A
u milieu du XVIe siècle, une caravelle espagnole chargée des émeraudes de Chichén Itzá aurait fait naufrage sur l’île de Morne-au-diable. Près de cent années se sont écoulées, lorsque l’avide gouverneur de Tortuga négocie une bonne part de ce butin avec la pirate la plus redoutée des frères de la côte, échangeant une carte au trésor contre la promesse de la grâce royale. Tandis que Lady Darksee et son équipage naviguent vers cette terre inhospitalière, Raven la précède d’une semaine et entame son exploration. La redoutable capitaine accoste finalement à bon port après avoir détruit les baraquements construits par des rescapés d’un navire en perdition. Entre la poire et le fromage, un viol et une bastonnade, Raven intervient. Il projette une flèche enflammée sur le parchemin indiquant la précieuse cachette. Et il proclame connaître l’emplacement exact des pierres. Désormais, les deux forbans sont contraints de faire alliance.
Les embruns des sept mers s’engouffrent dans les planches de Mathieu Lauffray et balayent son scénario d’une épopée sans fer aux pieds. L’artiste agrémente en plus son récit du soufre volcanique et d’une tribu de cannibales aussi redoutables qu’un rhum rance. Le souffle de l’aventure, les grands espaces, la liberté absolue : tout est convoqué pour propulser le public au beau milieu de Caraïbes fantasmées. Dans la verticalité ou en cinémascope, la focale s’étale. Les vignettes captent l’action ou l’émotion, rarement un entre-deux mou. Les doubles pages caressent la rétine et assomment la concurrence. Emportées par l’énergie du dessin, quelques fausses-pattes se transforment en véritables droitiers. Néanmoins, ces oublis ponctuels ne sont que le fruit d’un mouvement perpétuel au gré des affrontements renversants.
Il n’y a pas de débat. Graphiquement, ce projet a de la densité à revendre. Pourtant, sa lecture demeure superficielle. Le canevas n’est pas en cause. Les arcs narratifs se rejoignent et se distendent, les rebondissements arrivent à point nommé et le suspens est entretenu jusqu’à la lie. Ce sont les personnages qui manquent de coffre. À force de multiplier les péripéties, Mathieu Lauffray omet de partager les blessures des uns et les motivations des autres. Il y a bien Raven, l’antihéros à la flibusterie solitaire. Cette égérie se révèle davantage au cours de cette suite, où il apparaît très calculateur, voire stratège. Son profil psychologique semble également moins impétueux, si ce n’est dans la grivoiserie. N’est-ce pas l’intervention de ce coquin qui préserve l’hymen convoité de la belle Anne de Montignac ?
De l’autre côté de l’échiquier, l’auteur refuse de décrire la dangereuse antagoniste de son histoire. Quel est son passé, pourquoi aspire-t-elle au pardon du Roi ? Comment s’est-elle forgée sa réputation ? Quels sont ses faits d’armes ? A-t-elle des faiblesses ? Autant de questions inabordées durant Némésis et qui persistent tout au long de l’album Les contrées infernales. La splendide corsaire est présente, parfois rude et souvent impassible. Le lecteur s’en désintéresse et la quête d’un forban, dépourvu d’une opposition digne de son nom, tombe à plat. Au final, Lady Darksee sera très probablement au cœur du dernier tome de la saga, mais n’est-ce pas trop tard ?
Ce deuxième volume de la trilogie Raven fleure bon la trahison, les vapeurs d’alcool et les combats de sabres. Magnifiquement illustré, le divertissement de genre est aussi rythmé que vaguement interprété.
Lire la chronique de tome 1, Némésis.
Je rejoins les incohérences soulignées par "Yovo" (ça me rassure, j'avais peur que c'était moi qui ne comprenait rien. Merci à lui de m'avoir rassuré!).
Cependant, ça reste un album agréable à lire et même s'il y a beaucoup de caricature dans le scénario comme dans le dessin de ces "gueules" de pirates, j'ai passé un bon moment et je trouve que Raven comme Darksee n'ont pas encore livré tous les secrets de qui ils sont au fond d'eux mêmes et cela nous promet un prochain opus passionnant!
Un bon album!
Toujours au même niveau graphiquement (et c'est bien là le point fort), ce second tome s'essouffle un peu niveau scénario.
Tous est long et compliqué à mettre en place. Ca tourne un peu en rond, mais surtout (comme l'a énuméré Yovo dans son avis) il y a beaucoup trop d'incohérences dans l'histoire, le découpage et la mise en scène.
Ca perturbe le lecteur et ça décrédibilise l'histoire.
C'est dommage car il y a vraiment matière à faire quelque chose de grandiose, d'autant plus que je suis un grand client de ce genre d'aventure (même si oui c'est un peu vu et revu).
Heureusement que pour rattraper tout ça, on peut compter sur un graphisme magnifique pour lequel je n'ai rien à dire.
Ambiances, couleurs, dessins, tout est fait pour s'immerger complètement dans l'aventure avec de superbes double-planches.
Malgré tout ces points négatifs, je poursuivrais l'aventure Raven avec plaisir.
Le premier volume m’avait laissé mitigé de par le parti-pris d’un personnage rocambolesque d’anti-héros foireux, avec un dessin et des séquences qui faisaient la part belle à l’humour. Lauffray vise-t’il commercialement le très grand public ou sa fréquentation de Lupano lui a t’elle donné des envies de s’émanciper de son univers noir…?
