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atilda Clarck apprend par un détective privé que son père Orlando Neri, qu'elle n'a jamais vu, est mort. Assassiné. Et qu'il l'a portée sur son testament. Elle se retrouve donc dans le château familial, en huis-clos, avec ses deux frères inconnus, sa belle-soeur et le majordome, plus Pincus,un détective privé engagé par la compagnie d'assurances pour élucider le meurtre et persuadé que ce sont les ayant-droit qui ont tué leur père. Mais peu à peu, la réunion familiale tourne au cauchemar : les deux frères sont manifestement fous, le majordome ivrogne et obsédé par le disparu, et le détective est assassiné lui aussi. Qui a bien pu tuer Harry Pincus ? Et Orlando Neri ? Et qui était-il, ce père fantôme escrimeur de génie ?
Le schéma est à tout prendre classique : le testament qui fait découvrir de nouveaux membres de la famille, les sentiments exacerbés par l'appât du gain, les meurtres en chaîne... Mais ce qui fait la particularité de Matilda Clarck, ce sont les personnages, tous invivables, auxquels il est impossible de s'identifier. Matilda est désagréable, le détective met son nez partout où il ne devrait pas, les deux frères sont imbuvables, la belle-soeur ne parle qu'allemand et japonais, quant au domestique... C'est peut-être le pire de tous. Et cette joyeuse bande vit cette aventure comme une insulte personnelle, pleine de mauvaises intentions et de méchanceté. Et c'est cette méchanceté qui donne tout son intérêt à l'album, que l'on voit forcément du dehors, ce qui force à remarquer tous les détails. Agatha Christie n'aurait pas renié le dénouement, où la surprise est de taille, même si elle est annoncée de la manière la plus neutre possible.
Graphiquement, Laperla donne aussi dans le décalé. Foin de belles héroines, de charmants jeunes hommes ou de trognes infâmes de vilains. Les héros sont tout ce qu'il y a de plus banals, et c'est ce qui les rend intéressants : on ne peut deviner leur caractère rien qu'en les regardant, il faut s'enfoncer dans l'album pour comprendre réellement qui est qui, qui est ami, qui est ennemi. Les grands aplats de couleurs aident aussi à cette neutralité, tournant au gris et blanc lors des différents flash-backs sur la vie du père, ou celle des deux frères. On sent une satire des jeunes gens pleins d'illusions partis à Hollywood faire fortune, et déchirés entre l'orgueil et l'avidité. On sent aussi une tendresse incroyable pour les héroïnes vilaines, désagréables et finalement très humaines dans leur désarroi.
Matilda Clark est loin d'être un album classique, malgré sa trame un peu convenue. Les personnages sortent lentement des archétypes, pour créer une histoire loufoque qui, sans chercher aucunement à être drôle, fait parfois sourire par ses incongruités. C'est le genre d'albums que l'on trouve trop courts, qui auraient pu être développés un peu plus loin, il manque des planches entre les planches, et pourtant cette sécheresse et ces ellipses impliquent le lecteur dans l'histoire : il décide de ce qui se passe pendant ce temps. Et n'est-ce pas une belle réussite que de faire travailler l'imagination ?
>>> Chronique de Voleurs de chien, du même auteur
Une vulgaire histoire d'héritage complètement loufoque sur fond d'escrime et de piano volant. Un dessin simpliste avec un découpage en 6 cases par planche d'une platitude monotone...
Le scénario emprunte des raccourcis très étonnants et l'ensemble manque singulièrement de coordination. Matilda Clarck, c'est un peu comme du vent...
J'ai pourtant souri à quelques répliques tant cela paraissait absurde. Cette BD ne restera pas dans les annales. A lire si votre console de jeux est en panne.
Dommage vraiment parce que la Collection Paquet-Blandice est particulièrement soignée. Il faut dire qu'après la magnifique BD "jardin d'Hiver".. je m'attendais à beaucoup mieux tant au niveau graphique que scénario. D'ailleurs je me souviens à peine de l'histoire.
Si vous avez aimé Voleurs de chien, vous aimerez Matilda Clarck. Les graphismes de Laperla sont toujours aussi clairs et percutants. Ici, c'est l'ambiance qui prime et la personnalité des protagonistes. Il nous narre avec beaucoup de légèreté les déboires de Matilda, jeune femme, qui voit sa vie chamboulée par le décès d'un proche dont elle ignorait jusqu'à l'existence. Un scénario simple, efficace et... surprenant.
On regrettera peut-être le manque de variété dans le dessin de Laperla, ses personnages ressemblant parfois un peu trop à ceux qu'on trouve dans son album précédent. A noter la couverture glacée, nouvelle ligne de la collection Blandice, qui fait de cet album est un très bel objet. Une oeuvre à lire, qui ne révolutionne pas le genre, mais qui vous fait passer un moment très agréable...