S
i vous aimez le tennis et tout particulièrement Leconte… cet album n’est pas pour vous ; de même, si vous confondez Le Diner de con et les Bronzés !
Leconte fait son cinéma n’est pas de ces albums que vous achetez par hasard. Si celui-ci se retrouve sur votre table de nuit, c’est que l’amateur de BD que vous êtes et le cinéphile qui sommeille en vous cohabitent en bonne harmonie ! Ainsi, si vous vous intéressez au réalisateur de Ridicule sans vraiment éplucher Les cahiers du Cinéma, vous aurez tout le loisir d’en connaître un peu plus sur le personnage et apprécier la modestie et l’éclectisme de l’homme. Cela dit, après avoir constaté que le dessin de Nocoby se montre parfaitement adapté à ce type d’exercice et que Joub fait le job au travers d’un scénario plaisant qui, il faut bien le dire, se contente de suivre son sujet, il ne vous restera plus qu’à refermer cette hagiographie dessinée. Ceci étant, vous pourrez ensuite aller surfer sur les plateformes de VOD afin de dénicher Le mari de la coiffeuse… ce qui vous fera passer le temps en attendant un hypothétique Tintin et les bijoux de la Castafiore !
Patrice Leconte est actuellement l’un des plus grands réalisateurs français de film. Il s’est fait remarquer grâce à des comédies assez populaires qui ont marqué les années 80 comme la série sur les bronzés par exemple. C’est le film « Ridicule » qui lui permet d’avoir le césar du meilleur réalisateur en 1997 mais il loupe de peu l’oscar du meilleur film étranger.
Ce que l’on sait un peu moins, c’est qu’il a travaillé dans le magazine hebdomadaire de bande dessinée «Pilote» au début des années 70. Quand on sait que ce journal a eu une influence déterminante sur le marché français, on comprend qu’une BD documentaire lui est enfin consacrée.
C’est Joub et Nicoby qui ont la responsabilité de mettre en avant la vie de Patrice Leconte où l’on découvre les coulisses du cinéma au travers de nombreuses anecdotes et des souvenirs à travers un échange de conversation.
J’adore toujours autant le trait graphique de Nicoby qui fait dans la finesse malgré la simplicité. C’est toujours agréable à regarder et cela rend le récit assez vivant, frais et aéré.
Sur le fond, on fait la connaissance de Patrice Leconte qui est une personne plutôt sympathique et surtout très travailleur qui laisse libre court à la création artistique. Il a commencé son métier à 27 ans avec un premier film en 1976 (« Les Vécés étaient fermés de l'intérieur ») qui n’a pas eu de succès avec Jean Rochefort et Coluche. Il a ensuite connu le succès avec sa série sur « Les bronzés » en embauchant la troupe du splendide (année 1978 et 1979).
Les années 80 sont florissantes pour Patrice Leconte qui collabore avec de nombreux acteurs français comme par exemple Michel Blanc, avec qui il scénarise notamment les comédies, « Viens chez moi, j'habite chez une copine » en 1980, « Ma femme s'appelle reviens » en 1982 et « Circulez y'a rien à voir » en 1983. Il aime bien également tourner avec Jean Rochefort qui ne m’a jamais trop ménagé.
Après les comédies qui ont contribué à sa célébrité, vient le temps des drames avec «Tandem » en 1987, « Monsieur Hire » en 1989 et « Le Mari de la coiffeuse » en 1990. Il manie plusieurs cordes de l’arc cinématographique avec un sens affûté du cadrage, du dialogue et du jeu d’acteur.
On s’aperçoit que très souvent, les projets de film tombent à l’eau pour des raisons aussi diverses que des retards liés aux agendas des acteurs qui ne sont pas compatibles. En 40 ans, il dit avoir réalisé 30 films dont également 30 films qui ne sont pas produit. Cependant, une fois le film lancé, c’est tout un processus qui se met en place et qu’on verra vers la fin de cet album avec «Maigret».
C’est une BD documentaire assez intéressante sur une tranche de vie d’un réalisateur qui enchaîne plusieurs projets en même temps (cinéma, théâtre, littérature…). Visiblement, il est plutôt accessible et ne s’enferme pas dans une bulle. On peut le croiser sur la table d’un café au beau milieu d’un village. Le mode reste celui du réalisme avec cette conversation qui s’étale sur tout un album mais qui demeure très vivante.
Patrice Leconte porte un regard lucide et critique sur ses œuvres et sa carrière en admettant ses erreurs. J’aime beaucoup cette humilité. A vrai dire, je ne connaissais pas du tout cet homme. Cette BD présente des bons aspects mais on ne doute pas de la sincérité des auteurs. Certes, ils sont fans et connaissent parfaitement l’œuvre du cinéaste. On sait également qu’on croise dans ce milieu des grosses têtes à claque. Mais bon, c’est à l’opposé de Patrice Leconte qui manifeste le désir de collaboration dans un souci créatif.
Au final, ceux qui s’intéressent au cinéma et surtout à ses coulisses ainsi qu’au métier de réalisateur pourront trouver leur compte avec cette biographie très intéressante et réaliste. Il faut dire que tout le monde a bien joué le jeu et cela s’en ressent au niveau du résultat.
J’en profite pour dire que Spielberg sort actuellement un film « The Fabelmans » qui raconte ses débuts de réalisateur en partant de son enfance. C’est le même type de démarche pour nous présenter le métier dans un magnifique hommage au cinéma. Leconte fait également une magnifique déclaration d’amour à son art avec tendresse et bienveillance. Un hommage au septième art qui ne pourra que faire vibrer les cinéphiles…