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’amour, c’est à la fois facile et compliqué. A aime B, B aime A, ils se donnent un rendez-vous dans un hôtel chic afin de fêter ça. Rien de très nouveau pour Cupidon. Seulement, B arrive de la gauche et A est tout là-bas, à droite. Il ne faudrait pas qu’ils se ratent à cause d’une histoire de Peaux-Rouges mal lunés ou de taxi égaré dans les faubourgs. Pfff, après vingt ans de vie commune, qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour ne pas tomber dans la routine.
Romance, c’est ainsi que Blutch décrit La mer à boire. Veut-il rassurer le lecteur face à cet étrange récit oscillant entre auto-fiction, onirisme et psychanalyse ? Ou simplement, avait-il besoin de baliser dès le départ un travail intérieur mettant en scène son intimité et son moi le plus profond ? La question se pose vraiment tant la narration se montre déconcertante et rocambolesque. Pour autant, les connaisseurs de l’auteur du Petit Christian se retrouvent quasi-immédiatement en terre connue. Rappels des jeux de l’enfance, multitude de clins d’œil aux lectures et aux œuvres marquantes qui ont jalonné son parcours et, cela va sans le dire, une maestria graphique aussi plaisante qu’innovante. Si les pourquoi et les comment sont nombreux, les planches apportent moult branches rassurantes auxquelles se raccrocher.
Après une poignée de pages nécessaires pour jauger le ton virevoltant de la proposition et placer son esprit sur la bonne longueur d’onde, le feuilletage devient une véritable partie de plaisir. Les idées sautillent de l’une à l’autre, passent des ravins, évitent les flèches des Indiens, avant de traverser un jardin-jungle digne de celui du parc du château de Champignac. Dans le même temps, il s’agit d’un conte adulte – quoi que plus sérieux que l’amour ? -, les allusions et les réflexions sont nombreuses, parfois sibyllines mais, au final, toujours enrichissantes.
Album-surprise rappelant l’esprit de liberté et la profondeur d’un Fred ou d’un Jean-Claude Forest, doté d’une mise en images aussi inventive que fluide, La mer à boire est beaucoup plus que la romance annoncée. Roman graphique ? Livre intimiste ? Surtout de l’excellente et intrigante BD.
Là, par contre, je déchante.
Blutch sait-il faire autre chose que de parler de lui même? Encore? Et nous ressasser toujours les mêmes scènes? Son "délire" est-il si stagnant qu'il se le rejoue en boucle et qu'il n'est pas capable de dessiner autre chose?
Ouais, ouais, on comprend, rien ne sert de chercher à revivre son passé. Mais ce genre de scénario prétentieux devient lourd. Et si j'ai beaucoup aimé Lune l'envers, du même auteur, j'ai absolument détesté cet album. D'ailleurs, mister Blutch, ta citation sur le paradis et l'enfer, tu nous l'as déjà faite avant! Tout comme "La Volupté" et "Pour en finir avec le cinéma" partageaient aussi des scènes!
Le scénario est pompeux? Absolument! C'est quoi cette histoire de dessinateurs, d'ailleurs? Déjà, dans Lune L'envers, il critiquait l'abandon des techniques classiques. Et là, dans La Mer à boire, nous avons cette perle : "Navré. Nous n'avons pas vu de dessinateur en Belgique..." Ah, bon, d'accord. Tu es le seul véritable dessinateur qui demeure, Blutch. Il n'y a que toi qui sois vrai. Voilà.
N'importe quoi. Pourtant, je sais que Blutch peut frôler le génie. Mais un peu comme David Lynch, si on ne le dirige pas, qui sait ce qu'on va retrouver à la fin? J'ai adoré le Donjon de Blutch, mais ça ne venait pas de lui au départ. J'ai adoré le Lucky Luke de Blutch, mais le personnage ne venait pas de lui au départ. Mais là, mis à part pour Lune L'envers (déjà difficile à la lecture), les BDs de Blutch sont des cryptes insondables.
Des cryptes en partie recyclées.
C'est typiquement le genre de "BD d'auteur" que je ne supporte pas. Certes, le dessin élastique de Blutch a un certain charme, mais le scénario est bien trop pompeux, bien trop snob et tellement absurde que je n'ai pas réussi à accrocher. L'album plaira certainement aux bobos de la capitale et à une certaine intelligentsia parisienne, mais pour ma part la lecture m'a profondément ennuyé et cet album ne m'a absolument pas touché, malgré le talent graphique de Blutch.
Ce livre ne ressemble à aucun autre. Il y a certes une histoire ou plutôt un récit. C'est celui d'un amour, d'une recherche croisée de l'autre. Cela se passe dans un hôtel au bord de la mer à Bruxelles! Vont-ils se rencontrer oui et non car il s'agit aussi d'un voyage dans le temps. En effet sont-ils dans la même époque? Rêvent-ils ou pas?
Quand on a fini le livre , il faut le recommencer et on redécouvre que le début est peut être à la fin. D'ailleurs la mise en page commence sans page de garde comme si on entrait au milieu de l'histoire.
Plus on relit ce livre plus on y prend du plaisir, c'est un peu comme toute ces grandes œuvres, musique, peintures ou à chaque fois on se rend compte qu'un détail essentiel nous avait échappé.
Je ne sais pas pourquoi, peut être les scènes de western, m'ont fait penser au film de Marco Ferreri "Touche pas à la femme blanche". Film pour lequel l'affiche avait été faite par J. Giraud.
Le dessin de Blutch est somptueux et d'une très grande expression, le choix des teintes roses et bleues est totalement adapté.
Passé les premières pages, c'est une BD hypnotique. A laisser dans la bibliothèque en bonne place pour la retrouver aisément.