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ien calé dans une petite existence sans chichi, cela fait une bonne dizaine d’année que Simon a mis de côté ses ambitions et une partie de sa joie de vivre. Pourtant, il suffit d’un seul coup de téléphone de son vieux pote Rotthenberg lui annonçant qu’ils ont été invités à l’anniversaire de Zoé pour qu'il reprenne des couleurs. Zoé ! La fille pour qui il aurait tout quitté et qui en a préféré un autre. C’est tout un pan de sa vie qui rejaillit immédiatement ! Il croyait que c’était elle, son grand amour. En vérité, ça fait dix ans qu’il essaye de passer à une autre étape, sans réussir à l’oublier. Bon, voilà, il va la revoir, ainsi que ses amis également un peu négligés. Yaouuu ! Ça va déchirer et il va revoir Zoé, ZOÉÉÉÉ !
Une idylle passée, un héros fleur bleue, un groupe de copains et des retrouvailles dix ans après, Jim ne refait pas exactement le coup de Rome à Londres, mais c’est tout comme. Les rôles sont parfaitement distribués, les personnalités juste détaillées pour accrocher l’attention et la psychologie de chacun précisément cadrée afin d’éviter de trop se casser la nénette. Au cinéma, en France, ça serait un film prise de tête à l’esprit grinçant ; à Hollywood, une comédie romantique haut de gamme remplie de bons sentiments. En BD, le résultat nage quelque part entre les deux, tout en penchant passablement vers la deuxième catégorie. Sans surprise et secrètement espéré, le lecteur a évidemment droit à un coup de théâtre mettant la table pour une suite (et fin) à venir.
Paris, Londres, Berlin, quelques lieux emblématiques reconnaissables, un petit bout de banlieue pour donner de la profondeur au personnage principal, beaucoup de lustre et d’éclat, là aussi, Jim joue la carte du consensuel et des étapes obligées de ce genre de scénario. La mise en page est focalisée sur des protagonistes qui occupent complètement l’espace. Les décors de Rémi Torregrossa font le reste et l’immersion dans l’époque actuelle est totale. L’ensemble est clinquant, mais pas trop et les différentes scènes s’enchaînent avec efficacité et une réelle fluidité. À ce propos, la gestion des retours en arrière s’avère excellente et les glissements entre avant et maintenant se font très naturellement.
Rom-com d’aujourd’hui boulonnée jusqu’aux derniers détails, Zoé Carrington (non, pas de référence à XIII au programme) respecte à la lettre les attentes (et les poncifs) de ce type de récit populaire. Techniquement, il n’y a rien à dire, l’humour, l’étonnement et les larmes sont là où ils sont attendus et le retournement accrocheur est lancé à la perfection. Que demander de plus ?
Jim a un réel talent de dessinateur (quoi qu'on puisse regretter le caractère un peu statique de son trait). Son problème, c'est ses scénarios d'une grande vanité. Suivre les affres d'une jeunesse européenne bourgeoise dans ses découvertes du kama sutra et ses maux de cœurs, bof, bof ...
Depuis plusieurs années, je ne pense pas avoir raté un seul album signé Jim, même lorsqu'il ne réalise que le scénario comme "l'étreinte", fort réussi au passage.
Bien sûr, en débutant cette nouvelle aventure, on ne peut que songer à l'inoubliable "Une nuit à Rome", mais avec le personnage de Simon, qui, prend une place prépondérante, Jim réussi à nous entrainer dans son nouveau récit.
Le ton de l'album est surtout humoristique, en particulier la scène du repas de famille de Simon qui est certes exagérée mais désopilante. Une galerie de personnages aussi folkloriques les uns que les autres vient évidement agrémenter la lecture.
Même si l'on retrouve des thèmes chers à Jim : l'amitié, les retrouvailles et le temps qui passe, j'ai beaucoup aimé ce premier volume qui s'achève sur une révélation que j'avais tout de même vu venir.
J'ai hâte de découvrir la suite des aventures de Zoé Carrington, personnage aussi déjantée qu'inquiétante.