P
ionnier, ingénieur de génie, visionnaire et individualiste indécrottable, Louis Renault (1877 – 1944) est l’entrepreneur français qui se rapproche peut-être le plus du magnat industriel à l’américaine. Sa chute et son décès brutal à la Libération, alors qu’il était accusé de collaboration, ajoute une ultime note dramatique à une destinée qui se confond avec les débuts de l’automobile et le capitalisme triomphant nourri par les préceptes de Frederick Winslow Taylor.
Biographie encombrée et foisonnante, Renault les mains noires retrace méticuleusement cette trajectoire marquée par le progrès technique et la généralisation, d’abord timide, de la voiture privée. Antoine Lapasset dresse un portrait édifiant et réaliste de l’individu et de ses contradictions. Comme tous les perfectionnistes, Louis Renault n’a cessé d’entrer en conflit avec les autres : sa famille qui ne croyait pas à cette curiosité qu’était les premières automobiles, ses collaborateurs dont il exigeait toujours plus, aux mouvements syndicaux naissants, aux différentes administrations, etc. Fort de sa vision et de son usine – son obsession -, il n’a de cesse de vouloir améliorer et raffiner ses modèles. Afin de bien cerner cette personnalité complexe, Lapasset laisse la parole à des proches. Ces témoignages, venant à la fois de l’intérieur et de l’extérieur, donnent un très bon aperçu de l’homme derrière le cambouis. Cette idée s’avère excellente et fait presque pardonner la tendance de l’auteur à absoudre son héros et à «charger» l’époque et ses contemporains afin d’expliquer les égarements de celui-ci.
Malheureusement, même avec toute sa bonne volonté, Benjamin Benéteau n’a pas trouvé la formule adéquate pour retranscrire la minutie hagiographique de son scénariste. Le découpage, particulièrement alambiqué, fait perdre le fil des évènements, tandis que les récitatifs et les dialogues débordent de partout. Le dessinateur fait ce qu’il peut, mais «attaqué» de tous les côtés, il se retrouve régulièrement sans autre solution que de se faire tout petit ou d’abuser d’effets numériques disgracieux pour arriver à caser tous les éléments de son script. Une pagination plus généreuse, voire un deuxième tome, n’aurait pas été de trop pour rendre honneur à cette saga digne des plus grandes dynasties industrielles.
Une marque emblématique, son créateur démiurge et pragmatique à l’os, Renault les mains noires promettait beaucoup. Trop à l’étroit pour exploiter toutes les ramifications sociales, politiques et économiques sous-jacentes de ce sujet passionnant, l’album déçoit également à cause d’une narration sur-construite et étouffante.
Quand on pense à une Renault, on imagine la voiture mais on oublie de voir qu'il y avait à la base un créateur de génie à cette entreprise autrefois familiale.
Il faut remonter au début du XXème siècle pour imaginer un Louis Renault qui tourne la tête à sa famille pratiquant le commerce de la draperie. Ce qui intéresse ce jeune, c'est la mécanique d'où les mains noires ainsi que les premières voitures avec les fameuses courses automobiles. Il perdra d'ailleurs un frère Marcel âgé de 25 ans lors d'un accident. Il mettra alors fin à ce sport dangereux pour se consacrer uniquement aux affaires.
Au niveau caractère, c'est un homme froid et dur qui s'est fait à la force de son poignet en négligeant sa famille pour se consacrer à ses affaires. Il ne fera aucune concession à ses ouvriers syndiqués en introduisant le taylorisme dans ses ateliers avec les cadences infernales pour produire toujours plus.
Durant la Première Guerre Mondiale, on verra qu’il s'est fait exploiter par l'armée mais qu'il a contribué à la Victoire par la fabrication de char d’assaut qui ont fait la différence à la fin de la guerre en 1918. Cela lui coûtera une décennie après la fin de la guerre au profit de Citroën qui triomphe. Cependant, à la faveur de la crise de 1929, les choses vont s'inverser. Renault va triompher dans les années 30.
