E
st-ce que toutes les mamans ont un numéro sur l'avant-bras ?
C'est la question naïve que se posait le fils de Ginette Kolinka. Il faudra du temps pour qu'il comprenne l'origine de cette marque : celle des déportés. Pendant des décennies, sa mère n'aborda jamais le sujet, jusqu'à ce qu'elle accepte d'être interviewé pour la Shoah Foundation, que Steven Spielberg vient de créer, dans la foulée de La liste de Schindler.
Elle pensait avoir tout oublié. Elle pensait que cette période sombre resterait à jamais prisonnière d'un brouillard opaque. A sa grande surprise, les souvenirs affluèrent. Elle ressentit le besoin de les partager. Depuis, elle assume pleinement son rôle mémoriel et multiplie les interventions dans les écoles pour raconter ce qu'elle a vu... pour que personne ne puisse dire qu'il ne savait pas.
A l'aube de ses nonante-cinq ans, elle accompagne une école en visite au camp de Birkenau. Le journaliste Victor Matet et Jean-David Morvan font aussi partie du voyage afin de capturer ce témoignage bouleversant. Le souvenir de la Shoah s'éloigne lentement. Les derniers témoins s'éteignent, emportant avec eux une mémoire tragique et essentielle. La disparition inéluctable de ceux qui l'ont vécue rend le travail de transmission moins puissant. Le poids d'un regard, d'un mot de quelqu'un qui y était aura toujours plus d'impact qu'une image figée. Modestement, ce livre essaye de capturer cette pointe de vie pour que la parole de Ginette Kolinka ne s'efface pas après elle.
Le scénario d'Adieu, Birkenau prend appui sur des souvenirs de la rescapée. Un détail exhume un souvenir, une anecdote que la vieille dame relate avec beaucoup de simplicité. Avec beaucoup d'humanité, elle détaille son expérience, parce que voir ne suffit pas. Clairement, les auteurs tentent de transposer en bande dessinée ce à quoi pourrait ressembler une intervention face à des jeunes : raconter, expliquer, montrer l'immontrable, sans pathos ni jugement. Ils essayent de traduire la violence et l'horreur pour un public adolescent. Au dessin, Cesc et Efa réussissent à transposer l'horreur avec finesse et tact. Il ne s'agit pas de traumatiser les lecteurs avec des images insoutenables, mais plutôt d'établir un lien, permettre une relation avec un être humain bienveillant. De ce point de vue, l'album fonctionne très bien et la représentation de Ginette Kolinka est fidèle à l'image qu'elle possède dans les médias. Il est par contre un peu dommage d'avoir un peu trop insisté sur le fait qu'elle est aussi la mère de Richard Kolinka, batteur de Téléphone. Leur intervention dans la dernière scène n'était peut-être pas indispensable.
En tout cas, voilà un bel usage de la bande dessinée comme passeur de mémoire.
Nous avions déjà découvert le parcours de Ginette Kolinka dans une BD qui lui était consacré par Aurore d’Hondt qui avait écouté son récit en 2018 alors qu'elle était en terminale. Il faut dire que Ginette est une des rares rescapées du camp de concentration d'Auschwitz.
Les nazis avaient stigmatisé à outrance cette population de juif jusqu'à vouloir leur éradication totale afin de purifier leur race. Bref, une idéologie basée sur la haine du prochain et surtout celui qui est étranger et qui n'a pas la bonne religion.
La présente BD est une collaboration de 4 auteurs dont Jean-David Morvan. Je me suis demandé pourquoi il y avait deux BD dans un laps de temps aussi court pour la même histoire. Puis, je me suis dit que de toute façon, ce n'est pas de trop pour toucher le plus large public possible et notamment les jeunes générations.
Evidemment, il ne faut jamais oublier ce qui s'est passé même si certains voudraient pouvoir tourner la page ce qui les arrangeraient. L'antisémitisme n'a jamais été aussi important qu'en ce moment dans notre pays depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. On se rend également compte qu'elle peut sévir quel que soit le bord politique.
C'est un témoignage qui doit aller au-delà d'une certaine instrumentalisation afin que cela ne se reproduise plus jamais. La BD outre le parcours de cette rescapée décrit assez bien le contexte historique qui a favorisé cette horreur sans nom qu'est la Shoah.
On va visiter avec Ginette accompagné d'un groupe d'enfant en scolarité le fameux camp de Birkenau. Il est vrai que les visites des camps ont été organisé à partir du moment où des négationnistes ont commencé à faire germer l'idée que tout ça n'avait jamais existé. Les gouvernements turcs qui se sont succédés ont fait la même chose avec le génocide arménien. Il est assez pratique de tout oublier afin de se déculpabiliser.
Ginette prend souvent du recul mais dit les choses avec une grande sincérité. On va alors connaître tous les détails de la vie dans un camp de concentration où il faut survivre coûte que coûte. Des millions de gens en sont morts dans des conditions inhumaines. C'est une extermination à grande échelle comme jamais il n'y en avait eu dans l'histoire du monde.
Au-delà de cela, on ne devrait jamais se permettre de faire de telles différenciations basées sur la religion ou la race, tout peuples confondus ! Il n'y a pas d'exclusivité ou de sens unique bien que dans l'Histoire, la Shoah occupe une place particulière qui doit être le repère de ce qu'il ne faut plus jamais refaire.