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ébut du XXe siècle. Les Curie et certaines de leurs connaissances participent à des séances de spiritisme animées par Eusapia Palladino, une célèbre médium italienne. Les manifestations sont convaincantes. Le couple applique alors une méthode scientifique pour les mesurer et, il le souhaite, les expliquer. Lorsque Pierre décède, Marie tente en vain de communiquer avec lui, puis semble se détourner du monde occulte.
Rodolphe raconte une histoire plus ou moins connue. Il prend le parti de rappeler cette anecdote objectivement, telle qu’elle est rapportée par Pierre Curie et Charles Richet, deux récipiendaires de prix Nobel. Parmi les autres participants aux rencontres, l’académicien Henri Bergson (futur gagnant de la distinction suédoise) et, évidemment, celle qui, elle aussi décorée à Stockholm, verra sa santé minée par ses recherches sur la radioactivité. Bref, une belle brochette d’autorités intellectuelles.
L’auteur ne cherche pas à élucider le mystère, pas plus qu’il n’essaie d’explorer la psychologie des personnages pour justifier ce qu’ils ont vu. En fait, cette fascination pour le paranormal témoigne de l’ouverture du couple, lequel s’intéresse aux signes de toutes les énergies invisibles, du radium au polonium, en passant par les fantômes. Cette curiosité apparaît louable, il est tout de même étonnant qu’ils y aient cru. Cela dit, les phénomènes auxquels ils ont assisté demeurent difficilement explicables.
Le projet s’appuie sur le dessin d’Olivier Roman, lequel adopte un style sobre exprimant davantage la bonne société du début du siècle dernier que l’éclat de l’expression du surnaturel. Le trait est réaliste et la reconstitution des lieux traduit bien l’époque. Seules certaines séances d’invocation des défunts font sortir les protagonistes de leur stoïcisme, ils ont alors tendance à surjouer et les onomatopées se montrent tonitruantes ; pour tout dire, l'artiste en fait un peu trop.
Au final, Marie et les esprits constitue un récit sympathique, quoiqu’un tantinet minimaliste. Le lecteur reste sur sa faim, il aurait aimé comprendre, mais il semble bien que ceux qui connaissent les réponses reposent au Panthéon. Peut-être faudrait-il s’y rendre et organiser une petite partie de Ouija ?
Une lecture intéressante, que j'ai beaucoup apprécié.
Selon moi, il y a 3 points forts dans cette BD :
- La qualité des graphismes d'Olivier Roman, qui sont d'une rare précision (décors, habits d'époque, ambiances urbaines, ambiances plus naturelles avec les parcs, etc.). Je me suis retrouvé dans le Paris de la Belle Époque tout au long de la lecture.
- La documentation historique, avec des faits précis qui m'ont permis d'apprendre un certain nombre d'éléments sur la vie du couple Curie et de conforter mes connaissances sur le fonctionnement des séances de spiritisme réalisées à l'époque (pour avoir lu l'intégrale des nouvelles de Conan Doyle dédiées à cela, j'ai trouvé le même niveau de détails... et de mystère, car tout ne peut clairement pas être expliqué).
- La science de la narration de Rodolphe, qui nous embarque dans son récit dés le départ sans jamais nous en faire sortir. Aucune longueur, aucune lenteur. Tout va vite, peut-être un peu trop, c'est vrai : une plus forte pagination ne m'aurait pas gênée, afin d'avoir davantage de détails sur les séances de spiritisme ou sur la difficile relation entre science et spiritisme.
Je ne suis pas resté sur ma faim pour autant, c'est un vrai bon tome bien réalisé. Je suis étonné que seul l'éditeur Anspach se soit positionné, au vu du pédigré des deux auteurs...