L
a crise existentielle, la fameuse, celle qui touche tout le monde à un moment ou un autre dans le cours de la vie. À l’adolescence chez les plus précoces, sinon à quarante, cinquante, soixante ans pour les autres. Remise en question, retours, parfois douloureux, vers le passé, constatation du temps qui file alors que ses propres enfants grandissent. Ai-je fait les bons choix ? Et la planète qui se délite devant nos yeux du fait de nos abus ! Qui suis-je vraiment et quel est mon rôle dans tout ça ? Voilà, en très résumé, dans quel état d’esprit se trouve Gwen de Bonneval. Une petite (façon de parler) mise au point dessinée s’impose pour y voir plus clair.
Introspection sans détour, Philiations rassemble tous les doutes, peurs et pistes de rationalisation que le dessinateur des Derniers jours d’un immortel cogite depuis quelques temps. Racontées comme elles viennent, les anecdotes et les réflexions mettent le lecteur en phase directe avec le cerveau de l’auteur. Les souvenirs, les craintes et l’amour que ce dernier porte aux siens sont posés côte à côte sur le papier, comme ça vient. Les liens, quand il y en a, peuvent être directs ou brumeux suivant les cas. Le but est de trouver un sens à tout ça (la vie, rien de moins) ; comprendre les raisons de la situation actuelle et, dans la meilleure des hypothèses, agir pour établir ou rétablir un semblant d’harmonie. Cette proposition vous semble un peu confuse ? Elle l’est davantage pour l’auteur ! Et ménagez-vous une place pour une petite gêne, vous n’avez encore rien vu. Les prémices d’autres crises ou incidents potentiellement dramatiques sont suggérés à la fin de ce premier tome.
Au-delà de l’impression de payer la séance de psy du scénariste, force est de constater que Philiations se révèle être un ouvrage rempli de surprises et d’éléments susceptibles d’éclairer sa propre lanterne. Il faut dire que l’ouvrage brasse large et que la famille De Bonneval recèle un bon nombre de personnages étonnants. Un des grands-pères a été l’aide de camp du général De Gaulle de la fin de la guerre à sa disparition, par exemple. De plus, impossible de ne pas être touché par la prévenance et la confusion de Gwen quand il apprend à gérer au jour le jour un fils en détresse psychologique dès le plus jeune âge. D’ailleurs, les racines de ces troubles ne seraient-elles pas cachées quelque part dans l’arbre généalogique familial ?
Album total à la narration sincère et franche, Philiations est avant tout une autobiographie sensible. Le focus sur la formation des souvenirs, en particulier, se montre éclairant et provoquant d’une certaine manière. Il s’agit des éléments principaux avec lesquels tout être humain se construit, mais sont-ils seulement fiables ?
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