Lors de la Seconde Guerre Mondiale, il va prendre ses distances avec les militaires et s'engager dans la voie du pacifisme. Lorsque la France est finalement envahie, il tient plus que tout à préserver ses usines dans son giron. C'est là qu'on va l'accuser de collaboration active avec l'ennemi. Les alliés bombarderont ses usines en les réduisant à un tas de miette. Il sera jeté en prison lors de l'épuration mais il n'y survivra pas. Il est mort dans d'atroces conditions. A la fin de cette biographie, on se dit que c'est vraiment une histoire tragique. On s'imagine mal que cela ai pu se terminer ainsi.
J'ai beaucoup aimé le fait que les auteurs n'ont pas fait dans la complaisance et se sont éloignés de l'histoire officielle pour nous raconter la vérité. On sent bien que les politiques se sont servis d'une soi-disante collaboration afin de lui enlever ce joyau nationale qu'il avait construit.
J'ai rarement lu une biographie aussi bien construite et aussi passionnante. Ma note reflète cet état d'esprit.
Grosse déception que cet album. Certes la vie de Louis Renault était un sujet qui pouvait être passionnant. Mais son traitement en un nombre de pages insuffisant le rend indigeste avec des ellipses parfois malvenues. Par ailleurs, le dessin est très inégal à croire que certaines planches ne sont que le storyboard mis en couleur ou que l’auteur a reçu une aide (malvenue) pour tenir les délais. Comment un éditeur prestigieux a-t-il pu sortir un tel album sans en faire corriger toutes les faiblesses ou sans lui donner les moyens d’en faire une vraie référence ? Quel dommage !
Bon ! Renault, vous connaissez ? Evidemment ! Quelle question idiote ! Vous roulez peut-être dans un véhicule de cette marque… Mais savez-vous d’où vient ce nom ? Une famille ? Oui, en quelque sorte…
Bien qu’issu d’une famille fortunée qui produisait des tissus et des boutons, Louis Renault décida de ne pas suivre d’études au grand dam de son père. Louis est un manuel ! Il adore plonger ses mains dans le cambouis. Il décide de construire des voitures et s’illustre particulièrement dans les courses intervilles, des courses particulièrement mortelles tant pour les équipages que pour les autres usagers de la route ou les spectateurs. C’est dans une de ces courses que Louis perdra son frère Marcel, le financier des entreprises Renault.
Louis a, osons le dire, un caractère de cochon et n’accepte pas telles quelles les idées de ses collaborateurs jusqu’à ce qu’il les appréhende et puisse les présenter comme siennes.
Lorsque la guerre éclate en 1914, Louis Renault est appelé à l’armée… Mais comme il construit des moteurs d’avions, il n’ira pas au front… Puis, on le convoque pour fabriquer des obus. Il ignore tout des obus. On l’envoie voir aux arsenaux de Bourges. Il proposera une solution inédite ! Refusée ! Mais devant les pertes terribles en hommes et le besoin d’obus, on demande à Renault de fabriquer ses obus et de les faire tester… C’est un succès ! Tout au long de la guerre, Renault va se battre avec une administration et des esprits bornés peu capables d’entrevoir des solutions du futur. Néanmoins, grâce à sa volonté indomptable, Renault va arriver à ses fins. Il devient un héros, notamment grâce à ses chars FT-17, les chars de la victoire !
Sautons deux décennies… La Seconde Guerre mondiale démarre. La France est vaincue. Que vont devenir les usines Renault ? Et Louis ?
Critique :
Cette géniale BD retrace la vie d’un homme hors du commun avec un caractère bien trempé qui rendra d’énormes services à son pays jusqu’à ce que…
Benjamin Benéteau et Antoine Lapasset nous proposent de découvrir la vie d’un capitaine d’industrie hors du commun, qui n’a pas fait d’études, dont l’énergie se retrouve pleinement dans le trait de la bande dessinée. Cette biographie, somme toute assez complète, permet de découvrir, au travers des 80 pages, les grandes heures, et les erreurs, de Louis Renault.
Une BD de très grande qualité qui ne peut que toucher un très large public.