1789, rue Saint-Honoré, à Paris. Installé au fond de son lit, Maximilien de Robespierre est déjà fatigué par plus de trente ans de combat. Combat pour un idéal politique mais aussi combat face à lui-même. Éléonore, la fille de son logeur, le questionne. Elle souhaite écrire la vie de cet homme complexe et, à travers lui, une part de l’histoire de la Révolution française.
C’est peu de dire que Robespierre est une figure controversée de l’histoire de France. Artisan de la Révolution, élu député lors des États généraux de 1789, il est aussi connu pour avoir activement participé à l’émergence du régime désormais qualifié de Terreur, entre 1793 et 1794. Dans ce one-shot, Makyo (scénario) retrace sa vie, par morceaux choisis. D’emblée, la chronologie interpelle. L’échange entre Robespierre et Éléonore est un fil rouge astucieux retenu par l’auteur, permettant de donner une tonalité intimiste à l’ensemble. Toutefois, celui-ci débute, dans l’album, en 1789 alors qu’il est bien établi que Robespierre n’a été accueilli par Maurice Duplay – son logeur – qu’à partir de 1791. Il s’agit d’un détail. Mais cela peut désarçonner le lecteur, légitime pour s’interroger sur les autres libertés prises avec les faits historiques. Le récit reste agréable et bien mis en scène. Il explore, un peu rapidement, l’enfance du personnage à Arras et son ascension politique, jusqu’à sa chute bien connue. Outre le trait ultraréaliste de Simone Gabrielli, le principal intérêt de ce titre est qu’il apporte de la nuance dans le portrait de Robespierre. Loin de n’être qu’un tyran sanguinaire (comme il est parfois caricaturé), celui qui fut membre du Comité de salut public est cultivé, érudit et prit des positions aujourd’hui oubliées. Le 30 mai 1791, il monte ainsi à la tribune du club des Jacobins, dont il est devenu l’un des éléments les plus emblématiques, et prononce un discours en faveur de l’abolition de la peine de mort, après s’être déjà opposé à la reconnaissance de l’esclavage dans la Constitution.
Résumer une vie aussi riche, même en se concentrant sur les seules cinq dernières années, en une bande dessinée d’un peu moins de cent pages était une idée audacieuse. L’ambition n’était évidemment pas d’établir une biographie exhaustive, mais Robespierre, le sphinx mélancolique s’avère néanmoins trop superficiel, la complexité de la période et le rôle joué par d’autres protagonistes n’étant balayés qu’à très grands traits. Les amoureux d’histoire trouveront donc la lecture assez fade. Pour les autres, il peut s’agir d’une porte d’entrée propre à aiguiser la curiosité… à compléter ensuite par d’autres ouvrages plus fournis !
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