A
yant foiré un entretien exclusif avec Bachar El Assad pour avoir oublié d'obtenir un visa, Alex est dans le collimateur de son rédacteur en chef. Afin de redorer son blason, il doit absolument sortir un scoop et rapidement. En regardant à la télévision un reportage sur Corée du Nord, il a une révélation. Une interview de Kim Jong-un, le dictateur le plus reclus de la planète ! Les journalistes étant interdits de séjour à Pyongyang, il va falloir ruser. Il imagine alors intégrer une mission commerciale en se faisant passer pour un fabricant du chocolat. Kim est un gourmand, sur un malentendu, ça pourrait marcher. Ni une, ni deux et après un peu de paperasse et la confection d’une couverture en béton, il s’envole en compagnie de Marise, une photographe de guerre aguerrie, vers l’Extrême Orient. Qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?
Ce reporter existe bel et bien, il s’appelle Antoine Dreyfus et a réellement vécu cette aventure en 2009. Celle-ci a été actualisée et romancée par Emmanuelle Delacomptée et Fanny Briant pour former Pyongyang Parano, une BD mi-fiction mi-documentaire. Depuis Pyongyang de Guy Delisle (L’Association, 2003), les bédéphiles connaissent l’atmosphère orwellienne de la République Populaire Démocratique de Corée et n’apprendront rien de nouveau à la lecture de cet ouvrage. Informations verrouillées, contact avec la population impossible et propagande du matin au soir, le duo de Rouletabille ne découvriront pas grand-chose de croustillant lors de leur séjour. Sauf, peut-être, que même le plus borné des fonctionnaires ne dit pas non à un bon praliné. Pas de quoi recevoir le prix Albert Londres en tout cas.
Clichés habituels, moments de stress et d’ahurissement, un petit peu d’humour, l’album se lit aisément, mais peine à se démarquer ou à générer beaucoup d’enthousiasme. En gros, malgré son titre aguichant, il n’a que vraiment peu à voir avec les audaces d’Hunter S. Thompson. Cependant, la mise en image simple, mais maîtrisée, des couleurs agréables et une narration fluide sont techniquement au point, tout en restant assez anonyme et sans profondeur. Le choix de rester collé au témoignage de Dreyfus et à une certaine forme de réalisme a sûrement empêché de donner un petit coup de folie ou d’absurde à ce voyage improbable.
Sans étincelle ou réelle identité, aussi bien sur le fond que dans la manière, Pyongyang Parano – Deux journaliste infiltrés en Corée du Nord est à réserver aux aficionados du Juche et aux amateurs d’excursions touristiques en terres totalitaires.
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