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raîchement échappé de son élevage, un jeune poulet se réfugie en ville afin de se cacher. À peu près ignorant des us et coutumes du lieu, il essaye de rester discret en adoptant les façons de faire des habitants de la cité. Avec la publicité omniprésente, il est facile de comprendre comment se comporter finalement. Seulement, il découvre que les images, les slogans et la joie de vivre institutionnalisés cachent un vide existentiel abyssal et destructeur. Arrivera-t-il à survivre sans perdre de plumes, ni son âme ?
Fable entre Candide et La ferme des animaux 2.0, Les tribulations d'un tendre poulet passe en revue et aligne les tares de la société actuelle (surconsommation, réseaux sociaux lobotomisants, transhumanisme, etc.) sur près de cent quarante pages, sans parvenir à rien de très concret, malheureusement. Vincent Bergier a méticuleusement fait ses devoirs en regardant des chaînes d’information en continu et a retenu tous les points importants de ce qui ne fonctionne pas ou marche... sur la tête dans le monde. Son catalogue d’abus globaux et de vacuité à tous les étages est donc bien rempli. Son héros traverse ces affres, en apprécie certaines, en fuit d’autres, fait des rencontres, trouve l’âme sœur et finit par s’endurcir et mieux maîtriser les règles de ce jeu qui n'en a pas.
Le côté conte initiatique du récit s’avère au point et les péripéties s’enchaînent promptement. Étonnement, séduction, colère, leçon et acceptation, le classique cycle de ce genre d’histoire est parfaitement respecté dans un cadre actualisé, chic et «hip». Par contre, tant le personnage principal que la mise en images manquent de profondeur et d’allant. Certes, il s’agit d’un poulet (métaphore simpliste et limitée dès le départ) qui se doit de courir à gauche et à droite en permanence. Résultat, sans réel caractère, il a peu d’emprise sur les évènements et reste spectateur de sa propre existence. Pas la meilleure approche qui soit quand il s’agit de prendre son destin en main. Colorés et lorgnant vers un style vaguement atome, les dessins ne dynamisent et n'habitent jamais le scénario. Le dessinateur tente bien de varier son découpage pour apporter du rythme, mais rien n’y fait. Le trait n’arrive jamais à «remplir», ni à faire vibrer les planches.
Les tribulations d'un tendre poulet est pétri de bonnes intentions, c’est indéniable. Dans le même temps, le propos général a déjà été vu et lu mille fois et des illustrations peu abouties peinent à rendre cette odyssée véritablement prenante et marquante.
C'est un récit décalé.
Une manière d'envisager le futur dystopique avec humour.
A. Perroud n'a pas compris ce livre qui ne correspond pas à sa vision étriquée de la bande dessinée.