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printemps 1966, Indianapolis accueille la course annuelle des 500 Miles, une des plus prestigieuses au monde. Quatre semaines de compétition attendent les pilotes. Les plus grands sont présents, comme Mario Andretti, Dan Gurnay ou Tim Clark. Sont également de la partie Michel Vaillant et Steve Warson, coachés par le frère ainé du premier. La pluie est présente et bouleverse les essais. Alors qu’ils se détendent dans un bar, Michel et Steve assistent à l’enlèvement d’une jeune femme et interviennent. Après un échange de quelques coups, un policier apparaît. Les principaux protagonistes minimisent l’incident, à la surprise des deux compères, et les agresseurs s’esquivent tranquillement. Rhona raconte son histoire, sa fugue du foyer parental à 16 ans avec Giordano, la vie de bohême, la fréquentation de bandes criminelles, le changement de comportement de son amant, la violence qui s’installe et prend de plus en plus de place. Alors elle s’enfuit, d’où la tentative musclée de la récupérer. Attendris, Michel et Steve décident de l’embaucher comme chronométreuse. Mais Giordano ne lâche pas l’affaire et menace son ex, l’accusant de surcroît d’avoir dérobé un livre qui ne doit pas tomber entre toutes les mains.
Michel Vaillant est apparu dans Le Journal de Tintin en 1957, créé par Jean Graton (1923-2021). La première série totalise soixante-dix albums, publiés de 1959 à 2007. Pour la nouvelle saison, le créateur va s’entourer d’une nouvelle équipe. Onze aventures ont paru à ce jour. Légendes est une nouvelle collection qui a pour objectif de proposer des intrigues ayant pour décor des rendez-vous célèbres, en remontant le temps et s’insérant dans les épisodes de la saga historique. Dans l’enfer d’Indianapolis ouvre le bal. Aux commandes se trouvent Denis Lapière (Luka, La Clé du mystère) au scénario, ainsi que Vincent Dutreuil (Ada Enigma) au dessin. Malgré le thriller mis en place, le circuit et les roadsters ne sont jamais bien loin. Le cahier des charges se devine facilement. Les personnages principaux sont des sportifs avant d’être des aventuriers, des compétiteurs avant d’être des justiciers. L’intrigue prétexte se fait sentir, au profit des frissons de la vélocité et de la dimension historique d’une édition mythique. Elle n’en est pas pour autant maladroite.
Néanmoins, les meilleures planches restent celles qui se déroulent sur le bitume : l’importance des tours préliminaires, les considérations techniques, le temps de changement des pneumatiques ou de remplissage du réservoir. Le frisson se ressent surtout lorsque Dutreuil adopte le point de vue subjectif du pilote, dans la gestion des virages, le dosage des accélérations, la maîtrise des freinages ou la vigilance au vent. La tension, le stress et la détermination à gagner jaillissent des pages en une dynamique simultanée des images et des voix off. L’un des apports majeurs de Graton au neuvième art est la mise en cases du mouvement et de la vitesse, une gageure pour un art graphique. Dans l’enfer d’Indianapolis est un digne héritier de la démarche. À ce titre, il sera surtout conseillé aux inconditionnels. Les autres pourraient rester sur leur faim.
Il faut saluer la tentative réussie. Revenir sur les origines et les fondamentaux de la série classique. Le scénario a tendance à laisser la course au second plan au profit d'une intrigue policière. Par contre une note de 3 car les dessins ne sont pas encore à la hauteur. Surtout les visages qui donnent l'impression d'être en carton et l'ensemble des dessins est un peu figé. N'est pas Graton qui veut. Mais un 3 pour encourager Duteuil à persévérer.