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n jeudi, à 23h52, lors de la veillée funèbre de son voisin, Perséphone va vivre une expérience peu commune : être la première vivante à pénétrer le domaine de la mort ! Cet évènement est rendu possible suite à un fâcheux concours de circonstances. En effet, elle tombe sur le fantôme de M.Columbaria, puis sur deux collecteurs de soupirs travaillant pour la Mort, arrivés en retard. L'adolescente est la seule à les voir. Malheureusement pour elle, l'un des travailleurs de la grande faucheuse la pousse accidentellement dans le monde des trépassés. Comment peut-elle en réchapper ?
Cet album est un petit bijou. Le scénario est des plus plaisants, alternant avec brio les montées en tensions, les pauses humoristiques et les moments d'émotions. Séverine Gauthier propose une histoire pleine de poésie flirtant avec une ambiance de spleen que ne renieraient pas les nombreux poètes dont les écrits forment les interludes entre les chapitres. L'autrice a su créer un rythme prenant et efficace, qui ne laisse que peu de temps mort. Les lecteurs découvrent le monde du repos éternel et ses codes en suivant le personnage principal, qui se demande bien comment elle peut voir les trépassés et inversement. Les autres protagonistes sont tout aussi intéressants : l'ancien voisin qui lui vient en aide sous forme de spectre, ainsi que le duo comique et attachant formé par Charles et Théophile. Ces deux-là collectent les derniers soupirs pour la Mort, mais ne sont que du menu fretin dans la pyramide des employés. De plus, ils cumulent un passif d'erreurs et celle commise au début de l'histoire constitue la bévue de trop pour leur patronne. L'humour est omniprésent, qu'il s'agisse du caractère de certains personnage ou des nombreuses références avec le trépas. C'est le cas des très importantes racines de pissenlit.
Le ton du récit est magnifiquement retranscrit en image par Jérémie Almanza, bien connu des bédéphiles pour sa trilogie Eco entre autres. Son approche graphique trouve son inspiration dans la riche iconographie mortuaire mais aussi dans l'univers visuel du réalisateur Tim Burton. L'aspect des personnages est à la fois doux et quelque peu effrayant. La Mort bénéficie d'une esthétique intéressante, mise en valeur par les choix de composition des planches. Le dessinateur assure également la colorisation de l'album et renforce le ton souhaité par la scénariste.
Ce premier tome des Royaumes muets est une réussite. Ce joli conte empreint de gothique et de poésie ne laissera pas les lecteurs insensibles, quel que soit leur âge.
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