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epuis les bas-fonds londoniens, la colère des Angry Mothers se propage progressivement à toute l’Angleterre. Mais que peut la fureur de ces mères alors que la première d’entre elles, en bonne poule pondeuse et gardienne des valeurs de l’Empire, rêve de réduire au silence cette populace de basse engeance ?
Dans le Londres victorien, Zidrou réinvente la lutte des classes en la teintant d’orientalisme, de fantastique et de yōkai…
La constance est un art difficile et rares sont les séries qui, sur la durée, savent se préserver, à défaut de se renouveler… Pour l’heure, Shi domine parfaitement son sujet et il est à espérer qu’il en soit ainsi tout au long de ce nouveau cycle… annoncé sous la forme d‘un diptyque ! Quoi qu’il en soit, force est de constater que sur ce dernier opus, le scénariste belge fait état, sans faire étalage, de tout son art. Jonglant avec les temporalités et les lieux sans pour autant se disperser, il donne sens et consistance à cette fiction tout comme il en renforce singulièrement la puissance en la plongeant dans un cadre réaliste autant qu’historique. Pour peu de se laisser aller, Black Friday pourrait rimer, toute proportion gardée, avec Bloody Sunday. Cependant, le magnétisme qui se dégage de ce cinquième volume, comme des autres d’ailleurs, doit aussi beaucoup au dessin et à la couleur de Homs. Le dessinateur espagnol atteint ici une forme de maîtrise, pour ne pas dire de maturité, tant sur la physionomie des protagonistes ou la qualité des décors lorsqu'il est question de parler d’esthétique que dans l’agencement interne et les angles de vue pour ce qui relève de l’architecture ou de la dynamique de ses planches.
Avec Black Friday, les évènements s’enchaînent avec une fluidité qui maintient le lecteur en haleine jusqu’à la dernière page ; désormais, le dénouement semble tenir plus du jeu d’échecs que de la partie de go ! Gageons seulement que les nombreuses interrogations demeurées en suspens trouveront, à la lecture prochaine de La grande puanteur, quelques réponses...
Un épisode qui nous promène dans le temps, à la découverte de la petite Kita qui est initiée bébé au monde des démons Ichi, Ni, San, Shi à travers la chansonnette interdite, on se trouve un siècle plus tard avec un commissaire anglais appelé par la maitresse d'école :"La petite Wanda a disparu" et ce n'est pas le premier cas de disparition; pour se retrouver au champ de course où Lord Fiddle, nommé commandant de la police de Londres retrouve avec sa femme sa tante Camilla et William complètement alcoolique et commente la prochaine naissance du dixième héritier de la couronne tout autant que les manifestations des "angry mothers" emmenées par la fille répudiée de Camilla : Jay. Le tout du récit repris sur les pages du roman de Dickens reçu par Appoline la fille de Jay en héritage.
Comme à leur habitude, les auteurs vont nous balader entre le monde victorien là où est née la colère contre l'oppression anglaise et le monde actuel qui lutte contre les injustices, telles les mutilations d'innocents ou le vols d'enfants à l'accouchement : spolier la masse populaire pour satisfaire les désirs des nantis frustrés.
Après la distribution de tracts dénonçant le travail des enfants, Jay s'attaque aux responsables des usines en les rançonnant et les marquant aux fer rouge "Shi" comme des hors la loi. En cela suivie par toutes les mères qui voient leurs jeunes enfants envoyés dans les mines qui luttent contre cet esclavagisme de bas salaire. Les profiteurs s'insurgent, la police met la tête de Jay et Kita à prix. La loi martiale est décrétée à Londres. Pendant que Jay et Kita et leurs démons filent le parfait amour, les imprimeries de la révolte mettent sous presse des milliers d'avis d'invitation au soulèvement. De leur visite aux entreprises, Kita et jay ramènent des milliers de livres sterlings pour financer la révolution, qui très vite sera noyée par l'armée dans un bain de sang, des mères abattues pour la bonne cause. Kita tombe sous les balles, Jay est emprisonnée. la révolution semble vaincue; la reine a gagné. Kita est récupérée mourante par Sensei qui lui retire la balle logée en son sein. La décision est prise, il faut réunir les démons, il faut le roi "rei" pour batte la reine. Dans sa cellule, Jay fait monter sa rage et son démon apparaît. Au 20° siècle, grâce à sa secrétaire, le commissaire remarque que chaque enlèvement est marqué d'un signe, le signe "Shi" signe des femmes en colères. Quelle va être la suite de l'enquête, comment Jay, Sensei et Kita vont faire venir le roi? voir suite...
