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uelque part aux États-Unis, 1922. Parmi les attractions d’un cirque de passage, White Wolf, un chef Chippewa affirme être né en 1783. L’ancêtre, transformé en bête de foire, va bientôt mourir. Alors que les badauds le dévisagent, il se souvient de l’épopée des autochtones, depuis l’arrivée des Européens au XVIe siècle. Ont suivi une série d’affrontements, de traités inéquitables et de lois iniques. Bref, la fin justifie les moyens. Les Premières Nations se sont bien battues, c'était malheureusement peine perdue contre un adversaire plus fort, mieux organisé et armé. En seize nouvelles, Indians ! L’ombre noire de l’homme blanc raconte trois cents ans d’histoire américaine, ceux d’un génocide.
Les envahisseurs se sont montrés implacables ; cela, tout le monde le sait depuis longtemps. C’est tout le reste qui se révèle fascinant dans le projet de Tiburce Oger. Le scénariste dépeint des tribus rivales incapables de s’entendre pour faire face à l’ennemi commun. En conflit depuis la nuit des temps, elles apparaissent belliqueuses et brutales. Les guerriers torturent les prisonniers et en réduisent d’autres à l’esclavage. Et que dire de cet oncle offrant sa nièce au combattant s'illustrant le mieux dans une joute de lacrosse ? Ou de ces Cherokees recrutés pour chasser les fugitifs noirs ? Pour tout dire, le mythe du bon Indien est déboulonné. Ça demande un certain cran.
Sans être indulgent avec les Occidentaux, l’auteur rappelle néanmoins que Samuel de Champlain souhaitait créer une race mixte et qu'il y a eu des unions donnant naissance à des métis. Cela dit, le passif des Blancs demeure le plus lourd. Et de beaucoup.
Malgré la multiplicité des récits, une belle unité se dégage de ce projet. L’esprit du lecteur vagabonde au rythme de celui du vieillard. Ce dernier, guidé par un aigle, voit défiler sa légende et celle des siens. Les souvenirs paraissent disparates et il n’y a pas de réel fil conducteur. Les segments s’enchainent du reste harmonieusement, même si, chaque fois, l’époque, le lieu et les personnages sont différents. Peu d’ouvrages collectifs parviennent à afficher une telle unité.
Les chapitres ont tous été confiés à des dessinateurs ayant déjà fréquenté les plaines des États-Unis. Toutes les générations sont convoquées à cette assemblée où les anciens, Michel Blanc-Dumont (La jeunesse de Blueberry) et Dérib (Yakari) côtoient Laurent Astier (La venin) et Paul Gastine (Jusqu’au dernier). Certes, chacun a sa patte, mais comme tous adoptent un style réaliste, il n'y a pas de ruptures marquées d’une partie à l’autre, et c’est apprécié. La mise en couleur est moins uniforme, notamment les teintes acidulées de Dominique Bertail et les pastels de Jef, lesquels détonnent un peu.
Au final, Indians ! fait le procès de tous les hommes. Les femmes sont du reste peu présentes dans cet album ; laissons tout de même le mot de la fin à Feuilles qui naissent : « Les hommes tuent les grands aigles… Les peuples tuent les peuples… Pourtant nous, les mères, les louves, les biches, nous voulons seulement aimer… ».
Merci à vous messieurs de rendre hommage à un magnifique peuple qui a été massacré par les visages pales et les visages sombres unis dans la haine du peau rouge.
On ne présente plus Tiburce Oger qui a fait des incursions pour le moins très intéressante dans le monde du western. C'est le second projet après le très réussi Go West young man.
Il va proposer à d'autres artistes de se joindre à lui pour raconter des séquences sur l'histoire du peuple indien. Il y en aura 16 en tout sur une période de 1540 à 1889 avec une incursion en 1922 avec la mort du célèbre chef indien Chippewa dans un spectacle ambulant à Londres.
On ne peut que déplorer le fait que cette civilisation qui existait depuis plus de 15.000 ans sur ce grand continent qu'est l'Amérique dans son ensemble. En 1492, Christophe Colomb découvre ce nouveau continent et il s'en suivra une colonisation pour le moins meurtrière qui va durer quatre siècles.
Les dernières peuplades feront face à l'homme blanc durant la fin du XIXème siècle avec l'issue malheureuse que l'on connaît. Il est vrai que les rivalités entre tribus n'ont pas contribué à un front uni qui aurait pu changer peut-être le cours de l'histoire. En 1892, il ne restait plus que 243.000 indiens (sur 14 millions au départ) et plus que 2 langues couramment parlé à savoir le sioux et le navajo sur 300 langues existants.
Bref, c'est toute la richesse d'un peuple qui a été balayé et que traduisent ces épisodes dont l'intérêt est variable. Je n'aime pas trop ces collectifs car il y a toujours du bon et du mauvais pour un résultat qui m’apparaît au final assez passable. En effet, le style graphique sera divers et variés.
A noter que cela s'appuie sur des faits réels ce qui constitue toujours un bon témoignage de ce qui s'est passé à savoir un véritable génocide. Or, il s’avère que les massacres des populations amérindiennes ne sont pas à ce jour officiellement recensés parmi les génocides identifiés par l’Organisation des Nations Unies. J'en suis fort indigné.
Pour conclure, j'avoue au final avoir nettement préféré son « Go West young man » qui m'apparaissait comme plus original et abouti dans sa construction d'ensemble. Ceci dit, ce titre n'en demeure pas moins assez intéressant sur ce sujet.
Succession de scénettes décrivant, sans concession, la vies des différentes tribus indiennes, leurs luttes internes, l'annexion de leurs territoires et leur "américanisation".
Ma déception vient du fait qui'l n'y a pas de fil conducteur (comme par exemple dans "Go west young man"), que certains discours font "cliché" et que l'intérêt de plusieurs scénettes reste relatif avec parfois des scénarios difficiles à suivre.
Egalement, alors que dans "Go west young man" la multiplicité des dessinateurs apporte un plus à l'histoire, ici elle dessert le projet tant les différences sont flagrantes.
Et tout cela pour presque 20euros. A oublier!
Après le succès de 'Go West Young Man', Tiburce Oger nous revient avec un nouveau recueil cadavre exquis dessiné par plusieurs grand noms de la profession. Cette fois-ci, l'exercice sera davantage centré sur la culture amérindienne et son extinction avec l'arrivée des colons européens et la conquête de l'Ouest.
Chaque histoire met en scène une tribu différente avec une histoire se déroulant sur plusieurs heures, jours voire années. Le fil d'Ariane entre chaque récit correspond à chaque fois à un personnage qui va revenir. Ici les Blancs ont majoritairement et malheureusement le mauvais rôle, heureusement il y a de la nuance et des exceptions bien amenées en terme d'écriture.
Chaque lecteur aura ses préférences graphiques et techniques suivant l'auteur concerné. Pour ma part, c'est toujours autant un régal, la qualité est au rendez-vous et je ne peux qu'en recommander la lecture.