L
e nom de Rosa Parks est associé à jamais à la lutte contre la ségrégation aux États-Unis d'Amérique, tout comme la date du 1er Décembre 1955, où elle refusa de laisser sa place à un passager blanc dans le bus 2857. Cette décision, spontanée, participe à l'histoire des droits civiques vu l'ampleur de la contestation pacifique qu'elle a suscitée.
Après avoir scénarisé une bande dessinée sur Angela Davies, publiée également chez Des ronds dans l'O, Mariapaola Pesce poursuit son travail autour des figures féminines emblématiques de la lutte contre le racisme dans un pays qui se prétendait être le garant des libertés et de la démocratie. Figure emblématique de la lutte pacifique contre les lois blanches, le portrait de Rosa Parks est bien construit puisqu’il revient sur son engagement avant l'évènement du bus et les liens avec le pasteur King. Ce dernier contribue à organiser un système de boycott des transports en commun ingénieux en soutien à son amie. Afin d'éviter un récit se déroulant de manière chronologique, l'autrice opte pour la technique des aller-retours dans le temps. En effet, l'album débute avec un jeune rappeur afro-américain qui monte dans un taxi. Il porte sur lui un t-shirt où il est inscrit "I can't breathe". Le chauffeur l'interroge sur la signification des mots. Le ton monte, puis progressivement, les bouchons de la circulation aidant, la conversation s'installe. Le conducteur raconte son histoire. Dans les années 1950-1960, il a suivi avec ses yeux d'enfant ses parents qui vont entrer au fur et à mesure dans le refus d'utiliser les bus de la ville de Montgomery. Il témoigne donc, afin de faire passer la manière de faire et la volonté de Mme Parks et de Martin Luther King au jeune homme présomptueux et quelque peu inculte qu'il véhicule.
Les dessins de Matteo Mancini sont superbes. L'aquarelle apporte une douceur au ton de l'histoire, qui correspond à la manière d'agir des protagonistes. Les visages sont reconnaissables immédiatement. Les choix de colorisation sont intéressants, car ils donnent des ambiances aux différentes périodes, collant au déroulement du scénario.
Ce biopic graphique est tout aussi fort que prenant. Rosa Parks est une bande dessinée à mettre entre toutes les mains.
Proclamer la fin de l'esclavage est une chose mais que deviennent les citoyens libres de couleur noir dans un pays dominé totalement par des citoyens de couleur blanche ? Après la guerre de Sécession, il y a eu une partition du pays à la manière d'un apartheid à savoir deux peuples et un pays. Or, les noirs voulaient vivre comme les blancs et disposer des mêmes droits ce qui paraît légitime.
Ainsi, une loi assez stupide voulait qu'on cède ses places à des blancs dans les bus bondés. Rosa Parks, une couturière professionnelle de 42 ans, à la peau noire, a dit « non » le 1er décembre 1955 ce qui a entraîné un émoi dans tout le pays. Cela pourrait paraître ridicule de nos jours mais elle s'est retrouvée en prison car elle n'a pas voulu appliquer la loi en estimant, à juste titre, que celle-ci devait être remplacée par quelque chose de plus juste. Son combat a fini par payer au niveau de la Cour Suprême avec la fin de la ségrégation dans les transports publics.
On mesure ainsi tout le parcours qu'a traversé la population noire aux États-Unis jusqu'à nos jours. L'élection d'Obama à la tête du pays a prouvé que tout était possible. Il faut juste avoir le courage de dire « non » à un moment donné et ne pas agir par lâcheté. C'est tout le sens de ce récit qui nous est raconté par un chauffeur de taxi à un jeune homme de couleur également mais assez arrogant qui a oublié certaines valeurs essentielles.
J'ai beaucoup aimé cette BD sur des événements historiques certains car ils racontent également les coulisses et la stratégie adoptée par le révérend Martin Luther King pur que le changement puisse s'opérer pacifiquement et avec le maximum d'adhésion. Les auteurs italiens ont réalisé un superbe travail pour une BD hautement pédagogique qui pourra servir pour des combats futurs à travers le monde, tant il reste des choses à améliorer.