A
lger, le 13 mai 1958. S’enfonçant de plus en plus dans le chaos, l’Algérie est devenue ingouvernable par une Quatrième République totalement dépassée. Une poignée de pieds-noirs et de militaires décident de prendre les choses en main et tentent un coup de force. Constatant l’apathie et l’incohérence des réactions de Paris, celui-ci pourrait faire tache d’huile en Métropole anticipent même les putschistes. Face à la gravité des évènements, l’Élysée, en accord avec Matignon et l'Assemblée, ne voit qu’un seul moyen pour faire baisser la tension et ramener le calme : appeler le Général De Gaulle à la rescousse.
Moment-clef de l’histoire française contemporaine, le «putsch d’Alger» concentre et résume toutes les tensions socio-politiques de l’époque : décolonisation mal engagée, système gouvernemental essoré, doute et blocage généralisé. Alors que la société est désemparée par une modernité qui ne cesse de la prendre de vitesse, c’est ironiquement d’un ancien sorti de sa retraite que viendra la solution avec une Cinquième république toujours en place aujourd’hui. Pour raconter cet improbable retour des choses en évitant la leçon scolaire ou de morale, Nicolas Juncker et François Boucq ont opté pour une approche pas moins étonnante : la comédie potache.
L’art et la manière dynamitent le récit.
Tout en collant au plus près des faits avérés, l’ouvrage dépeint un état de confusion total qui déteint sur tous les protagonistes en présence. Dialogues dignes de Michel Audiard, mise en scène énergique rappelant les portes qui claquent du théâtre de boulevard ou les films satyriques de Jean Yanne et des personnages immédiatement reconnaissables, car caricaturés juste ce qu’il faut sans pour autant tomber dans le mauvais goût, les auteurs ont su trouver le ton et le rythme idéaux. Mieux encore, ils réussissent à maintenir leur savant jeu d’équilibriste entre humour pur et roman historique tout au long des cents et quelques pages que compte l’album.
Hilarante, énorme, incroyable par moments, mais jamais gratuite ou méchante, la narration ne s’essouffle pas un instant et offre un nombre de rebondissements ahurissants (l’intermède corse restera dans les mémoires). Certes, le scénario occulte évidemment les violences et s’autorise quelques raccourcis ici et là. Cependant, au-delà de la forme, Juncker et Boucq réussissent vraiment à retranscrire le désordre profond régnant dans une Nation semblant avoir perdu le mode d’emploi et une bonne partie de son sens commun.
Dessin et écriture à l’unisson, Un général, des généraux est une réussite à tous les points de vue et se pose d’ores et déjà comme étant une des meilleures lectures de l’année. À découvrir d’urgence.
Cette version audio de la chronique vous est proposée par BLYND.
L’année 1958...
Elle constitue une rupture historique en France, dont on ne parle pas si souvent en dehors des établissements scolaires : Charles de Gaulle, s’appuyant sur son capital sympathie et profitant des déboires d’Alger, est appelé au pouvoir. Il met ainsi en place une nouvelle république, dans un contexte particulièrement tendu (manifestations gigantesques contre sa prise de pouvoir, vrai-faux coup d’État à Alger puis en Corse...).
Ce sera la Vème République, rompant avec le parlementarisme de la précédente et instaurant un pouvoir exécutif fort, présidentialiste, afin de renouer avec la stabilité du gouvernement. Il s’agit maintenant de la république dans laquelle nous vivons...
Nicolas Juncker (scénario) et François Boucq (dessins) détaillent ainsi avec talent les événements qui ont conduit à la prise du pouvoir par De Gaulle : que ce soit dans la ville d’Alger, où les colons européens sont préoccupés par le sort de l’Algérie française et finissent par prendre d’assaut le bâtiment du Gouvernement Général... en appelant au général (pour la petite histoire, les généraux Challe, Jouhaud, Salan et Zeller entreprendront un autre putsch en 1961, ayant percuté que De Gaulle ne les avait pas si bien « compris » que ça...) ; mais aussi en métropole, où l’empire colonial français n’est plus à l’ordre du jour et où le nouveau président du conseil, Pierre Pflimlin, enchaîne les déconvenues...
Plutôt que de s’emmêler les pinceaux dans un roman graphique sans fin, les deux auteurs ont su faire simple, riant de ces situations cocasses, de ces hommes politiques hors-sol aux décisions ridicules (mais lourdes de conséquences) et de ces généraux droits dans leurs bottes, mais qui frôlent la sédition, la folie furieuse.
