« La vieillesse est un naufrage. »
Vadim Koczinsky espérait une retraite paisible, mais le destin s’y oppose. Après le décès de sa fille, son gendre, un proxénète, interdit au grand-père de voir son petit-fils. Puis, victime d’un escroc, il n’a plus un euro en poche. Bref, rien ne va plus. Le vieillard, un ancien tireur d’élite de la Légion étrangère, n’est toutefois pas sans ressources. La fin justifiant les moyens, il peut même rendre service à un caïd du crime organisé. Pour le vétéran, il y a là une forme de renaissance.
Scénarisé par Gihef, Supplément frites et sulfateuses conclut les aventures de Monsieur Vadim. Le protagoniste rappelle l’anticonformisme des sacripants des Vieux fourneaux, à cette différence qu’il est passablement moins idéaliste que les anarchistes de Wilfrid Lupano et Paul Cauuet. Dans ce récit humoristique, l’auteur présente un personnage attachant ; un peu à côté de ses pompes, il ne maîtrise pas tous les codes… à moins qu’il les comprenne parfaitement et qu’il cache son jeu pour en tirer avantage. La toile de fond demeure plutôt classique : deux gangs s’affrontent alors que les policiers font leur possible pour que les choses ne dégénèrent pas à l’excès. Le cœur du projet est cependant ailleurs, puisqu’il s’agit avant tout d’une histoire de respect et de dignité.
Morgann Tanco aime visiblement le Midi. Après avoir illustré les quatre volets des Souvenirs d’enfance de Marcel Pagnol, il renoue avec cette région qu’il dessine joliment, sans pour autant tomber dans le piège de la carte postale. Le polar constituant un genre hypercodifié, les starlettes apparaissent minces et mignonnes et les malfrats ont des mines toutes plus patibulaires les unes que les autres. Pour dire vrai, c’est très bien ainsi. L’humour passe beaucoup par le regard des acteurs qui surjouent la terreur, l’étonnement et, à l’occasion, l’ennui. Polyvalent, l’artiste se montre à l’aise pour mettre en images un paysage, une conversation ou une scène d’action, les trois cohabitant parfois dans une même planche. Mention à la belle couverture où le héros, entouré par les gendarmes, est capté en plongée alors qu’il regarde le lecteur droit dans les yeux. Ce dessin initial tranche nettement avec celui du premier tome où, traînant son cabas, le retraité paraissait accablé.
Un agréable divertissement qui devrait plaire aux amateurs des Tontons flingueurs et des nanars de Jean-Paul Belmondo. Et pourquoi pas à ceux des films de Bruce Willis où la brutalité est généralement teintée d’ironie.
Partie sur une bonne lancée, cette bd est presque parfaitement réussie.
Soutenues par un graphisme une nouvelle fois à la hauteur, les scènes orientées polar et les scènes plus cocasses sont cohérentes et jouissives. On prend un vrai plaisir à suivre notre ancien légionnaire dans ses périples tantôt touchant, tantôt violent, tantôt comique.
Malgré ça, je trouve que la conclusion arrive un peu vite et la clôture de ce tome paraît quelque peu bâclée.
Une suite qui déçoit légèrement, les auteurs auraient pu prolonger le plaisir avec un tome supplémentaire.
Au terme du premier tome des aventures de monsieur Vadim, nous l’avons laissé en bien fâcheuse posture, suspendu à l’arbre d’où il s’apprêtait à accomplir sa mission de tireur d’élite sur trois cibles fort antipathiques et extrêmement puissantes dans la région de la Côte d’Azur. Avoir vu son petit-fils parmi les invités l’a complètement déstabilisé, au propre et au figuré.
Dans le parc où a lieu la cérémonie de mariage de la fille du boss, mafieux d’entre les mafieux, c’est la panique ! Mayo qui l’attend à l’entrée du parc en voiture prend peur lorsqu’il voit la foule des invités surgir en hurlant. Il démarre et, en trombe, vient s’encastrer… dans la limousine conduite par quelqu’un qui a un œuf de dinosaure à peler avec lui…
Critique :
Voulez-vous de l’action ? De l’humour ? Du suspense ? Des intrigues ? Un dessin cocasse et dynamique ? Des couleurs variées et parfaitement adaptées aux circonstances ? Alors, n’hésitez pas ! Si ce n’est pas encore fait, procurez-vous le premier tome des aventures de Monsieur Vadim avant de poursuivre avec celui-ci. Et si vous faites partie des bienheureux qui ont eu l’occasion de suivre les heurts et malheurs (surtout pour les autres) de notre tranquille pépé dans ce premier volume, le deuxième va enfin mettre un terme aux angoissantes questions que vous vous posez. Oui, il s’agit bien d’une fin… Ou plutôt d’une conclusion car ce serait dommage que les auteurs en restent là avec ce magnifique personnage de légionnaire retraité ayant subi un AVC, martyrisé par l’arthrose et des souvenirs tragiques. Ce personnage en or mériterait de vivre encore bien des aventures… Malgré lui, bien sûr !
J’espère que Gihef, Morgann Tanco, Cerise et la collection Grand Angle m’entendent et ne se limitent pas à ces deux excellents albums des truculentes aventures de Monsieur Vadim, un paisible retraité qui n’aspire qu’à vivre en paix avec son petit-fils et auquel le lecteur s’attache très vite ! Tout comme à Mayo, ce jeune que les féées ont oublié à la naissance et qui n’a connu que déboires depuis son entrée à l’orphelinat. Il se contente de peu de choses et le fond est bon. On peut dire qu’entre Vadim et lui des liens se tissent même si Mayo a l’art de commettre des gaffes… Pour notre plus grand plaisir !
Comment peut on réaliser un premier album aussi réussi et se planter lamentablement sur le second ?
Quel dommage !