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epuis des années, la pyramide démographique nippone voit inlassablement sa base s’amincir. Résultat, les personnes âgées comptent maintenant pour trente pour cent de la population, un record au sein du G7. Les «otoshiyori» font donc partie du paysage. Passionnée du Pays du soleil levant, Isabelle Boinot a remarqué leur présence lors de ses voyages sur place. Étonnée et intéressée, elle a décidé de mener une enquête à sa manière. Enfin, enquête, le mot est un peu fort dans le cas de cet album. Non, il s’agit davantage d’un recueil d’impressions et de rencontres faites au hasard au cours de balades à travers les villes. Un petit vieux qui promène son chien, un groupe de copines chancelantes qui se retrouve autour d’une tasse de thé ou ces deux sœurs pâtissières qui proposent des douceurs dans une échoppe qui semble ne pas avoir changé d’un iota depuis son ouverture, il y a bien des lustres. Pas de doute, ils sont partout !
Entre curiosité et appréhension de son propre futur, l’autrice rend tout d’abord un hommage sincère et amusé au troisième âge. D’ailleurs, plus que des sujets d’étude, ces femmes et ces hommes deviennent de véritables acteurs sous la plume de la dessinatrice. Pas des stars de blockbusters ou des réseaux sociaux évidemment. Dans cette société qui a heureusement choisi de les respecter, leurs rôles sont nettement plus subtils et certainement plus intéressants. Frêles silhouettes, rides et gestes mesurés soulignent qu’ils occupent l’espace depuis longtemps. D’une certaine façon, ils ancrent le passé dans le présent et appellent à la prudence en ce qui concerne l’avenir. Oui, bientôt, ce sera ton tour d’avoir les os qui craquent. Regarde bien ce qui va t’arriver.
Moins BD que livre illustré, Otoshiyori – trésors japonais est un ouvrage qui prend le temps de s’arrêter et de regarder autour de lui. Tout en douceur, Boinot montre et raconte la fragilité et la fugacité. Celles de la vie humaine, mais aussi les traces ou les preuves de son passage (une boutique hors-d’âge à la clientèle disparue, des produits oubliés au design suranné, des habitudes tombées en désuétudes, etc.) rien n’échappe à l’œil et au pinceau de cette artiste-reporter tombée sous le charme de ceux qui ont vu tant de printemps.
Leçon de vie et de modestie, cette véritable lecture zen dont l’action principale s’est déroulée bien avant son sommaire, Otoshiyori – trésors japonais mêle espièglerie et admiration, le tout sous le couvert d’une réelle érudition.
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