L
es écrits de George Orwell appartiennent maintenant au domaine public, comme en fait foi la multiplication des versions de ses romans publiées depuis une année. L’histoire de La ferme des animaux est connue. Dans une exploitation agricole britannique, les bêtes se rebellent et chassent le paysan qui les exploite et les maltraite. Ils établissent une république où quadrupèdes et volatiles sont tous égaux. L’utopie s’essouffle rapidement. Les cochons dictent des règles de plus en plus sévères, avant de carrément imposer leur dictature.
Au moment de sa publication, la fable ciblait ouvertement l’Union des Républiques socialistes soviétiques. Soixante-quinze ans plus tard, l’empire communiste s’est dissout, mais restent, un peu partout sur Terre, des élections truquées, l’obscurantisme religieux, la culture du bannissement ou la justice expéditive sur les réseaux sociaux. Ces phénomènes témoignent d'un monde où les fondements de la démocratie demeurent fragiles. Cette reprise, écourtée mais fidèle, a le mérite d’inviter à la redécouverte d’un pamphlet qui est, malheureusement, toujours pertinent.
Étant donné la quasi-absence de dialogues et de phylactères et à peine deux ou trois dessins par page, le projet a davantage l’allure d’un album illustré que d’une bande dessinée. Le Brésilien transpose le texte de façon très picturale ; ses coups de pinceau, bien visibles, traduisent une forme d’empressement ou encore de détermination. Certains motifs en deviennent presque abstraits. En porte-à-faux avec un propos plutôt sombre, il propose des couleurs claires ; la plupart des vaches, poules et moutons pourraient d’ailleurs figurer dans un livre pour enfants.
L’enfer étant pavé de bonnes intentions, ce récit n’en est certainement pas à sa dernière adaptation.
La fièvre des adaptations et reprises des œuvres classiques s'est emparée de la bande dessinée.
Faut-il y voir le désir d'élargir l'audience de la littérature ?
Ou bien une certaine facilité à s'appuyer sur des histoires éprouvées ?
Comme il est dit dans la chronique BDGEST ci-dessus, cet album n'est pas une bande dessinée mais un objet pictural proche du roman illustré.
Pas du tout convaincu par cette démarche.