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out Constance est à l’arrêt : la Grande Mère des Dracs a rendu l’âme et la cérémonie de crémation face au lac ne saurait tolérer la moindre présence de non-initiés ni aucune festivité le temps du deuil. Cela ne fait guère les affaires de l’aubergiste Rasham. Déjà contraint d’héberger à perte le margrave de Münich qui épousera bientôt sa fille, Ley, il se voit obligé de loger également sa belle-sœur Draga, membre de l’Ordre. Ravie de retrouver sa nièce, la guerrière entreprend de lui raconter les origines de sa confrérie. Quand un drame survient au cours de la nuit, la tante ne voit qu’une option pour la jeune fille : l’initier à ses mystères. Ensemble, elles prennent la route, accompagnées d’un certain Aleister, curieux d’en savoir plus sur celles qui passent pour des sorcières.
Après trois albums orientés autour de la quête d’un rarissime œuf de dragon que tous veulent acquérir, Jean-Pierre Pécau signe un hors-série prenant place avant le début de sa saga, en choisissant de mettre à l’honneur l’Ordre de Drac. Il est vrai que le personnage de Draga, ses pouvoirs fantastiques, ainsi que les dernières pages de la Compagnie blanche avaient de quoi titiller la curiosité et donner furieusement envie de percer les secrets de la sororité. Pour cela, l’auteur invoque la légende de Médée et la décline à sa façon, par petites touches. Ainsi, à travers une mise en abyme narrative, sa sulfureuse héroïne brune narre à l’innocente – et un peu bécasse – Ley la vision drac du mythe, expliquant à la fois la défiance – sinon la haine – des hommes qu’entretiennent ces femmes, ainsi que la source de leurs dons magiques. Ces révélations sont enrobées par la quête menée par les protagonistes et les péripéties rencontrées en chemin. Celles-ci englobent quelques passes d’armes – pour l’adrénaline -, des scènes d’alcôves – plaisantes quand elles ne sont pas forcées -, des manipulations – bien fol qui se fie à la seule parole d’autrui – et un final fort en action. Également riche en émotions, ce dernier fait écho, en miroir, avec l’histoire de magicienne de Colchide. Cependant, à l’instar de la série-mère, ce tome pâtit d’un manque de souffle épique qui tiendrait vraiment en haleine. Sous la couverture cosignée par Ugo Pinson et Fred Blanchard, le lecteur retrouve le dessin léché de Léo Pilipovic, mis en couleurs par Jean-Paul Fernandez. La collaboration des deux artistes fonctionne bien. Le trait toujours semi-réaliste et expressif du premier donne du corps aux différentes figures, tout en montrant une bonne maîtrise des décors extérieurs comme intérieurs, mais aussi des différentes époques évoquées. Il est seulement un peu dommage qu’en dehors des costumes marquant le changement temporel, les passages concernant Médée ne se démarquent pas davantage des autres.
Globalement satisfaisant, L’ordre de Drac répond à une attente sur une des factions de la saga, tout en pouvant se lire indépendamment des volets du Dernier dragon. Une plongée au commencement des premières dragonnières suivra-t-elle ? La question est soulevée…
GRANDIOSE et le mot est faible tout pour plaire dessins sublimes et histoire à couper le souffle de la BD comme on aime pas de la BD de Bobo. Ouffffffff