N
ic sort d’un divorce houleux d’avec son ex-femme. Il a la garde partagée de son fils Henry, mais pas celle de Drake, son beau-fils. La situation est difficile, car un véritable lien filial s’était tissé entre les deux et ne parlons pas d’Henry qui perd ainsi son meilleur ami. Bon an, mal an, une nouvelle routine s’établit. Cependant, une ombre plane. Bipolaire et souffrant de dépendance aux drogues, son ancienne idylle débute une descente aux enfers et risque d’y entraîner ses enfants. Coincé par la décision du juge (s’il intervient, il peut perdre son droit de garde) et des services sociaux dépassés, Nic ne sait plus quoi faire pour assurer la sécurité des siens. Peurs et crises d’angoisse vont devenir son quotidien…
Chronique autobiographique sans concession, Pill Hill (excellent titre) raconte une tranche de vie partagée par des millions de personnes. Avec plus de cinquante pour cent des mariages qui finissent en séparation, le sort de Nicholas Breutzman n'a rien d'unique. D’abord, très classique (balade dans le quartier, soupers du soir, devoirs, etc.), le scénario démarre comme une fiction sociale entre légèreté et réalisme. Des chewing-gum collés sur les arbres du parc sont le prétexte pour un peu de mystère, Nic découvre Tinder© et fait la connaissance de la charmante Emily ; la vie reprend ses droits, en somme. Mais voilà, chaque interaction (dont les effrayantes et hilarantes séances d’échanges d’enfants sur le «parking des divorcés») avec son ex-femme deviennent de plus en plus pénibles. Et cela devient la source d'un malaise insupportable, quand il apprend via des connaissances communes, la spirale destructrice de cette dernière. Il va devoir se battre contre un système totalement grippé et accepter ses propres limites.
La réalisation graphique est le témoin de l’évolution du récit. Jusque-là très plan-plan, la mise en scène et les dessins changent de style et d’allure. Les cauchemars apportent une noirceur charbonneuse et le stress entame l’autodestruction du découpage. Cette plongée dans la psyché du héros s’avère impitoyable et effrayante de ressenti. Sans compter que l’ombre de Junto Ito, le maître de l’horreur onirique (l’influence est citée et revendiquée), est également de la partie. Résultat, la lecture prend littéralement aux tripes et il est impossible de ne pas trembler en compagnie de ce papa complètement dépassé par les évènements.
Habité et conçu avec un véritable soucis d’honnêteté, Pill Hill n’est pas sans défaut. Particulièrement, cette première œuvre souffre d’un déséquilibre entre ses différentes parties et toutes les illustrations ne sont pas complètement abouties. Dans tous les cas et passé outre ces bémols, la sincérité et la problématique centrale de l’album sont indiscutables et parfaitement rendus. Un auteur à découvrir.
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