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Cortés 1. La guerre aux deux visages

03/06/2022 3100 visiteurs 6.0/10 (1 note)

E n 1492, un continent inconnu émerge au-delà de l’Atlantique. Alors enfant, Hernán Cortés est voué à y accomplir son destin deux décennies plus tard. Ayant traversé l’océan et devenu l’un des notables de Cuba, il pourrait vivre de ses rentes. Pourtant, la fièvre des prouesses militaires demeure, enflammée par les rumeurs : plus à l’Est, un vaste territoire recèle des richesses fabuleuses. Cortés décide alors de monter une expédition, mais se heurte aux hésitations du gouverneur Velázquez. Qu’à cela ne tienne ! Il partira quand même. En 1519, il accoste sur la côte mexicaine. Devant lui, l’attendent un empire redouté et son souverain vieillissant.

Dans un contexte de retour aux sources précoloniales, le Mexique avait commémoré en 2021 les cinq-cents ans de la chute de Tenochtitlán (l’actuel Mexico) qui marquait la fin de la domination des Aztèques et le début de la mainmise espagnole. Cet anniversaire peut expliquer la parution successive de plusieurs bandes dessinées mettant en scène les trois acteurs majeurs de cet événement (voir Le Rêve de la Malinche aux éditions de la Cerise et Celle qui parle, publié par Bambo). Parmi eux, le conquistador Hernán Cortés, né vers 1485, dans une famille de la petite noblesse castillane, fait son entrée dans la collection Explora chez Glénat.

La Guerre aux deux visages ouvre un diptyque très documenté, ainsi que le prouvent les nombreuses notes et le dossier de sept pages en fin d’album qui éclaire la réalité géopolitique – notamment européenne - de ce XVIe siècle naissant. Incontestablement, Christian Chavassieux, le scénariste et, entre autres, auteur de romans historiques, maîtrise son sujet. Il propose de suivre le parcours de son personnage, en parallèle de trajets menant à la chute de son antagoniste, l’empereur Moctezuma.

Si la jeunesse de l’Espagnol est expédiée en une planche et que ses premières armes outre-Atlantique sont rapidement évoquées, la mise sur pied de son expédition est, au contraire, plus détaillée et remise en perspective. Intérêts divergents, méfiance, recherche de la gloire, rapacité sont clairement exposés tant chez l’intéressé que chez ses adversaires. La personnalité intrépide de Cortés, sa capacité à anticiper et à rassembler des alliés, tout en imposant sa loi – parfois violemment - émergent clairement. Le récit met également en avant l’approche militaire opposée entre conquistadors et Amérindiens, sans passer sous silence les pratiques les plus sombres de chacun. L’alternance entre les points de vue de Cortés et de Moctezuma dynamise le récit et permet de mieux comprendre certains enjeux. Cela est d’autant plus utile que la situation se complexifie et que les informations prolifèrent au fil des pages.

Confiée à Cédric Fernadez, la partie graphique s’avère (Faucheurs de vent, Notre-Dame-de-Paris – La nuit du feu, Gravé dans le sable, Saint-Exupéry) et plonge le lecteur dans l’ambiance de cet épisode singulier qu’est la conquête d’une terre. Réaliste, le dessin est renforcé par la mise en couleurs assez lumineuse de Christian Clot. Le duo d’artistes offre de belles vues sur la forêt tropicale et les splendeurs de Tenochtitlán. La chaleur d’un brasier, les éclaboussures du sang, les silhouettes de pendus, les combats disproportionnés sont tous restitués avec soin et talent.

Maîtrisé et bien mené, ce premier tome de Cortés raconte une page d'histoire importante et fait la lumière sur un de ses personnages clés. À lire.

Par M. Natali
Moyenne des chroniqueurs
6.0

Informations sur l'album

Cortés
1. La guerre aux deux visages

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L'avis des visiteurs

    Saigneurdeguerre Le 11/05/2022 à 00:03:42

    Cuba. Janvier 1519.
    Cortés dispose de biens plus qu’honorables mais il imagine mal passer le restant de ses jours à Cuba. Il a soif de conquêtes. Il veut s’abreuver de richesses. Or, non loin de là s’étend une terre qui ne demande qu’à être conquise ! Oui, mais, le gouverneur de Cuba ne l’entend pas de cette oreille, malgré qu’il ait nommé Cortés lui-même. Il doit l’arrêter avant qu’il ne s’embarque avec ses hommes.
    Cortés compte s’emparer de ces terres au nom de son souverain, Charles Quint, qui en retour devrait le nommer gouverneur. Le conquistador sait qu’il devra envoyer des quantités d’or importantes à Charles Quint qui en a besoin pour convaincre les grands électeurs de le nommer à la tête du Saint-Empire.
    Mais Cortés n’a-t-il pas les yeux plus gros que le ventre ? Avec à peine 508 soldats et 16 chevaux, il prétend s’emparer de terres où sévissent des milliers de guerriers habitués à se battre ?

    Critique :

    Ce diptyque très bien documenté nous révèle deux points de vue : celui de l’Espagnol Cortés et celui de Moctezuma, l’empereur aztèque, un grand incompris celui-là ! Était-il un lâche comme aujourd’hui beaucoup de Mexicains se plaisent à le dépeindre ? Était-il paralysé par ses rêves et ses prédictions qui faisaient des nouveaux-venus, des dieux, les futurs maîtres du Mexique ? Voulait-il par une stratégie subtile découvrir les points faibles des Espagnols pour, le moment venu, dresser son peuple pour les chasser ?

    Amis adeptes des religions autochtones, ne lisez pas les lignes qui vont suivre, elles pourraient vous faire avaler vos grains de maïs de travers provoquant votre étouffement, vous arrachant prématurément à l’affection de votre bienaimé entourage !
    Quand les Espagnols, qui sont loin d’être des enfants de cœur, même dévoyés, découvrent les sacrifices humains perpétrés par centaines, suivis d’actes de cannibalisme, ils sont horrifiés. Bien sûr, d’aucuns justifieront ces meurtres rituels par le respect dû à leur religion, à leurs croyances qui nécessitent d’abreuver de sang humain la terre pour obtenir de bonnes récoltes, contenter les dieux pour éviter les calamités. Pas l’once d’un quelconque intérêt personnel… STOP ! Les Aztèques avaient des rites monstrueux, et c’est peut-être la seule chose de bien qu’aient fait les conquistadors, c’est d’y mettre un terme. Bien sûr, ils n’étaient pas là pour jouer les bienfaiteurs mais bien pour s’enrichir, en tuant si nécessaire.

    A la fin de l’album se trouve une riche documentation due à Christian Chavassieux qui nous éclaire sur le contexte de l’époque.
    C’est une bande dessinée très bavarde, ce qui ne manquera pas de lasser certains lecteurs qui se seraient bien passés de dialogues à caractère pédagogique. D’autres apprécieront une bande dessinée qui leur apportera énormément d’informations sur la conquête du Mexique par un homme sortant complètement de l’ordinaire.

    Les dessins de Cédric Fernandez sont d’excellent facture, fort bien mis en valeur par la mise en couleurs de Frank Perrot.