E
n Inde, les prêtresses de la déesse Durga exercent une éradication totale des vampires, massacrant jusqu’à la dernière de ces créatures de la nuit. Un enfant échappe cependant au génocide. Il devient alors le porteur d’une vengeance aussi patiente qu’implacable. Vingt ans plus tard, les représailles se déclenchent, mais dans un tout autre environnement : les brumes sombres et inquiétantes du Londres de 1910. Tout commence par la découverte du corps d'un jeune garçon, vidé de son sang. Lord Benedict est chargé de l'enquête avec un nouvel agent, un certain Kundan.
Luana Vergari revisite le mythe vampirique en proposant un versant plus oriental. Entre Coppola et Jack L’éventreur, le scénario s'approprie volontiers le rythme du thriller et la trame policière à la Conan Doyle. Si les scènes atmosphères sont dominantes, le récit avance néanmoins rapidement et pose les enjeux efficacement en faisant monter la pression. La scénariste approfondit finalement peu le personnage principal, Kundan, qui reste énigmatique mais charismatique, à la fois élégant, imposant et terrifiant. Sa silhouette menaçante et carnassière, figure trompeuse et changeante, ne laisse entrevoir d’autres traits qu’une faim de sang et de vengeance résolue. Pour l’instant, le lien avec les pages introductives reste flou, l'intrigue semblant garder ces explications pour les deux autres tomes à venir dans l'année.
La mise en image d'Emmanuel Civiello (Korrigans, La Dynastie des dragons…) est superbe et puissante. La colorisation aux textures et aux reflets de peintures à l’huile donne l’impression de contempler une toile à chaque planche. Les matières, les architectures, la folie barbare qui se détache des mouvements et des regards du prédateur, ainsi que des foules emportées par la peur, font grand effet. Les scènes du versant hindou ne sont pas sans rappeler les illustrations des romans d’aventures à la Kipling. Kundan se regarde avant de se lire.
Luana Vergari déploie tout son savoir-faire dans cette trilogie qui mêle enquête et thème vampirique victorien de Bram Stoker au folklore indien pour un album saisissant à l’atmosphère angoissante, sublimé par le trait incomparable d’Emmanuel Civiello. Ce premier épisode progresse rondement et place clairement les enjeux. Suite en mai.
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