Si les scénarios de Juncker sont toujours très bons, les géniales caricatures de François Boucq ne sont pas en reste non plus (que j’ai ri avec sa série Moucherot d'ailleurs). On peut profiter pleinement de l’expressivité de son trait avec le tirage en grand format noir et blanc.
Si les auteurs utilisent ainsi l'humour avec brio, jouant du comique de répétition de ces généraux et autres ministres guignolesques, les tournant en ridicule, ils démontrent également qu'il peut être utilisé politiquement... Ainsi De Gaulle s'appuie sur un trait d'humour pour désamorcer sa prise de pouvoir : « Pourquoi voulez-vous qu’à 67 ans je commence une carrière de dictateur ? ». Une belle formule, mais qui ne peut faire oublier que le maréchal Pétain en avait 84 lorsqu’il mit fin à la République française... Comme le souligne l'un des personnages.
D’ailleurs, même le plus « débile » des généraux sait avoir de l’humour (je pense évidemment à Massu, responsable des tortures françaises en Algérie, lors d’un dialogue avec De Gaulle) :
« - Alors Massu, toujours aussi con ?
- Ah oui, toujours gaulliste, mon général ! »
Assez drôle également que cette BD, où les généraux prennent parfois un rôle de bouffon, ait été primé par le ministère des armées... Récompense refusée par Nicolas Juncker à l’époque.
Tragi-comique !
Un album que je ne regrette pas d'avoir acheter. J'ai adorée, et il y à certainement un fond de vérité dans cette histoire... hein ?
La version TT est extraordinaire. Époque que j'ai connu !
Dessin par un des grands de la BD de notre époque, u livre à posséder et à lire sans attendre.
Il y a bien plus qu'un fond de vérité dans cette histoire de la fin de la IV république. Le parti pris par les auteurs de raconter ces évènements sur le ton de la farce est très réussi. Ce qui est à craindre c'est que la réalité ait, en fait, été proche de cela. Une panique au sommet du pouvoir, une armée qui ne respecte pas les politiques avec des généraux qui croient pouvoir être les sauveurs et un général (en retrait) qui n'a pas vraiment de vision sur l'Algérie mais manipule pour arriver au pouvoir.
Si derrière les grandes phrases tout cela est petit et dangereux, cette BD elle est particulièrement réussie. Elle est instructive pour ceux qui ne connaissaient pas l'épisode de ce putsch français, elle est burlesque et le ton des personnages est un peu semblable à celui du Canard enchaîné de l'époque. Boucq au dessin quel talent! Bravo Juncker au scénario!
BD à acheter, offrir et à lire et relire pour découvrir certains épisodes des "30 glorieuses".
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Je sens que c'est vraiment bien. Cette BD est très significative cookie clicker
A peine terminée je me suis dit
"faut que je la relise cette BD" ce que m'arrive pas souvent .
tellement les situations , les dialogues ,les gags et
les rebondissements à distance entre les protagonistes de cette période de notre histoire s'entrechoquent à toute vitesse.
le scenario et le dessin sont au top.
Une excellente bd qui mérite une place de choix dans votre bibliothèque .
je vous conseille le tirage grand format noir et blanc.
une période difficile pour nos gouvernants, institutions politiques et militaires.
Le début de la fin de notre colonialisme en Algérie. La perte de confiance
en la parole donnée. Les hésitations, volte-face et contradictions de nos militaires et politiques face à des événements qu'ils ont bien du mal à maîtriser. Tout cela est relaté avec beaucoup d'humour.
On lit cet album d'un trait.
Un regard hilarant sur des évènements clés de notre histoire. La prise de pouvoir, le fameux "coup d'état" de 1958, la naissance de notre 5ème république, toujours là de nos jours. L'histoire vue sous l'angle de la pantalonnade, la farce, le vaudeville. Un général sort par une porte, un autre entre par une autre. Pas très tendre pour les gradés de cette époque, un peu apprentis dictateurs un peu pieds nickelés. Un scénario jubilatoire servi par le dessin de Boucq qui s'en donne à cœur joie dans la caricature.
Un peu d'histoire politique ne fait pas de mal, sauf que là j'en ai mal à mes zygomatiques. Bah oui, quand la réalité dépasse la fiction ça en devient affligeant pour notre plus grand bonheur : à un tel point de bêtise que ça en devient drôle ! Et dire que ces hommes nous ont gouverné ! Pitoyable !
Je conseille la version grand format en noir et blanc qui est top pour profiter au maximum du dessin du talentueux François Boucq, et un grand bravo à Juncker pour son scénario implaquable.