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oyaume du Kongo, XVIIe siècle. Nzinga, alias Pacotille, raconte son enfance à sa petite fille. Elle était encore une gamine quand elle a été capturée par des marchands d’esclaves portugais. Après une pénible traversée de l’Atlantique, à fond de cale, marquée par le vol de la « cargaison » par des corsaires français, elle est vendue à un planteur de tabac martiniquais. La vie se révèle rude, la répression brutale… et la révolte gronde.
Éric Corbeyran et Aurélie Bambuck se mettent à hauteur d’enfant pour aborder un sujet dramatique. Certes, l’objectif est de dénoncer ce que l’homme peut faire à son semblable ; ils évitent cependant d’insister sur la violence. Quelques scènes choquantes sont présentées, mais les scénaristes soulignent surtout sur l’amitié, l’amour et la solidarité.
Tout n’est pas noir ou blanc dans cette histoire. Jean, un jeune caucasien se montre empathique, alors que certains noirs n’hésitent pas à trahir les leurs. La finalité de l’album n’est certainement pas d’antagoniser les peuples ; les auteurs souhaitent plutôt que tous se souviennent des erreurs passées et s’efforcent de ne pas les répéter.
Le projet est joliment mis en images par Olivier Berlion. L’artiste prend visiblement plaisir à dessiner les tropiques, de part et d’autre de l’océan. L’illustrateur se donne de l’espace et laisse respirer ses planches qui accueillent rarement plus de cinq ou six cases. Avec la complicité de Christian Favrelle aux couleurs, il propose un dessin lumineux, même si le propos est sombre.
Une bande dessinée remplie de bonnes intentions, aux visées didactiques évidentes.
Quel bel album ! Corbeyran, que je connais surtout pour ses séries sf, me surprends agréablement avec cet album plein d'humanité et de sensibilité. Son histoire est à la fois touchante et cruelle, on ne peut s'empêcher d'avoir de la peine pour cette pauvre Pacotille. Mais si le scénario m'a ébloui, le dessin m'a littéralement subjugué. Je connaissais déjà un peu le travail d'Olivier Berlion, pour ses séries plus orientées polar (Tony Corso, Agata), mais il apporte une douceur dans ses pages que je ne lui connaissais pas. Chaque page est plus belle que la précédente, d'ailleurs dès la couverture j'ai été séduit. Couverture qui résume bien l'atmosphère de l'album, qui offre un récit coloré, touchant, parfois cruel, terriblement humain. J'attends le prochain tome avec impatience, et je m'incline humblement devant le talent du duo d'auteurs qui a su livrer un si bon premier album.