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n minuscule point blanc se détache dans les ténèbres. Un zoom progressif dévoile la capsule Apollo XI, de laquelle se désarrime le LEM, qui amorce sa descente. Le reste fait partie de l'inconscient collectif : la silhouette massive d'un scaphandre campée à côté de la bannière étoilée avec, en arrière-plan, un disque bleu suspendu dans le vide spatial.
L'Homme a posé le pied sur la Lune.
C'est une victoire historique pour les États-Unis d'Amérique, face au bloc de l'Est.
En tout cas, c'est la version officielle.
Alors que Neil Armstrong profite une dernière fois du paysage, il est tétanisé. À quelques centaines de mètres, il découvre un drapeau soviétique et, un peu plus loin... un module lunaire.
Officiellement, les Russes ne sont pas allés sur la Lune. En parallèle à la mission américaine, ils avaient effectivement lancé la sonde Luna 15, censée récolter des échantillons de roche , mais elle s'est écrasée dans la Mare Crisium un peu après que la NASA eut atteint la surface. Autant dire une humiliation totale.
Kosmos joue au jeu du "et si...".
Et si l'URSS avait tenté de coiffer les USA au poteau, envoyant en premier une cosmonaute sur le satellite de la Terre, marquant ainsi de manière éclatante la suprématie communiste ? Pat Perna et Fabien Bedouel imaginent à quoi aurait pu ressembler cette mission, dont l'issue ne pouvait qu'être tragique puisque l'histoire n'en a pas gardé trace. Dans un style presque documentaire, ils proposent une reconstitution crédible de cet hypothétique vol, intégrant les conséquences d'une rivalité malsaine où la sécurité finit par devenir secondaire face à la raison d'État. Pour qui se rappelle, c'était aussi le sujet d'un film méconnu de Robert Altman,Countdown, qui possède la particularité d'être sorti en 1967. S'il est frappé d'obsolescence, il n'en demeure pas moins extrêmement pertinent dans sa démarche critique.
Tout le récit semble opposer l'orgueil qui pousse l'Humanité dans une entreprise complètement folle et l'insignifiance de la race humaine face à l'immensité stellaire. La mise en page joue beaucoup sur les changements d'échelle, partant souvent de larges plans où les vaisseaux et leurs équipages ne sont guère plus grands qu'une tête d'épingle pour progressivement se rapprocher, comme pour illustrer ce paradoxe.
Les planches possèdent cette qualité hypnotique, similaire à celle que Stanley Kubrick avait créée pour 2001, l'Odyssée de l'espace. L'étrange ballet des véhicules spatiaux, suspendus dans le vide fascine dans sa lenteur et sa légèreté. Le parti-pris d'un noir et blanc très tranché permet aussi de tirer parti de la belle profondeur des noirs, tout en laissant au dessinateur la possibilité de proposer des scènes très fortes. La narration, très froide et factuelle, fonctionne parfaitement avec le ton général, jouant subtilement de l'ambiguïté sur la véracité des faits relatés. Les interventions d'officiels des deux camps pourraient même induire que ceci n'est peut-être pas une fiction. Ce ne serait pas la première que des doutes seraient émis sur ce qui s'est réellement déroulé là-haut, parfois avec humour, mais aussi avec beaucoup de sérieux. En période propice aux fake news, Perna et Bedouel ne lancent pourtant pas une nouvelle théorie complotiste. Ils rappellent à quel point il est facile de suggérer des "faits alternatifs", qui trouveront écho chez certains.
Voici une bande dessinée qui ose aborder un sujet complexe et interroger le lecteur sans lui prémâcher la réponse. Et elle est visuellement très réussie. Que demander de plus ?
Pour les fans de hard SF, d’histoire et de relecture de l’histoire, les complotistes ou bien encore les amoureux des beaux dessins spatiaux en N&B, cette BD est un bijou.
Ce noir et blanc incroyablement immersif, cette histoire sur le thème du "et si" extrêmement bien documentée et réaliste. Tout est incroyable dans cet album à la pagination généreuse, et c'est un nouvel indispensable de mes lectures BD. Vertigineux !
un album magistral tout en noir et blanc.
Le scénario est une uchronie tout à fait plausible vu le contexte de l'époque.
La mise en page est exceptionnelle.
oui, cet album est bien un "petit bijou".
Je ne dirai plus jamais "Bedouel" à propos du dessinateur, mais "Monsieur Bedouel" !
On vit une drôle d'époque où l'information que l'on nous donne n'est pas forcément juste. Avec internet, on nous a familiarisé avec les fakes news. On ne sait plus bien démêler le vrai du faux surtout quand il y a un soupçon de vérité.
Kosmos était le nom de code que les russes avaient donné aux échecs des missions spatiale lors de la conquête de la Lune et de leur course effrénée avec les américains. Après la chute du mur de Berlin, il y a eu une déclassification de ces informations.
Le postulat de cette BD est que l'américain Neil Armstrong découvrit sur la Lune qu'il n'était pas arrivé en premier. Cela paraît totalement inimaginable. Et pourtant,cette BD va en faire une démonstration pour le moins troublante avec des éléments objectifs crédibles.
J'avoue qu'à la fin de cette lecture, j'ai essayé de faire des recherches pour ne pas mourir idiot. Evidemment, c'est trop gros pour y croire mais cette BD jette le trouble, c'est certain.
Je pense que les auteurs ont voulu montrer les mécanismes de la fake news dans toute leur splendeur en reprenant d'ailleurs tous les codes du genre.
Un des objectifs était également de rendre hommage aux astronautes qui sont mort pour la cause des étoiles cachés sous un mensonge d'état. Il est vrai que les russes ont toujours menti comme l'indique un moment donné le réalisateur du documentaire sur la conquête de la Lune.
On cherche d'ailleurs encore les nazis en Ukraine mais on ne les trouve toujours pas mais en attendant on envahit un pays pacifique et pro-européen. Certes, les américains ne sont pas en reste mais à ce jeu là, les russes sont quand même de loin les champions de la propagande. La NASA a exposé au monde entier les succès mais également les échecs (on se souvient de l'explosion de la navette Challenger).
Je relève également un dessin en noir et blanc d'une grande qualité esthétique et qui renforce le vide spatial entre hostilité et grandeur absolu. Les scènes dans l'espace sont minutieusement décortiqués. C'est du grand art dans la mise en scène. Je mets presque la note maximale car c'est une réussite !
Je ne m'attendais pas à autant aimer ! C'est très intense, j'ai été totalement plongé dans l'histoire
Je ne suis pas fan du noir et blanc, mais là je m'incline... c'est d'une beauté ! ça n'aurait pas été plus beau en couleur
Le noir et blanc est d'une pureté, et il se met totalement au service du récit
Un petit bijou.
Difficile d'en parler sans spoiler, alors je dirai juste que c'est intense du début à la fin.
Un scénario parfait servi par un visuel en noir et blanc époustouflant. On a l'impression d'y être pour de vrai, dans l'espace.
De plus, je trouve que la couverture, extrêmement sobre, est juste magnifique.