L
e château de Castellet a un destin mouvementé. Situé en Catalogne, sur une zone frontalière, entre le comté barcelonais et le domaine du monastère Sant Cugat, il change fréquemment de mains et d’usage, tantôt forteresse défensive, tantôt étape de repos pour voyageurs. Qui plus est, il est implanté à proximité d’une zone régulièrement dévastée par les Sarrasins. Aussi, par une belle journée de l’an 1107, la consécration de l’église fraîchement construite a plusieurs objectifs : apaiser les relations entre les voisins turbulents et donner au domaine un prestige sans pareil grâce au dépôt d’une relique inestimable, un morceau de la croix qui supporta le Christ. Pendant que l’évêque Ramon Guillem, le Prévôt Ramon Guitart et Dame Jordana, propriétaire des lieux, préparent la cérémonie, le jeune seigneur du château, Jordà de Sant Morti, âgé de onze ans, chasse, en compagnie de ses deux mentors et protecteurs, Aribert et Bertran. La petite troupe est entrée involontairement sur les terres voisines et Aribert tue l’épervier du fauconnier des lieux. Au moment où se décide le sort du fautif, une corne retentit : les troupes sarrasines sont de retour pour piller et enlever quelques paysans, qu’ils vendront ensuite comme esclaves.
Oriol Garcia Quera est spécialisé dans la bande dessinée historique, ayant pour cadre sa Catalogne natale. Il a publié en 2022 Sorcières. 1617, l’année du déluge !, également aux Éditions Idées Plus. Au travers d’un récit étroitement localisé, l’auteur met en scène les tensions politiques qui ont traversé, malmené et structuré le Moyen Âge occidental. Entre luttes de territoires, convoitises de ressources naturelles ou agricoles, querelles entre l’Église et les hobereaux locaux, des populations ont plié sous le joug du plus fort et des constructions ont servi les intérêts de chacun. Les ruines architecturales sont – parfois - toujours visibles ; hommes et femmes, par contre, ont disparu. Oriol Garcia Quera en fait revivre une poignée par le biais de cette intrigue bien menée.
Son graphisme, classique et efficace, fait le choix de la précision historique. Le travail de documentation préalable semble rigoureux et facilite l’immersion dans un monde distant de presque mille ans, en évitant les clichés du genre. La mise en couleurs est particulièrement remarquable. Le Seigneur de Castellet est un album modeste, authentique et attachant. Il lui manque un souffle épique et une épaisseur des personnages pour plaire aux lecteurs les plus exigeants du genre. Il saura néanmoins séduire et instruire le plus jeune public sans difficulté.
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