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erséphone, vous connaissez ? Non ! Lore Olympus ? Non plus ! Ce n’est pas grave si vous exceptez les 72.4 millions de vues, les 421.890 abonnés et les 190 épisodes dont 4 en Fast Pass parus… sur Webtoon Entertainment Inc. Heureusement, Hugo BD vous donne une bonne raison de vous rattraper et de pouvoir briller en société !
Cela étant, parlons un peu de Rachel Smythe, simplement pour dire que cette trentenaire néozélandaise rêvait d’être réalisatrice, mais compte tenu d’un certain nombre de difficultés à percer dans la profession, elle se réorienta sur le tard vers les webcomics… bien lui en a pris. Toutefois, cet album n’est pas sa première production, mais elle efface, par sa notoriété, tout ce que l’autrice avait pu faire auparavant ! Ce faisant l’idée était tentante de vouloir investir d’autres médias, cependant passer du web au papier n’est pas sans risque… Ce qui prévaut pour l’un n’étant pas forcément paroles d’évangile pour l’autre, d’autant plus que les webtoons se lisent verticalement en scrollant puisqu’ils ont été développés en Corée du Sud pour les téléphones portables !
Sur la forme, les éditions Hugo Publishing ont décidé de faire les choses à l’ancienne. Un pavé de 360 pages d’un format hybride aux couleurs flamboyantes avec une couverture rigide incrémentée d’un titre en relief. Visuellement, l’objet qui regroupe les 25 premiers épisodes fait son petit effet. Une fois ouvert et le premier chapitre passé, il est évident que pour la mise en forme, le passage du vertical à une lecture horizontale a demandé beaucoup d’ajustements. Difficile de véritablement parler de planches, c'est à dire que les vignettes sont – par rapport à la version sur smartphone - redimensionnées, redécoupées, parfois supprimer et réagencées sur la page afin de retrouver une dynamique propre à un sens de lecture de gauche à droite et décomposée en strips. Autres points de différenciation, les dialogues ont (souvent) été repris et les couleurs « papier » sont, malgré les effets de style, plus ternes, moins brillantes et contrastées ce qui rend, pour peu d’avoir comparé, la lecture moins attrayante.
Mais qu’en est-il du fond ? Pour l’occasion Rachel Smythe a déstructuré le mythe grec, l’a éclaté façon puzzle, en a gardé que ce qui pouvait – à sons sens - faire écho chez ses lecteurs puis a recontextualisé le tout pour offrir un récit taillé pour la génération Z. Ainsi, le scénario propose deux niveaux de lecture et, pour qui sait les trouver, sème d’ici et de là quelques références lettrées tout en offrant un récit léger et fashion. Mais Lore Olympus est plus qu’une simple adaptation d’un mythe immortalisé dans le marbre par Gian Lorenzo Bernini ; il permet d’aborder de manière contemporaine des thèmes séculiers tels les relations toxiques, le formatage social ou le harcèlement sexuel… L’erreur serait de prendre à la légère le propos au prétexte d’un trait girly et coloré.
Lore Olympus réussit, comme le veut la formule consacrée, à faire du neuf avec du vieux tout en dépoussiérant les Métamorphoses d'Ovide à coup de Wacom Cintiq ou de pinceaux Kylebrush et en le transposant avec les codes d’aujourd’hui… perpétuant ainsi le mythe. Reste aux plus patients (et à condition de lire Shakespeare dans le texte) à attendre le 5 juillet 2022, les autres pourront toujours se ruer sur leur portable !
Voici le mythe d'Hadès et de Perséphone qui est revu et corrigé par Rachel Smythe (auteure de Nouvelle-Zélande) pour le moderniser à une sauce assez piquante voir indigeste pour certains lecteurs. C'est clair que je ne peux leur donner tort à savoir que cela fait un peu émission de télé réalité sur les sœurs Kardashian voulant sortir en boîte pour se trouver un mec le temps d'une soirée.
Bon, il n'y a pas de mal que de vouloir s'amuser un peu. Pour autant, l'auteure nous prévient qu'il y aura de la maltraitance physique et psychologique avec relation toxique à l'appui. Je dois dire que je m'attendais à pire.
Oui, les temps changent et il faut s'adapter ou crever. Il y a le choix de l'isolation également mais bon, ce n'est jamais très bon. Je me dis que si un nouveau public peut découvrir l'un des plus grands mythes de la Grèce antique de cette manière assez ludique, pourquoi pas après tout ?
Il est vrai que l'engouement autour de cette BD paraît assez formidable et sans doute disproportionné. Il y a mieux sur le marché mais le mieux n'est-il pas l'ennemi du bien ?
Il faut voir cette œuvre comme un nouveau parti pris, une réécriture pour la faire ancrer dans notre époque actuelle où les filles branchées communiquent avec leurs portables. Moi, j'ai trouvé qu'il y avait une certaine fraîcheur qui se dégageait de cette œuvre qui finalement devient intemporelle.
Nous avons une mère Démeter qui fait tout pour que sa fille la belle Perséphone soit protégée de la tentation. Mais le temps d'une soirée glamour, elle va tomber amoureuse d'un bad boy qui est quand même le maître des enfers. Il l'enlève et entame une relation de gré ou de force.
Sur le plan graphique, il y a de belles trouvailles avec les couleurs rattachées aux différents dieux de l'Olympe qu'on va croiser en boîte de nuit ou en train de faire du shopping.
Au final, on peut se laisser convaincre par Lore Olympus. Dans tous les cas, cela ne laissera pas indifférent.