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ietro B. Zemelo est auteur de bandes dessinées. Italien, il est tombé amoureux de Lisa, une Ukrainienne, et de sa patrie. Au début de 2022, le voisin russe se faisant menaçant, le couple choisit de s’établir au pays de Dante. Peu après l'invasion, le tandem est rapidement rejoint par quelques membres de la famille. Le bédéiste présente le conflit, tel qu'il le vit de très loin. Deux fois plutôt qu’une (dans une préface et une postface étrangement servies à la sauce inclusive avec des iesl et des elleux), il se défend de s'approprier une douleur qui ne lui appartient pas.
Les tournesols d'Ukraine constitue essentiellement une chronique sur l'enfermement. N'étant pas autorisé à partir, le père de Lisa se terre dans son logis alors que la ville est bombardée. Ne parlant pas l’italien, sa mère s’isole et Taras, son jeune frère, s'enferme dans le mutisme. Tous vivent la tragédie à distance, à travers internet, les bulletins de nouvelles et les difficiles échanges téléphoniques, alors que les infrastructures de télécommunication sont en lambeaux.
Les idées sont également cloisonnées. La lecture du drame se présente sur un mode binaire et il y a peu de place pour la nuance. Celui qui n'est pas avec eux est forcément contre eux ; un animateur de radio comprendra vite qu’il n’y a pas de communication possible avec des interlocuteurs n’ayant pas d’oreilles tellement leur souffrance est grande.
À travers ce microcosme, le scénariste raconte une guerre à hauteur d'homme, au front et à des milliers de kilomètres des combats. Tous sont convaincus du bien-fondé de leur cause et tous sont déterminés à protéger leur monde, leur langue et leur culture, peu importe ce qu'il en coûtera. Que Vladimir Poutine se le tienne pour dit.
Le projet s’inspire de la formule du roman à tiroirs. L’histoire, composée d’une multitude de courts chapitres, alterne entre les jours précédant l’agression et le mois suivant. Ce va-et-vient est bien géré ; il se révèle particulièrement efficace lorsqu'une action trouve tout son sens alors qu'elle est éclairée par un événement largement antérieur.
L’album de près de deux cents pages s'appuie sur un dessin simple et efficace. Les protagonistes apparaissent schématiques et les décors généralement sommaires. La composition en quatre bandes se veut classique ; l'artiste déconstruit toutefois certaines planches et adopte des contours de cases sinueux pour traduire des moments de tension ou de violence particulièrement vive.
Un récit sensible, pour expliquer à quel point les hostilités entre les États peuvent avoir des impacts jusque dans l’intime.
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