Ce second tome de la trilogie enchaîne directement et va s’orienter vers une fuite de Raven, Darksee et ses sbires dans les tréfonds de l’île (aux jungles impénétrables et aux décors grandioses bien sur), jusque dans les entrailles du volcan, vers un trésor dont seul Raven sait s’il est réel ou chimérique… En parallèle aux évènements se déroulant dans le fort et la jeune femme et son fils au tempérament bien trempé, on est par moment pas loin du looney toones de par les cabrioles qui tirent plus vers les Pirates des Caraïbes que vers un réalisme à la Aguire. Perso j’aime bien la grande aventure irréel, pour peu que l’enchaînement et le rythme soient solides. Or ce tome confirme que Lauffray n’est pas Dorison et ses pages subissent un certain nombre de coupures sèches qui brisent le rythme de l’action et font hésiter dans sa lecture. Même si l’on voit où l’auteur veut nous emmener, le personnage de Raven n’est du reste pas particulièrement sympathique, du coup on consomme ce tome avec une forme de plaisir industriel propre au cinéma blockbuster mais on l’achève sans supplément d’âme, ni graphique ni scénaristique. Avec un peu le même sentiment que sur le UCC Dolorès de Tarquin, ces contrées infernales restent bien réalisées mais ne laisseront pas la trace indélébile que de précédentes réalisation de l’auteur de Long John Silver ont marquées dans l’histoire de la BD.
Lire sur le blog: https://etagereimaginaire.wordpress.com/2021/10/27/bd-en-vrac-21-raven-2-elecboy/
Le dessin est génial, rien à redire, mais le scenario !
Au-delà des clichés déjà évoqués par tous dans le tome 1, la longue séquence de la jungle m'a laissé franchement perplexe.
Exemples parmi d'autres :
- Le garçonnet qui traverse tout seul et sans encombre une forêt infestée de dangers mortels...
- Un des pirates qui se fait transpercer (on ne sait pas trop par quoi, d'ailleurs) page 42, mais qu'on retrouve à la scène suivante frais et guilleret comme si de rien n'était.
- Le groupe qui saute à l'aveugle d'une falaise rocheuse dont "on ne voit même pas le fond", je cite, sans qu'aucun ne se fasse la moindre égratignure.
Et d'ailleurs, combien sont-ils dans ce groupe ? Cinq ? Six ? Sept ? Impossible de les dénombrer en se fiant aux cases en tout cas, puisqu'il en manque toujours un ou deux alors qu'ils devraient être dans la scène (en fait ils sont 8 mais il faut le déduire...)
Bref, la liste de toutes les incohérences est trop longue.
J'adore les pirates, l'aventure et l'action, et Mathieu Lauffray a bien-sûr un talent fou pour les mettre en image (et j'achèterai la suite pour les dessins). Donc oui, d'accord pour les plus improbables péripéties, je veux bien ne pas être exigeant sur ce genre d'albums de pur divertissement. Mais par contre avec le minimum de crédibilité et de vraisemblance. Parce que là, c'est quand même un peu limite. "Raven" bascule involontairement dans la parodie.
Sauf que "Pirates des Caraïbes" fonctionnait parce que c'était drôle ! Là non.
Dans la continuité du 1er tome, un scénario qui prend effectivement quelques raccourcis faciles avec ses personnages secondaires (trop souvent superficiels) mais une histoire finalement assez rythmée et bourrée d'action, le tout accompagné d'un dessin qui dynamise l’ensemble et nous offre un album plaisant dans la lignée des meilleurs aventures du genre.
Toujours fan, vivement le 3ème opus...
Autant j'avais trouvé que le tome 1 était bien rythmé, avec un début accrocheur, autant j'ai eu du mal entamer le tome 2 où l'intrigue (la recherche du trésor) met du temps à se mettre en place.
Il faut arriver au milieu de l'album pour que l'action et l'aventure l'emportent sur des dialogues parfois inutiles.
L'auteur prend le parti de nous offrir une histoire de pirates se déroulant sur la terre ferme comme dans le film "le corsaire rouge" ou plus récemment dans la bd "Barracuda"(Dufaux/Jeremy), mais cela ne me dérange pas..
Le dessin de Lauffray nous fait oublier les petites faiblesses du scénario ou certaines facilités (comment le jeune Arthur a-t-il réussi à suivre le groupe de pirate dans la jungle hostile?), mais ne boudons pas notre plaisir avec cette série qui a le mérite de nous divertir.
Suite des aventures de Raven, flanqué de Darksee et de ses sbires, à la recherche du fameux trésor de Chichen Itza. Faux semblants, coups bas, trahisons, indigènes hostiles, exécutions, rebondissements et autres morts peu enviables sont au menu de cet album sur cette île pas fantastique pour un schilling.
La caractéristique principale de cet album réside dans le fait qu'une très grande partie de l'action va se dérouler à terre, et nous permettre ainsi de suivre d'un côté Raven/Darksee et de l'autre Drago/le comte, chacun essayant de tirer son épingle du jeu, par le biais d'un rythme bien soutenu et d'un découpage dynamique.
J'ai noté deux/trois facilités scénaristiques un peu grosses à avaler (Anne qui chevauche un vigoureux étalon noir sans arme ni équipement quelconque sur une île remplie de dangers, puis qui tombe sur Raven et Arthur par le plus grand des hasards quelques pages plus loin).
L'auteur maintient le cap et remplit bien son contrat pour l'instant, à savoir, nous livrer un bon gros divertissement de piraterie à défaut de renouveler le genre.