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algré de beaux moments de joie et une précieuse complicité, la vie est rude pour Yuan, sa femme et sa fille. Pour subvenir aux besoins de sa famille, il n’a pas le choix que de s’absenter, plusieurs jours durant, pour convoyer du charbon. Son atout, c’est son camion, qu’il conduit pendant des heures dans des conditions difficiles et sur des routes insécures. Dans ce petit écosystème que représente le commerce du charbon dans la Chine contemporaine, Yuan a un rôle, une fonction, qu’il remplit sans broncher. Mais ce milieu est sans pitié et sans loi, si ce n’est celle du plus fort ou du plus fourbe. Il est, dès lors, vite arrivé de se retrouver dans un sale guêpier.
Thriller social : voici ce qui résume probablement le mieux l’ouvrage proposé par Aurélien Ducoudray (scénario) et Fred Druart (dessin et couleurs). De thriller il est, en effet, bien question avec ce récit construit de manière relativement classique. Un homme est mis à terre et remonte la pente tout en préparant sa revanche. Le personnage de Yuan a le beau rôle et s’avère attachant, semblant toujours agir en fonction de ce qui lui semble le mieux et, surtout, le plus juste. Si certains rebondissements sont un peu prévisibles, l’ensemble fonctionne bien, sans temps mort. Le trait nerveux participe, d'ailleurs, à une bonne immersion du lecteur. Il est toutefois permis de se demander si toute l’intrigue n’est pas, au fond, davantage un prétexte pour traiter d’une thématique plus grave. Car les résultats économiques de la seconde puissance mondiale masquent la dureté de la vie, souvent évoquée mais rarement développée. C’est précisément à cet exercice, précis et documenté, que s’attèlent les auteurs qui délivrent une vision non édulcorée de l’industrie du charbon en Chine, de nos jours. Les atmosphères sont noires et le ciel est gris, à l’image de l’âme des travailleurs qui se tuent à la tâche. L’album n’est pas un documentaire mais plutôt le tableau, sans fard ni artifice, d’une précarité immense pour des millions de chinois de l’ombre.
Original et prenant, Les âmes noires est un album qu’il ne faut pas hésiter à découvrir.
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Un "polar social" qui met en lumière la réalité de la vie d'une certaine Chine, où de nombreux Chinois se tuent littéralement à la tâche pour des salaires de misère, embourbés dans la misère, la crasse et la pollution. Pour avoir vécu un temps dans ce pays, je peux certifier que le cadre de ce récit n'est malheureusement pas inventé. Les sites naturels pollués, les villages crasseux où les gens survivent plus qu'ils ne vivent, les gosses au bord des routes qui jouent avec presque rien ... tout cela est véridique et donnent un visage peu reluisant de la seconde puissance économique mondiale (on est bien loin des sites touristiques de Pékin ou des quartiers huppés de Shanghai !).
Pour en revenir au récit, sa construction est relativement classique (un homme est victime d'un coup tordu et va chercher à se refaire petit à petit et se venger de ceux qui l'ont trahi) mais l'ensemble est plaisant à suivre, d'autant que les dessins sortent vraiment de l'ordinaire, avec un petit côté glauque qui convient parfaitement à l'ambiance noire, poisseuse et poussiéreuse qui émane de ce récit.
Je ne l'ai pas encore lu mais je trouve le visuel et le graphisme
pointus et dans l'ère du temps.
La colorimétrie est pertinente.
C'est ce qui ma poussé à acheter cet ouvrage.