L
’existence de Gosse, un gamin de six-sept ans, est à la fois simple et palpitante. Il y a son univers, c’est-à-dire le coin de Drôme où il habite avec sa famille, le Rhône au fond du jardin, une carrière en haut de la colline, un village à trois kilomètres et, en face, de l’autre côté du fleuve, l’Ardèche, cette contrée étrange peuplée de gens pas comme ceux de chez lui. Ah oui, il y a aussi Floude, son chien. Ce qu’il aime le plus, c’est inventer des trucs et des machins, aider les gens et pas trop l’école.
Poésie, humour bon enfant et tendresse infinie, Lucas Méthé entraîne le lecteur dans un récit aussi contemplatif que tempétueux. Était-il seulement né du côté de Longeverne, Gosse ferait certainement partie de la bande à Lebrac et prendrait évidemment part à La Guerre des boutons. Ce n’est pas le cas, un peu solitaire, malgré de nombreux frères et sœurs, il n’a cesse d’explorer son territoire et ce cours d’eau si imprévisible qui le borde. Au fil de ses balades et d’imprudences, il fait la connaissance d’un autre enfant de son âge, Taigne. Il est sympa, mais c’est un Ardéchois, alors méfiance ! Fuyant un père indigne, ce dernier se révèle en fait être le compagnon idéal pour toujours plus d’aventures.
Trait fragile rappelant le tout début de la bande dessinée ou certains illustrateurs Jeunesse d’avant-guerre (celle de quatorze) et un saupoudrage délicat d’informations ethnographiques plus ou moins avérées immergent le lecteur au cœur d’un monde disparu. Pour autant, à l’instar de Bruno Heitz, l’auteur ne tombe pas dans la nostalgie ou le «c’était mieux avant». S’il décrit des usages perdus et des traditions devenues désuètes, c’est uniquement pour alimenter la curiosité et la bonhommie sans borne de son héros de trois pommes de haut. Véritable moteur de l’histoire, Gosse est doté d’un caractère solaire et d’un courage (une innocence diraient les chagrins) de tous les instants. Son livre est vierge et il a hâte de noircir toutes les pages.
Truculent, épique, voire picaresque, Gosse et les berges est illuminé par des dessins à l’aquarelle fins et délicieux. En partie hommage ou pastiche d’un pan de la littérature enfantine d’antan, l’ouvrage est avant tout une ode à l’envie de découvrir et à l’amitié. Une très belle surprise de la collection Les Ondines des éditions Dupuis.
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