L
e corps sans vie d’une jeune femme, un fils de bonne famille devenu subitement alcoolique, un médecin radié de l’ordre pour faute grave et Milan en toile de fond. Voici les protagonistes introduits et le décor planté ! Place désormais à une enquête qui emmènera tout ce petit monde vers ce que la capitale lombarde a de moins reluisant…
Malgré leur évidence, il est des rencontres qui requièrent du temps ! Ainsi en est-il de celle entre l’un des maîtres contemporains du 9e Art italien et l’un des maestros du polar transalpin.
Paru en Italie en fin 2022, sous le titre Venere privata chez Oblomov Edizioni, le volet initial de la tétralogie de Duca Lamberti avec feu Giorgio Scerbanenco au scénario et Paolo Bacilieri au dessin passe, en ce début de mai, de ce côté-ci des Alpes grâce aux Éditions Ici-Même.
La puissance du romancier d’origine ukrainienne réside dans sa capacité à nimber ses romans d’un réalisme où dialogues et narrations se combinent pour donner un tout dense et lourd sans véritable concession envers les divers personnages et cette Italie des 60’s. Pour la présente adaptation, le parti a été de se concentrer sur le verbe au risque de surcharger nombre de planches et d’amputer l’histoire d’un partie de sa matière. Toutefois, le graphisme tourmenté et semi-réaliste de Paolo Bacilieri - structuré autour de tramés tout en hachures ou en points - permet de (re)créer cette ambiance propre à l’œuvre originale. Parallèlement, le travail sur les décors, les choix dans le découpage comme la mise en page sauvegardent l’essence et le fil du récit malgré une approche graphique qui semble vouloir éviter toute tension liée aux mouvements. Finalement, l’essentiel est préservé, et pour ceux qui n’auraient pas lu ce policier, ce premier album existe par lui-même !
Si l’alchimie entre deux auteurs qui, bien que Milanais d'adoption, ne se sont jamais rencontrés opère visiblement, le trait sachant préserver la lettre, il est cependant à déplorer une fin par trop caviardée qui édulcore le cliffhanger originel... ce qui ne doit pas faire oublier tout le reste !
J'ai trouvé le début assez intéressant avec ce docteur condamné en prison pour un euthanasie et qui se voit engagé par un riche homme d'affaire à sa sortie du bagne afin de s'occuper de la santé du fils à papa se noyant dans l'alcool.
L’introduction est plutôt assez longue pour mener ce médecin à une enquête assez minutieuse sur un meurtre. Bref, le fait de soigner l’addiction du fils n'était qu'un prétexte à une banale enquête de police mené par un non professionnel en la matière mais qui se prend pour un détective du genre Sherlock Holmes pour résoudre un crime mafieux.
Il est dommage que le bavardage incessant viennent ralentir le rythme de ce récit qui ne manquait pas d'atouts à son départ. La suite ne sera que des plus classiques avec la découverte de l'assassin et son arrestation en bonne et due forme. Bref, cela manque singulièrement de surprise.
L'originalité vient du fait qu'il s'agit d'un polar typiquement italien datant de 1968 et remis au goût du jour.