier quelques explications des auteurs, quelques croquis ou encore une couverture alternative. La collection Long Courrier compte un album de qualité de plus, pour notre plus grande satisfaction.
J'ai été à moitié envouté par "Rosangella", son histoire et ses péripéties. Le scénario prend du temps à se mettre en place avec l'introduction des personnages, il faut attendre bien la moitié de l’œuvre pour comprendre de quoi il s'agit. Également, le trait du dessin a certains défauts qui me dérangent, les mêmes personnages se ressemblent difficilement d'une case à l'autre sur certaines planches, notamment Lisa et Rosangella sur la première moitié de l’œuvre avec des visages parfois bâclés en vue de 3/4, la seconde partie du récit est beaucoup plus réussi, notamment dans les expressions et le regard de Rosengella. Également les flashbacks sous forme de peinture acrylique dénote avec le style des autres planches de la BD. Le thème abordé a été vu et revu de nombreuses fois aussi bien dans les livres, qu'au cinéma, c'est le point de vue du narrateur (Lisa) qui change quelque peu l'approche face à la situation. J'ai trouvé "Lie-de-Vin" des mêmes auteurs, bien plus habile dans la construction narrative et le dessin.
Les auteurs de Lie-de-vin nous offrent le portrait d'une femme forte et touchante : une mère qui se bat pour ses enfants après avoir été frappée autrefois par son mari. Ce dernier a la mauvaise idée de refaire surface 15 ans après leur séparation à la veille du 18ème anniversaire de sa fille. C'est un être totalement sournois qui sait y faire avec les gens pour les avoir à sa botte. Face à ce séducteur calculateur, on a une femme brisée entre la souffrance et la peur du passé qui refait surface. Cependant, cette femme a su se débrouiller pour survivre. Elle a changé et n'est plus sans défense pour contrer ce redoutable prédateur.
On pourra reprocher un côté un petit peu manichéen mais la volonté des auteurs a été sans doute de démonter la mécanique du comportement de ces êtres dont on ne pouvait penser qu'il feraient une chose pareille. Le récit va se compliquer un peu avec l'interférence des trois enfants qui ont grandi et du nouveau venu dans la vie de Rosangella qui peut changer le cours des choses. On a de vraies personnalités dans ce roman graphique qui confère une véritable sincérité à l'ensemble.
Il est vrai que le sujet est difficile et semble à la mode actuellement de par les productions récentes. Personnellement, je crois qu'il faut en parler même le plus souvent possible. Chaque auteur peut apporter sa vision des choses. Celle-ci n'est pas inintéressante, bien au contraire ! Le dessin de Berlion est une véritable réussite ce qui ne gâche rien au plaisir. Une oeuvre à découvrir et même à posséder !
Typiquement le genre de BD que j'aime lire. Tout y est : réalisme, personnages attachants avec de vraie personnalité, dialogues justes et sincères. Le dessin de Berlion (que j'apprécie beaucoup) est léger, beau et parfaitement adapté à cette histoire remplie de sensibilité. L' interview des auteurs qui accompagne cet opus est très intéressant également. "Rosangella", un personnage féminin de BD que je ne suis pas prêt d’oublier.
Un sujet fort, une mise en image expressive et lumineuse, qui contraste avec la noirceur du propos, pourtant après lecture cela laisse une impression d'inabouti à cause des invraisemblances du récit et des questions sans réponse (qui paye la fête ? meurtre sans suite ?)
Reste le problème de la violence conjugale qui est bien posée.
Après une première partie un peu longue et un dessin parfois étrangement "peu maitrisé", la seconde partie de Rosangella devient véritablement intéressante, avec un dénouement peut être attendu, mais qui ne tombe pas dans le pathos. Les auteurs parviennent à nous donner envie de rencontrer l'héroïne de ce livre.
Rosangella est une oeuvre assurément intimiste, sobre, et fort intéressante que je conseille de découvrir.
Sujet difficile (violence conjugale) traité avec subtilité. Les auteurs ont réussi à donner une sincérité aux personnages et à l'histoire, et ce n'était pas gagné avec un thème aussi sensible. Rosangella, beauté froide, brisée par sa relation avec cet ex-mari "tricheur" et violent, retranscrit parfaitement le désarroi d'une femme dans cette situation. Sa souffrance, sa peur (plus de l'emprise que cet homme a sur elle et sur les autres que des coups) et son courage la rende bouleversante et touchante. Les dessins, moroses et nostalgiques sont magnifiques et parfaitement adaptés au sujet. Cet album est assurément une réussite !