À Sorel-sur-Poussière, la loi, c’est Junior, Shérif Junior. Flanqué de Liberté, son fidèle destrier, il a fort à faire pour ramener la paix dans sa ville. Entre la bande des Thibodeault et les frères Barjot, la pègre est prête à tout afin de faire main basse sur la bourgade. Même s’il a onze ans et que son canasson est en bois, le jeune héros a la gâchette précise et rapide.
C’est tout un western qu’a imaginé Samuel Quentin (Whitehorse) dans Shérif Junior – Il y a quelque chose de poussiéreux à Sorel-sur-Poussière. Après un rapide et discret hommage à Fred qui donne le ton à cette parodie-fleuve, l’action prend le dessus et ne s’arrête jamais tout au long des quatre cents cinquante pages de l’ouvrage. Décalages permanents où s’entrechoquent propos existentiels de bandits en recherche de sens et d’identité, réflexions pas moins profondes sur la réalisation personnelle de la part d’une prostituée féministe et autres discours variés sur l’air du temps (le nôtre, pas celui de l’Ouest américain du XIXe siècle) alternent avec les classiques attaques de banque et bagarres de saloon. L’auteur y a ajouté les ravages de la drogue et la manipulation des foules pour faire bonne mesure. Petit détail, le tout est raconté à l’aide d’un délicieux québécois parlé le plus pur.
Sur le papier, le programme à l’air alléchant et promet quelques bons moments de rigolades. C’est le cas, pour un instant seulement malheureusement. En effet, passée la surprise provoquée par le ton et les expressions amusantes, ainsi que la présentation de cette distribution farfelue, l’affaire tourne rapidement à vide. Les situations et les monologues s’enchaînent inlassablement, les personnages ne bougent plus d’un iota et l’intrigue (déjà passablement simpliste) s’évapore dès la fin du premier chapitre. Résultat, le récit ne va nulle part et laisse le lecteur sur sa faim.
Dessins au trait en noir et blanc, narration façon Joan Sfar (période Paris – Londres), découpage efficace, un réel talent d’écriture et une jolie maîtrise de l’absurde, Shérif Junior – Il y a quelque chose de poussiéreux à Sorel-sur-Poussière finit cependant par décevoir. Trop long et sans réelle direction, Samuel Quentin s’est trop regardé créer et a oublié les bases de son métier : raconter une histoire et la mener de A à Z. Dommage.
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