L
e 13 novembre 2015, Bahareh Akrami faisait la fête avec des copains au Carillon, un des bars ciblés par les terroristes. Elle n’a pas été blessée, c’est du moins ce qu’elle croit. En 2021, lorsque s’ouvre le procès, l’Iranienne de naissance réalise qu’elle compte aussi parmi les victimes. Elle choisit de se constituer partie civile pour témoigner de ce qu’elle a vécu ; ce statut lui permet d’assister à l’ensemble de la procédure. Elle rend compte de son expérience dans un carnet web ; ses publications sont réunies dans On aurait aimé savoir.
Le livre prend la forme d’un collage de texte, illustrations, extraits de pages internet, schémas et reproductions de documents. Le ton se veut didactique, sans pour cela être lourd. Un peu comme le fait Marion Montaigne dans Tu mourras moins bête, l’autrice multiplie les parenthèses pour souligner des petites choses inusitées, voire rigolotes.
Avec humour et simplicité, elle expose ce qu’elle voit et entend. Elle explique, manifeste son incompréhension, exprime ses doutes, s’insurge et se révolte, mais sait également faire preuve de compassion. Elle n’a pas de filtre et c’est ce qui assure le succès de la formule.
La spontanéité et l’authenticité de la démarche ont un corollaire désagréable : la qualité de la langue. Le lecteur s’étonne de lire « wesh », « la team », « grave bien », « meuf » ou « teasing de ouf ». La plupart de ces mots et expressions sont connus et d’autres s’avèrent aisément décodables dans le contexte (je suis duper). Certains nécessitent toutefois une rapide recherche (wallou) et d’autres demeurent indécodables (gobri). Ce vernaculaire se justifie dans Les cahiers d’Esther, une série mettant en vedette une adolescente. Il est toutefois étrange qu’une quadragénaire emprunte largement au lexique du rappeur pour raconter de tels événements.
Le dessin caricatural apparaît très sommaire. Pour tout dire, il s’agit essentiellement de croquis des intervenants réalisés à la va-vite pour nourrir le blogue. Les planches sont, du reste, parsemées d’émoticônes qui allègent le propos.
Avec ses trois cents pages, l’album constitue un intéressant témoignage d’un procès historique. À consommer par petites doses, pour éviter l’indigestion.
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