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ean-Jean vit à Paris avec sa maman et ses deux sœurs, Marie la littéraire et Béné la chimiste en herbe. « La Mère » a une jambe de bois et un caractère bien trempé. Toujours une cigarette à la bouche, elle mène à la baguette sa petite troupe d’adolescents. En ce mois de mai 1968, les murs de Paris se couvrent de graffitis, les trottoirs d’ordures et la chaussée de manifestations. Les accès aux stations de métro sont obstrués, les camions militaires sillonnent la cité. « La Mère » attend une action forte de De Gaulle, qui ne vient pas. Pire, le Général disparaît. C’en est trop et notre héroïne emmène sa famille au fin fond du Beaujolais, dans une demeure de vacances nichée au cœur des coteaux.
Une autre vie commence. Jean-Jean s’ennuie. Ses copains sont à l’école. Il découvre la campagne environnante et fouille la maison. C’est de cette manière qu’il tombe sur la carte d’identité de sa génitrice, qui ne porte pas ses nom et prénom habituels. Il découvre aussi un pistolet et un message mystérieux sur une carte. Qui est vraiment « la Mère » ?
Avec Ce Garçon, le touche-à-tout Maby (avocat, romancier, réalisateur) signe sa première contribution pour le neuvième art et fait preuve d’une redoutable maturité. Même s’il reste de facture classique, son récit est mené de main de maître et ne cède à aucune facilité. Entre investigation et tendresse, d’Haïti au Beaujolais, de la Seconde Guerre mondiale à mai 1968, les personnages tracent leur route et vivent leur destin avec détermination.
C’est à Valentin Maréchal qu’a été confié le dessin. Ce dernier, après quelques expériences professionnelles éloignées de la bande dessinée, se lance dans une nouvelle carrière avec le présent album. Là encore, force est de reconnaître que le talent est au rendez-vous. La bouille de Jean-Jean, avec sa touffe capillaire démesurée est irrésistible, comme le regard sombre de la Mère ou la sérénité d’Herman. Le trait est sobre et efficace. La colorisation, tout en douceur, nimbe l’album d’une atmosphère accueillante et rend la lecture inévitablement plaisante.
Avec un zeste d’humour, un regard acéré sur certains traits de la vie de province, des personnages attachants et une intrigue prenante, le travail de ces nouveaux venus impressionne et force le respect. Jungle, « l’éditeur de bonne humeur », ne se moque pas de ses lecteurs.
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