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XVI° siècle : après une catastrophe écologique, l’espèce humaine a quasiment disparu tandis que les dinosaures sont mystérieusement réapparus. C’est l’ère xénozoïque, les rares descendants des rescapés ont perdu la plupart des connaissances technologiques et survivent sur les vestiges d’une civilisation à moitié engloutie.
Les premières de ces chroniques (rassemblées dans ce premier volume) ont été dessinées en 1986 par un Mark Schultz alors débutant. L’air de rien cela fait déjà vingt ans. Et ces histoires courtes sont elles-mêmes un hommage (notamment pour la forme) aux lectures de jeunesse de l’auteur, datant des années 50-60. Ce double saut temporel explique peut-être l'odeur de naphtaline de ces pages rééditées en noir et blanc par Akileos, de même que l’effet « Madeleine de Proust » qui pourrait fort bien s’emparer des plus âgés, pour leur plus grand bonheur.
Une fois le style apprivoisé (difficile de prime abord, le N&B met en valeur un trait superbe), il faudra également se réadapter au format : des histoires courtes, souvent conclues de façon rapide par une pirouette. Pratiques pour lire une dizaine de pages en quelques minutes, elles ne sont pas le moyen le plus aisé pour se plonger totalement dans un univers passionnant. Délaissant souvent les intrigues approfondies, Schultz se focalise sur le contexte, dont il dévoile les tenants et aboutissants au fil des récits. Quelques années avant la mode écolo, il décrit une planète ravagée par des cataclysmes causés par la folie des hommes, dans laquelle les leçons n’ont pas toujours été retenues. Une galerie de personnages tout droit sortis de la dernière séance sur FR3 y vit des aventures trépidantes : Jack Terenc, le John Wayne ombrageux passionné de nature et de vieilles Cadillac et Hannah Dundee, la pin-up manipulatrice qui met les hommes dans sa poche, sont les principaux protagonistes dont l’importance va croissant dans la série. Ils sont entourés de quelques méchants sans scrupules et forcément très laids, et d’une superbe collection de dinosaures réels ou non qui rappelle que sur ce plan, Spielberg n’a rien inventé.
Rien de parodique dans toutes ces pages, Schultz aime sincèrement ce genre de fictions populaires aujourd’hui disparues et partage son plaisir avec le lecteur qui voudra bien se laisser emporter. Le noir et blanc ajoute à l’ambiance rétro, et en tendant l’oreille, on pourrait presque entendre une voix nasillarde rappeler que l’ouvreuse vend des bonbons et des glaces à l’entracte… Seul hic : peut-on réellement apprécier un tel univers sans avoir le recul culturel qui permet de saisir les influences de l’auteur ? Poser la question, c’est déjà y répondre un peu : destinée avant tout aux nostalgiques d’un autre temps, cette belle édition (un second volume est prévu) permettra peut-être à d’autres de découvrir cette série incontournable qui propose une autre vision de l’aventure en bandes dessinées.
Cette édition noir et blanc rend justice au dessin de Schultz, une science-fiction débridée avec dinosaures, futur lointain et civilisation humaine vacillante. Le tome 2 devrait réparer l'erreur de Comics Usa et publier la fin.