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ifficile de dire ce qu'il y a de plus fascinant chez le Capitaine Edmond Sherman. Ses yeux vairons, l'éloquence galvanisante de ses discours ou l'emprise que son charisme lui confère sur les hommes de son navire, l'Urraca. Une chose est sûre, quelle que soit l'histoire qu'il leur raconte, ces derniers seront prêts à le suivre n'importe où...
Après la science-fiction (La monde des végétanimaux chez La Joie de lire), la mythologie (Alcibiade chez le même éditeur) ou le western (la série Calfboy chez La Pastèque), Rémi Farnos s'attaque à un nouveau thème : les pirates. Et, cette fois encore, il le fait avec talent.
Autour de son capitaine, l'auteur livre un récit qui reprend les codes du genre tout en s'en émancipant. Abordages, tempêtes, début de mutinerie, escales festives et recherche de trésor sont au menu. Tous les attendus sont donc au rendez-vous mais parfaitement agencés. Affable, gouailleur et intrépide, le marin, amoureux du verbe autant que de la mer, hypnotise son équipage et l'entraîne dans son sillage pour une aventure à la limite des légendes. Toutefois, si cette quête est prépondérante, elle ne représente pas ce qui anime Sherman. Le mythe plutôt que la richesse, voilà l'originalité de ce pirate.
Variant sa mise en scène, l'auteur montre qu'il maîtrise l'art narratif à la perfection et offre de très jolies séquences. À la fois dessinateur et coloriste, Rémi Farnos propose une partition de haute tenue malgré la forte pagination. Il parvient également à maintenir en haleine grâce aux nombreux rebondissements tout autant que par les actions de ses personnages, principaux comme secondaires. Simples moussaillons, antagonistes ou second, tous sont bien caractérisés et apportent à l'intrigue. Enfin, l'écriture, qu'elle concerne les envolées du capitaine ou les dialogues, souvent pleins d'humour, participe également au plaisir de lecture.
Il va falloir faire de la place sur ses étagères, juste à côté de Long John Silver, Le Loup des mers, Hannibal Mériadec ou La République du Crâne. Drôle, enlevé, sentant bon le grand large et les embruns, Les aventuriers de l'Urraca s'inscrit dans la lignée des meilleurs récits de piraterie et confirme le talent de conteur de Rémi Farnos.
Pour les enfants et ceux qui ont gardé un esprit juvénile.
C'est une belle surprise à plusieurs points de vue.
Tout d'abord le scénario est très original, il manie les mythes du genre avec succès (Moonfleet, l'île aux trésors, Moby Dick, voire Astérix avec les pirates). Les références à ces ouvrages sont nombreuses mais ce n'est pas un copier/coller, le scénario les revisite, les emmêle savamment et crée des personnages originaux qui permettent une vraie distanciation à ces ouvrages. Les 230 pages s'avalent très aisément tant les aventures s'enchaînent à un bon rythme.
Les personnages, ils sont nombreux et très originaux avec leurs caractères bien trempés (le capitaine irréductible, son second fidèle et naïf, le (pauvre) mousse qui se construit, le méchant "Rostand le bougre"! sans foi ni loi).
Le ton est alerte. Les nombreux morts ne créent pas un sentiment d'apocalypse. Au contraire le récit est toujours joyeux, allègre.
Enfin le dessin et la mise en page sont très efficaces. La majorité des pages sont peut être moins recherchées mais d'autres notamment les scènes de chasse au poulpe et de batailles sont particulièrement bien réussies et révèlent un auteur rempli de qualité.
Bravo, à lire
Très belle surprise que cet album. Rémi Farnos offre une aventure de piraterie au scénario solide, riche en rebondissements, bien servi par un dessin expressif et dynamique. Les personnages secondaires sont légions et se disputent la vedette sans jamais que l'intrigue principale en pâtisse. Cet album est un digne successeur d'Isaac le pirate qui ne renierait certainement pas ces aventuriers de l'Urraca. On ne peut qu'espérer une suite!