L
es prêtresses Guérisseuses ont pris possession de Eelbaar. Tandis que Gasgar est désormais leur prisonnière, Brumel, sa fille aînée, cherche un appui dans les contrées alentours. Épaulée par Pontus, le fidèle ami de son père disparu, elle ne sait pas encore comment mais elle est convaincue qu'elle reviendra dans son royaume en conquérante et libérera son peuple.
Deux ans après le succès de Mégafauna (prix talent BD Cultura 2021, prix BD RTL du mois de mars 2021 et sélection pour le FIBD d'Angoulême en 2022), Nicolas Puzenat invite à replonger dans son uchronie moyenâgeuse. Si l'auteur pouvait ressentir une certaine pression, il la surmonte en proposant un prolongement ambitieux. Suite immédiate du premier opus, ce volume en reprend les principaux aspects : les complots politiques sont une nouvelle fois le moteur d'une trame où les différentes civilisations se croisent. Toutefois, l'artiste ne fait pas dans la redite en changeant notamment de protagonistes. Pontus, le fidèle compagnon de Timoléon, devient le narrateur. Il accompagne la jeune Brumel chassée de son royaume par un coup d'Etat. Ensemble, ils embarquent le public sur les routes de nouvelles contrées. Cet exil est l'occasion d'apprécier l'étendue du monde imaginé par le scénariste, sa faune inspirée de la préhistoire, mais aussi ses décors.
Loin de proposer un périple pour le seul plaisir de la découverte, Nicolas Puzenat a encore concocté une intrigue pleine de rebondissements où alliances, retournements de vestes et autres trahisons sont légions. L'ensemble aurait pu s’avérer difficile à suivre mais son découpage rend la lecture facile. Les séquences s'enchaînent aisément et le suspense croît à mesure que les enjeux évoluent ou s'affirment. Son trait atypique, mais précis et clair, comme sa colorisation participent à cette fluidité. En même temps qu'il tisse ces intrigues de pouvoir, le scénariste développe ses personnages et se sert du journal tenu par Pontus pour donner le tempo et gérer les ellipses avec à-propos. Enfin, la fable ne serait pas complète si elle ne permettait pas de dresser des parallèles avec le monde qui nous entoure. Que ce soit pour le fanatisme religieux, la belligérance de nombreux protagonistes, la quête de pouvoir ou la soif de vengeance de certains d'entre eux, et bien sûr le rapport à la nature et aux animaux, le récit de Nicolas Puzenat fait formidablement écho à des préoccupations et dérives contemporaines.
Lorsqu'un album a rencontré le succès public et critique, il est toujours difficile de proposer une suite à la hauteur. Avec Le Livre des délices et des infortunes, Nicolas Puzenat y parvient haut la main. Dense, solide et bien mené, ce deuxième volume assoit un monde original et captivant en proposant une aventure qui étend encore l'univers de Mégafauna. Au point de penser qu'il serait inspiré d'y revenir encore...
Lire la preview et la chronique du tome 1.
Lire la preview du tome 2.
Je viens de lire les deux tomes à la suite et ne peux que vous encourager à en faire de même.
Beaucoup de qualités dans cette bd, un univers très cohérent, des personnages intéressants, le dessin tout à fait correct qui s'étoffe dans le deuxième volume , et le tout sans manichéisme.
J' aime bien aussi comment l'auteur aborde l'animisme, et l'art pictural au travers du personnage nommé Krekl , ça me rejoint tout à fait .
Enfin tout ça est très fin et ça fait bien plaisir !
Nicolas Puzenat réinvente l’histoire européenne en pointant du doigt la prédation dévastatrice des homos sapiens et leurs soif d’or, tout en inventant une civilisation Néandertalienne plus en harmonie avec la nature, mais pas sans défaut. Après un one-shot primé, il relance et étoffe son univers dans un deuxième tome toujours dans une veine de fantasy uchronique où les créatures préhistoriques remplacent les nains, les dragons et autres trolls. Une histoire haletante dans un univers original et surprenant.
Excellente idée que d’avoir offert une suite à Mégafauna ! D’autant qu’entre les deux, le dessin – qui était le point faible du premier tome – s’est nettement amélioré. Il est beaucoup plus fin, dynamique et varié.
Mais c’est encore une fois au niveau de l’écriture que l’alchimie opère véritablement. Nicolas Puzenas a concocté une excellente histoire, particulièrement aboutie. L’univers est toujours aussi original et les nombreux développements réservent moult rebondissements. Le récit est dense, cohérent, bien mené et déborde de bonnes idées scénaristiques, dont certaines sont d’ailleurs sous-exploitées au regard de leur potentiel. Intelligent, humaniste, il s’enrichit en plus d’une dimension épique pleine de souffle, de profondeur et d’émotion.
Un très bon album que je ne suis pas près d’oublier et qui forme avec son prédécesseur un diptyque extrêmement original. A noter, enfin, un bon travail d’édition de la part de Sarbacane. A lire absolument !