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aris, 1843. Un mystérieux aristocrate polonais, le Comte Skarbek, débarque à Paris avec la ferme intention de nuire au marchand d’art Northbrook. Plusieurs artistes doivent la célébrité à ce Northbrook : parmi eux, Louis Paulus, jeune peintre surnommé "Les Mains d'Or'' et trop tôt disparu, dont il affirme détenir toutes les toiles et pour lesquelles il a signé un accord de vente exclusif avec les industriels Courselle et Maussard. Le Comte va alors prouver à ces derniers qu’il n’en est rien car il détient lui-même 227 toiles inédites du jeune peintre. A l’instigation du Comte, Courselle et Maussard intente un procès à Northbrook. Ce procès sera pour Skarbek l’occasion de régler bien des comptes…
Si ce résumé vous évoque une histoire semblable où un certain Edmond Dantès, sous les traits du Comte de Monte-Cristo, débarque à Paris pour se venger des Danglard, Mondego ou Villefort, on ne pourrait que vous donner raison car les auteurs se sont vraisemblablement inspirés du célèbre roman d’Alexandre Dumas. Les auteurs nous livrent un récit très dense axé sur une seule action principale (le procès) à travers lequel le Comte Skarbek délivre petit à petit et de manière machiavélique les éléments de son passé qui l’ont amené à organiser cette action judiciare. Son plaidoyer est aussi l’occasion pour les auteurs de peindre sans complaisance les mœurs des classes dirigeantes et l’hypocrisie générale de la société de la première moitié du 19ème siècle : les personnages véhiculant dans le récit (y compris le personnage principal, aveuglé par sa soif de vengeance) n’échappent pas à cette critique sans appel. Le scénariste Yves Sente a réussi, tout en gardant les ficelles principales du récit de Dumas, à écrire un récit original, palpitant et agrémenté de riches personnalités.
Quant au dessin, attendez-vous tout simplement à recevoir un claque car Rosinski, le vrai, l’unique, est de retour. Si l’on prétendait, à la lumière des derniers Thorgal, que Rosinski avait perdu son talent, « La Vengeance du Comte Skarbek » tend à prouver le contraire : Rosinski reste un des grand maîtres actuels de la bande dessinée. Son style inimitable, qui fait plus penser à une aquarelle qu’à un dessin de bandes dessinées, sert admirablement le récit en jouant à merveille sur les couleurs et sur les contrastes. Un pur chef d’œuvre qui rappellera à d’aucuns les meilleurs Thorgal ou alors l'inoubliable "Grand Pouvoir du Chninkel".
Cette œuvre à donc tout pour séduire : un récit haletant et prenant, servit par un graphisme magnifique. On en redemande.
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