Retour de la grande série socio-politique avec un second cycle que l’on découvre, surpris, annoncé en deux albums seulement. Reprenant la construction temporelle complexe juxtaposant les époques sans véritables liens, Zidrou bascule ensuite dans un récit plus linéaire et accessible où l’on voit l’affrontement entre la naissance du mouvement des Suffragettes et la société bourgeoise qui ne peut tolérer cette contestation de l’Ordre moral qui étouffe le royaume. Les lecteurs de la série retrouveront ainsi les séquences connues, à la fois radicales, intimistes, sexy et violentes. Et toujours ces planches sublimes où Josep Homs montre son art des visages.
L’itinéraire de Jay et Kita se croise donc avec un échange épistolaire original à travers les années avec la fille de Jay, sorte de fil rouge très ténu qui court depuis le début sans que l’on sache sur quoi il va déboucher. L’écho contemporain bascule cette fois dans les années soixante (on suppose) où un policier enquête sur une disparition qui le mène sur la piste des Mères en colère. Pas plus d’incidence que précédemment mais l’idée est bien de rappeler que les évènements du XIX° siècle débouchent sur un combat concret à travers les époques.
Avec la même élégance textuelle comme graphique, Shi continue son chemin avec brio et sans faiblir. On patiente jusqu’au prochain avec gourmandise!
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2022/09/14/shi-5-black-friday/
Un nouveau cycle qui part sur de bonnes bases en repartant sur les points forts du premier cycle : chronique et révolte sociale, bons dessins...
Nous verrons vers quoi nous mènent les auteurs avec cette histoire de kidnappings d'enfants...
J'avais peur...
J'avais vraiment peur que ce second cycle soit moins abouti, moins intéressant, bref qu'il ne serve à pas grand chose sinon étirer encore et encore une série qui à cartonné.
Mais ce n'est pas le cas.
Même si on change un peu d'époque et qu'on voit bien que les années ont passées, il y a toujours une véritable cohérence dans la chronologie et la cohérence des faits.
L'histoire est bien construite et on se replonge sans difficultés dans la lutte des "femmes en colère".
Le très beau graphisme est lui aussi toujours au rendez-vous même s'il est un peu moins spectaculaire et grandiose.
Il en ressort tout de même un excellent album dont la suite clôturera déjà ce second cycle.
Quel bonheur de retrouver cette série au scénario toujours aussi léché et au dessin toujours aussi somptueux!
Surtout que je ne m'y attendais pas: De ce que j'en avais pensé, le volume4 était la fin de l'histoire!
Je garde une déception cependant, c'est que le lien avec l'époque actuelle qui apparait en filigrane tout au long de l'histoire ne soit pas plus présent.
Cette seconde saison est annoncée en 2tomes. J'espère que le second basculera plus vers le combat de ce groupuscule contemporain. J'ai tellement adoré cette série que je n'aimerais pas qu'elle s'éternise avec "les albums de trop".
J'ai trouvé ce nouveau tome moins intense que les précédents.
Le dessin est toujours aussi bon pour les personnages et les éléments de décors mais il m'a semblé un peu moins spectaculaire en termes de lumières et de cadrages. Autre exemple, beaucoup de fonds de cases neutres, uniformément bleus ou gris, auraient mérité plus de textures et de profondeur.
Cependant, même si J. Homs nous avait habitué à encore plus de virtuosité, son talent n'est évidemment pas à remettre en cause. C'est clairement à la précision et la force de son trait que la série doit son succès.
Le scénario part lui aussi sur des bases plus simples. Les 2 arcs narratifs ne réservent guère de surprise pour l'instant. Mais linéaires et cohérents, ils permettent une excellente fluidité de lecture.
Malgré cette légère baisse de régime, "Shi" reste une BD de très haut niveau et je ne doute pas que ce nouveau cycle se conclura de façon détonante dans sa seconde partie.
Bonjour ce nouvel album lance les nouvelles aventures de nos héroïnes Le scénario est toujours aussi captivant par contre pour ma part je suis déçu par le dessin Il me semble qu il n’est pas au niveau des précédents album Il y a quelques faiblesses sur certains personnages Mais dans l ensemble cela reste une bonne bd
une fois arrivé à la fin du tome 4, j'avais craint de ne plus avoir le plaisir de parcourir cet univers. bonne surprise à l'apparition du 5 qui s'annonce comme le début d'une suite. 2022 commence bien !!!
cette suite est plus compréhensible que les autres albums du moins pour moi.
même si les allers retours entre 2 époques m'ont un peu déconcertés.
les dessins sont toujours aussi bons.
vivement la suite.