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n s'assoit tranquillement dans un large canapé, après avoir dîné rapidement d'un quelconque plat préparé, un peu gêné d'attaquer un album appelé Le Gourmet Solitaire avec ce genre de nourriture dans l'estomac. Une légère somnolence, provoquée par le début de la digestion, engourdit les membres et le cerveau. On se cale confortablement contre le dossier, on teste plusieurs positions de jambes, croisées, repliées, en l'air...
Puis on attaque. Ah, une introduction du traducteur...
Et puis tout de suite on se jette dans l'histoire, dans le quotidien de cet importateur de produits de mode qui, de déjeuner solitaire en dîner en face à face avec lui même, nous dévoile le bonheur qu'il y a à prendre son temps, à se laisser porter par ses sensations sans chercher à les dominer.
Il ressort un grand calme de l'album, sans doute aidé par le dessin simplissime et pourtant si évocateur de Taniguchi, qui croque en trois traits une émotion, un souvenir, une passion. L'écriture de Masayuki Kusumi est rythmée, lente, on pourrait même dire chaloupée. Elle happe le lecteur dans un tourbillon de râmens et de chagrins d'amour, de nouilles sautées et de ciel bleu. On s'attarde sur les visages, les expressions, les histoires des divers personnages, on essaye d'entrer dans les petits restaurants, de changer les yens en euros. On rentre dans l'album, en fait, alors qu'on avait peut-être craint de s'ennuyer : la succession des repas de midi d'un homme d'affaires, ce n 'est pas forcément palpitant.
Et puis on tourne la dernière planche, on survole rapidement la nouvelle qui clôt l'histoire, on ferme l'album... Et si on a de la chance, s'il est encore une heure avouable, on fonce vers le premier restaurant japonais parce qu'on a faim !
Un plongeon dans la culture culinaire japonais et dans la recherche du petit restaurant de quartier...
On tourne les pages au fil des différentes rencontres de ce gourmet promeneur et les expériences sont identiques et différentes, mais toujours empruntes de cette douceur qui nous charme. Dommage que l'on ne puisse goûter, et aussi je pense qu'une partie de l'expérience nous est étrangère tant, nous autres français, sommes loin des saveurs et culture décrites. C'est la part frustrante de la BD.
Mais le dessin en N&B est toujours aussi méticuleux, précis et beau.
Chaque chapitre nous fait découvrir un restaurant, un plat et des saveurs authentiques du Japon. Le scénario est simple et étonnamment suggestif. On a l’impression d’accompagner le héros dans sa quête du lieu adéquat pour son déjeuner, d’hésiter devant la carte, de faire notre choix, et de goûter les différents plats. Les saveurs font remonter de vieux souvenirs, lui rappellent des rencontres. Ce récit est moins anodin qu’il y paraît, on a tous des madeleines de Proust. On se laisse porter et on découvre une gastronomie, une culture. Au-delà d’une déambulation gastronomique, on se ballade dans une ville, ses quartiers, l’intérieur des petits restaurants aux ambiances différentes. Du très bon Tanigushi !
Le gourmet solitaire, c’est pour les inconditionnels du Taniguchi expert en tranche de vie. Si vous n’aimez pas le Taniguchi scénariste de l’Orme du Caucase, de Furari ou de Terre de rêves, sachez qu’il ne se passe strictement rien. Au mois l’arpenteur de Furari arpente-t-il. Ici, hormis le patron un brin facho qui arrive à faire sortir notre gourmet de ses gongs et ceci pendant l’équivalant d’une demi page, il faut savoir qu’il y a autant d’action dans le reste du bouquin que sur la couverture (c’est dire !!!).
Oui mais voilà, je suis inconditionnel du Taniguchi expert en tranche de vie et j’aime quand il pousse cela à l’extrême limite. J’irai même jusqu’à dire l’extrême limite du supportable car je dois l’avouer, j’ai lu plus vite les 5 tomes du Sommet des Dieux que le Gourmet solitaire.
Personnelement j’en relis un chapitre de temps à autre, cela donne envie d’aller au resto et aussi d’aller au Japon.
Tout le talent de Taniguchi pour décrire les petits restaurants japonais et les plats qu'on y sert, et c'est vrai que ça donne envie d'essayer. Mais c'est quand même à déguster par petit morceau si on ne veut pas risquer l'indigestion. Car au total il ne se passe pas grand chose et on est frustré de ne pas en savoir plus sur noter personnage et ses rencontres actuelles ou passées.
A ne lire que dans un état d'esprit adapté, c'est à dire pas trop stressé et prêt à une ballade contemplative sans autre objet que la découverte d'un aspect de la vie japonaise.
C'est une bonne B.D. très contemplative sur la bouffe. Et c'est vrai, qu'il donne envie de déguster les plats, de se poser à l'aise dans un estaminet et de voir les gens vivre leur repas.
Je m'étais beaucoup interrogée en le feuilletant à 2 ou 3 reprises. J'avais peur d'être déçue, de trouver celà banal et redondant. Mais j'ai goûté avec plaisir chaque chapitre et chaque plat.
Kusumi Masayuki nous invite à une promenade à travers la cuisine japonaise autant qu'à une dégustation gourmande et fine de celle-ci. Non seulement, il nous offre un bel et intéressant aperçu de l'univers culinaire nippon, mais encore il nous invite à un moment de joie paisible et de délectation simple mais jouisive. Les commentaires du gourmet solitaire sont précieux et comme le reflet de nos propres plaisirs, déconvenues, ou surprises gustatives. Il sait donner au quotidien et au repas une dimension presque épique, du moins poétique et épicurienne.
Le dessin de Jiro Taniguchi porte merveilleusement ce récit gastronomique et les détails portés aux plats en gros plans font rêver les papilles gustatives du lecteur.
Cette tranquille promenade n'est pas sans rappeler celle si philosphique et poétique de "l'Homme qui marche".