L
a fin tragique de l’expédition Lapérouse en 1788 est restée gravées dans les mémoires. Les premiers restes du naufrage fatidique avaient déjà été relevés en 1826, autour de l’ilôt Vanikoro dans le Pacifique Sud. Différentes missions firent d’autres découvertes au fil des décennies. En 1960, un regain d’intérêt a lieu quand Haroun Tazieff trouve quelques vestiges en plongeant au large de l’île. Suite à ces derniers indices, la Marine nationale, en la personne de l'amiral de Brossard, prend les choses en main et envoie un détachement sur place en 1964. Après une dizaine de jours sur la zone, sont remontées à la surface les preuves irréfutables que l’épave repérée auparavant est bel et bien celle de La Boussole, le navire principal de Lapérouse. Cent-soixante-seize ans après leur naufrage, les derniers honneurs sont alors rendus à ces marins courageux.
Fiction historique à l’élégance et au cachet indéniable, Lapérouse 64 revient sur cette ultime quête. Sans réécrire le fond de l’Histoire, Marie-Agnès Le Roux et Laurent-Frédéric Bollée ont tissé une comédie dramatique d’un excellent niveau rappelant les films de Michel Deville ou d’Henri Verneuil. Guérin, un plongeur de combat de retour d’une mission délicate en Méditerranée, est détaché auprès de l’Amiral Brossard. Plus habitué à la castagne qu’à l’archéologie, il obéit en bon militaire. À bord du patrouilleur La Lilloise, il fait la connaissance de Mlle Lacan, une journaliste au caractère bien trempé. Cette cohabitation inédite pour lui vient s’ajouter à des conditions météorologiques capricieuses et à un supérieur aux humeurs contrastées et aux attentes élevées. En résumé, la réalité avérée est couplée à de l’aventure contemporaine, le tout pimenté par les relations explosives entre des personnages aux tempéraments opposés. Dialogues piquants, situations amusantes et, en toile de fond, la tension née de l’obligation de mener à terme cette campagne de fouille cruciale rendent la lecture prenante et particulièrement entraînante.
Le bonnet rouge calé sur son crâne, Vincenzo Bizzarri illustre ces péripéties tout en maîtrise. En harmonie avec l'ambiance volontairement rétro du récit, la mise en page se montre posée et classique. Pas d’angle impossible ou de transition alambiquée, à la place, un découpage carré, avec une «caméra» au bon endroit qui décrit précisément les actions. Le résultat n’est pas statique pour autant. Le trait léger et les superbes couleurs apportent ce petit supplément de vie aux planches et aux protagoniste. Au final, sans effet de manche et aucune exagération graphique gratuite, tant les sentiments que les intempéries s’avèrent tangibles. Bravo l’artiste !
Cent fois plus percutant qu’un simple docu-BD, formidablement dynamisé par une distribution finement pensée, Lapérouse 64 est une réussite à la fois très moderne dans son approche et intemporelle grâce à ses nombreux rappels historiques. Une excellente surprise.
J'ai déjà beaucoup lu sur cette expédition qui a mal tournée sur une île du Pacifique assez mortelle pour les occidentaux à savoir Vanikoro. On se souvient de la BD de Patrick Prugne absolument magnifique pour connaître le destin des marins survivants perdus sur cette île en plein milieu de l'océan.
Cependant, l'angle choisi est plutôt celle de l'expédition chargée de retrouver l'épave de La Boussole. Cette mission de recherche a eu lieu en 1964. A noter que l'autre frégate L'Astrolabe a été retrouvé 5 ans plus tôt par l'expédition menée par le célèbre Haroun Tazieff.
Pour rappel, le roi Louis XVI avait confié en 1785 au comte de La Pérouse la direction d'un voyage autour du monde afin de faire de nouvelles découvertes et de concurrencer ainsi les expéditions anglaises.
Deux navires à savoir la Boussole et astrolabe entreprennent ce périple qui va s'achever tragiquement deux ans et demi plus tard soit en juin 1788 suite à une terrible tempête au large de l'île de Vanikoro assez inhospitalière. Il faut attendre 1826 pour qu'un capitaine marchand irlandais, Peter Dillon, découvre le lieu du naufrage de La Boussole et de L'Astrolabe, à Vanikoro, une île de l'archipel des Salomon.
On va prendre le meilleur plongeur de la marine François Guérin qui est plutôt un barbouze tuant des individus pour le compte de la République. Le voilà embarqué dans une mission d'archéologie afin de laver l'honneur de la marine nationale. Certes, c'est un peu à contre-emploi qu'il va accepter mais cela va l’entraîner dans une véritable aventure digne de ce nom qui fait la joie de son père un professeur universitaire.
En effet, cette expédition va réserver bien des surprises sur un fond historique qui sera évidemment assez bien exploité. On ne lâche carrément pas cette lecture jusqu'au bout afin de savoir si la mission va être accomplie.
Cerise sur le gâteau, le dessin de Vincenzo Bizzarri est absolument magnifique avec une bonne utilisation des couleurs ce qui ne gâche rien au plaisir de cette lecture tout à fait passionnante.
A vrai dire, j'ai particulièrement aimé cette approche qui va nous permettre d'en savoir un peu plus sur un des mystères qui a glané pendant très longtemps sur ce double naufrage.