J
oe parcourt le désert au volant de son camping-car lorsqu'il tombe sur un drôle de chien. À des kilomètres de là, un homme regarde un coucher de soleil sur une plage californienne avant de se faire descendre par deux tueurs à gages. Dans les bureaux du FBI c'est l'effervescence : le procès des pontes de la mafia new-yorkaise approche à grand pas et le principal témoin, Giuseppe Barella est introuvable. Et si ces trois histoire étaient toutes liées ?
Scénariste aussi prolifique qu'éclectique, Matz (Le Tueur, Julio Popper : Le dernier roi de Terre de Feu, Vie Volées, Le Tatoueur) fait à nouveau équipe avec Philippe Xavier (ils œuvrent ensemble sur la série Tango) pour Le Serpent et le Coyote qui paraît dans la collection Signé. Le duo, complété par Jérôme Maffre aux couleurs, compose une histoire dense : celle d'un gangster repenti qui cherche à sauver sa peau tandis que ses ex-associés font tout pour l'empêcher de venir témoigner. En allant puiser son inspiration du côté de Joseph Valachi, de la French Connection et de la naissance du WitSec (le programme fédéral américain de protection des témoins), le scénariste propose une intrigue documentée, prenante et menée efficacement. S'appuyant sur une narration à la première personne, en voix off, qu'il affectionne, Matz plonge son lectorat au plus près de son personnage principal. En plus de créer une proximité avec un homme peu recommandable, ce choix permet de revivre son ascension de l'intérieur, via ses souvenirs, tout en balayant une certaine partie de l'histoire de la pègre outre-Atlantique. Un cadre accrocheur.
Grâce à la mise en scène sobre mais efficace de son complice, dont la longue séquence d'ouverture muette est un modèle du genre, les lectrices et lecteurs sont rapidement plongés dans l'ambiance. Oscillant entre de superbes paysages désertiques et des scènes cloisonnées, la trame s'étoffe rapidement. D'un côté la fuite de Joe-Guiseppe, de l'autre les besoins du FBI. D'une part, les rencontres plus ou moins fortuites et les pièges, de l'autre les briefings de plus en plus stressés à mesure que la date de l'audience approche. Évidemment qui dit récit noir dit violence. Si elle est bien présente, les auteurs préfèrent la suggérer que trop la montrer. L'objectif est atteint, la tension monte crescendo sans étouffer ni noyer sous de grandes effusions de sang. Malgré ces actes, Joe se révèle moins froid et détestable que prévu grâce notamment à des personnages secondaires bien construits qui permettent de développer davantage sa personnalité. De plus, l'idée du chien-coyote comme compagnon de voyage permet de placer des monologues et autres récitatifs de manière habile et leur portée s'en trouve accentuée.
S'il semble à première vue classique, Le Serpent et le coyote est un véritable polar noir très bien narré. Un copieux one-shot qui ravira au-delà des seuls fans des auteurs ou amateurs du genre et s'avère une des bonnes surprises de cette rentrée
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