B
erlin, milieu des années 1950. Guntram Müller, ancien policier devenu journaliste, milite pour rétablir la mémoire de Maurice Bavaud, un jeune Suisse qui a fomenté un attentat contre Adolf Hitler. Le gamin a été guillotiné, alors pourquoi diable s’acharner à refaire le procès ? Le reporter ayant l’occasion de réaliser une entrevue avec Nikita Khrouchtchev, il confie le dossier à Wolf Fiala, un stagiaire qu’il prend sous son aile. En toile de fond, les occupants américains et soviétiques se livrent à une vive lutte d’influence.
Le scénario de Patrice Perna est exceptionnellement bien construit. La dynamique se montre complexe, les motivations de chacun ne sont pas toujours claires et dans cette guerre froide balbutiante, les réponses se trouvent généralement vingt ou quarante ans plus tôt (montée du nazisme et révolution bolchévique). Le lecteur pourrait s’y perdre, mais au final, toutes les pièces se mettent en place et l’ensemble apparaît parfaitement cohérent.
Cela dit, au-delà de la trame policière, le livre discute d’éthique et de culpabilité. Est-il justifié de tuer un tyran ? Si le meurtre s’explique par des principes supérieurs, est-il pardonnable ? Est-il acceptable d’obéir aveuglément ? La neutralité est-elle perpétuellement défendable ? L’auteur juge d’ailleurs sévèrement la position de Berne qui a fermé les yeux sur les actions du troisième Reich, faisant en sorte que le pays sorte indemne du conflit, alors que ses voisins étaient sérieusement amochés.
Le récit aborde du reste le thème de la rédemption. Tout d’abord celle d’un agent de la Gestapo ayant brisé la jeunesse d’un môme. Il est également question de Moscou dénonçant les exactions staliniennes et des tribunaux allemands offrant dédommagement à la famille de l’idéaliste. La Suisse attendra pour sa part 2008 avant de le réhabiliter.
Les illustrations de Francisco Ruizge donnent un ton austère au projet. Il y a en effet quelque chose de sévère dans son dessin réaliste et souvent dépouillé, lequel s’associe à une colorisation pastel. Dans ce diptyque aux allures de reportage, où les scènes de dialogue se révèlent abondantes, l’artiste dynamise l’action en multipliant les plans et les cadrages. Et c’est fort réussi.
La Deuxième Guerre mondiale, vue par le petit bout de la lorgnette, pour raconter une histoire tendant vers l’universel.
Il faut se souvenir que dans le premier tome, deux journalistes est-allemand enquêtait sur le procès de Maurice Bavaud, une jeune suisse séminariste qui voulait éliminer Hitler pour le bien de l'humanité. Il faut jugé coupable de tentative d'assassinat et exécuté sommairement.
On le pris pour un terroriste ou encore un illuminé mais surtout pas pour un résistant. Il faut dire que la Suisse était désireuse de conserver sa stricte neutralité et ses relations de bienveillance vis à vis du régime nazi en cas d'issue favorable de la guerre.
Le second tome va un peu plus loin avec une seconde histoire qui concerne le camarade Nikita Khrouchtchev sur le point de faire un discours de rupture avec le stalinisme ce qui ne plaît pas trop à quelques pointures du Politburo. Il est alors question d'un complot visant à se débarrasser de lui.
Cette partie sera plus dans l'action avec quelques invraisemblances comme le jeune journaliste Wolf Fiala qui se trouve être mêlé avec l'histoire personnelle de Maurice Bavaud 20 ans plus tôt. C''est d'ailleurs une bien incroyable coïncidence d'autant que la vengeance ne constituait pas sa mission première. J'ai trouvé la ficelle trop grosse d'autant que je la voyais venir.
Pour le reste, le dénouement sera à la hauteur de ce que l'on espérait à savoir que la justice soit rendue. Maurice Bavaud sera en quelque sorte réhabilité et Khrouchtchev sera sauvé, que demande le peuple ?
Au final, un bon thriller sur fond d'espionnage et de réalité historique habilement mêlée.