S
cène de guerre.
Un immeuble éventré par une explosion.
Derrière un muret, un combattant n’en peut plus. Il fuit, hors d’haleine. Il doit s’échapper. Arrivé dans la ville voisine, en quelques tractations et après que quelques billets aient changé de main, il est dirigé vers un bus, et, avec d’autres infortunés, entame la longue route de l’exil.
Avec ce nouveau titre, Nicolas Presl étonne une fois encore par sa maestria et sa force narrative. Il met en place un univers qui ressemble aux autres pour provoquer une forme d’identification, mais suffisamment différent pour ne pas tomber dans le piège de la littéralité. Son récit n’en est que plus universel.
De ce long chemin semé d’embuches, il expose les mensonges, les trahisons, les profiteurs de la misère, la violence endémique et la difficulté de ne pas sombrer soi-même dans l’horreur. Le couple qu’il met en scène tente de perpétuer un semblant de normalité, mais se heurte à la duplicité du monde. Si la première partie est quasiment documentaire dans son déroulement, le récit prend ensuite un tour plus symbolique. Jouant habilement du mélange des genres, le scénario glisse progressivement vers une fable tragique. Puis, il y a ses fantômes qui surgissent au détour d’un rêve ou d’une vision. Ils ont des gueules de mercenaires, de moudjahidines, de miliciens tombés pour une cause ou une autre. Ils trainent une dégaine de vaincus, collés aux basques de ceux qui tentent d'échapper à la misère. Autant dire que cela semble bien mal engagé.
Une fois de plus, l’auteur réussit le tour de force de mener une intrigue complexe sans un mot, mais pas sans un bruit. Ses pages bruissent de vie, de musique, du brouhaha d’une cité en pleine effervescente ou des détonations qui fauchent les innocents. Du grand art, une fois de plus.
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